Situation au Mali : Jean Castex annonce la tenue d’un débat au Parlement
Interrogé sur la stratégie de la France au Mali et sur l’avenir de l’opération Barkhane après l’expulsion de l’ambassadeur de France, le Premier ministre a annoncé qu’un débat serait organisé au Parlement, au sens de l'article 50-1 de la Constitution. Le Premier ministre parle d’une « très grave crise politique » et dénonce un pays « qui s’isole et qui cherche la confrontation ».
Les interrogations du Sénat sur l’avenir de l’intervention française au Mali se multiplient. La semaine dernière, deux sénateurs ont pris la parole au cours de la séance de questions au gouvernement, après la mort du brigadier-chef Alexandre Martin. L’expulsion par le gouvernement militaire malien de l’ambassadeur français est venue renforcer le trouble des parlementaires.
Ce 2 février, Jean Castex a été invité à répondre à deux reprises, par le président du groupe socialiste, Patrick Kanner, puis par le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, Christian Cambon (LR). Ce dernier lui a posé une question simple : « Qu’est-ce que vous comptez faire ? Rester au Mali contre la volonté des dirigeants, au risque de pénaliser nos militaires ? […] Dites au Sénat ce qu’il convient de faire […] pour les 58 morts que nous avons perdus ».
« Le Parlement, évidemment, mérite d’être parfaitement informé de cette situation », a reconnu le Premier ministre, face à une « situation extrêmement préoccupante ». Sollicité par le sénateur Patrick Kanner, Jean Castex a annoncé qu’un débat, non suivi d’un vote, sera prochainement planifié. « Le gouvernement organisera un débat sur la base de l’article 50-1 de la Constitution, sur ce sujet extrêmement important. »
« Nous devrons faire évoluer notre dispositif opérationnel », reconnaît Jean Castex
Lors de sa question, Christian Cambon a estimé que « liste des humiliations que le Mali nous fait subir est assez longue pour qu’il n’y ait pas de véritable réponse de la part du gouvernement ». A la remise en cause de l’accord de défense liant la France et le Mali, l’interdiction de survol du pays, l’arrivée des mercenaires russes de Wagner, ou encore la demande de retrait des troupes danoises, le renvoi de l’ambassadeur de France constitue « l’humiliation suprême » pour Christian Cambon. « Face à ces provocations, qui sont des provocations délibérées, la France ne peut pas rester impuissante, faute d'en subir les conséquences, à la fois pour sa crédibilité en Afrique mais aussi en Europe. »
« Il y a incontestablement une très grave crise politique », a admis le Premier ministre. « Le fait que le régime malien renvoie notre ambassadeur monte la fermeté dont nous avons preuve dans la condamnation de ce qu’il s’y passe et nous avons parfaitement bien fait. » Le chef du gouvernement a rappelé que le représentant de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait été renvoyé également. Comme la France, ils avaient protesté contre la remise en cause de la tenue des élections par la junte malienne. Selon Jean Castex, le renvoi de l’ambassadeur est un « élément nouveau dans la stratégie globale », et « nous devrons faire évoluer notre dispositif opérationnel ».
« Vous ne pouvez pas faire endosser au Mali seul cette dégradation de la situation », accuse Patrick Kanner
Pour le président Patrick Kanner, « la déliquescence des relations entre la France et le Mali est aujourd’hui plus que préoccupante ». Mais pour le socialiste, Paris doit également reconnaît une part dans la responsabilité de cette crise. « Vous ne pouvez pas faire endosser au Mali seul cette dégradation de la situation, tout comme revendiquer seul les succès, mais mutualiser les échecs. La France est en première ligne, il faut l’assumer », a appelé l’ancien ministre. Patrick Kanner a notamment critiqué le rôle d’Emmanuel Macron. « Le président de la République n’a pas cessé de fixer des lignes rouges qui ont toutes été franchies. Force est de constater que face à son impuissance, la France n’a plus grand-chose à proposer. »
« Vous dites que le Mali n’est pas seul responsable. Si, Monsieur le président Kanner, je rappelle ce que vous savez toutes et tous, il y a eu un coup d’Etat à l’été 2020, qui a donné lieu à une junte », a réagi le Premier ministre. « La junte qui avait des délais [pour la tenue d’élection] est revenue sur sa parole ». Jean Castex a également dénoncé l’appel fait par le gouvernement malien aux miliciens russes du groupe Wagner, « qui s’est déjà illustré dans d’autres Etats africains par des exactions totalement condamnables ». Et d’ajouter : « C’est un pays qui s’isole, qui cherche la confrontation. »
Jean Castex a précisé que la position de la France serait, « comme toujours », de rechercher une « réponse multilatérale », avec ses partenaires africains et européens.
Interrogé à l'issue des questions au gouvernement, Christian Cambon a estimé qu'un débat au Parlement était la moindre des choses :
« Le premier ministre nous laisse nous exprimer sur les sujets. En revanche, une fois qu’ils sont tranchés, nous nous rangeons derrière l’avis du gouvernement », explique la porte-parole du gouvernement, après le recadrage de François Bayrou sur la question de l’interdiction du port du voile dans les compétitions sportives.
Devant le Sénat, le ministre de l’Intérieur a dénoncé l’antisémitisme « d'une extrême gauche très sectaire », après la publication par LFI d’une affiche polémique, figurant l’animateur Cyril Hanouna avec des codes visuels similaires à ceux des années 1930. « Qui, dans ce parti, s’est excusé ? », a-t-il lancé.
Le gouvernement précise sa position sur le texte du Sénat visant à interdire le port de signes religieux dans les compétitions sportives. L’exécutif inscrira bien la proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Un recadrage, alors que les ministres des Sports et de l’Education nationale affirmaient que ce n’était pas une priorité.
Interrogé par le président du groupe socialiste au Sénat Patrick Kanner, le Premier ministre assure n’avoir fait part que de son « analyse », en jugeant dimanche qu’il n’était pas possible de revenir à un âge de départ de 62 ans. « Je suis sûr qu’elle est partagée sur beaucoup de bancs », estime-t-il.
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