Droit derrière son pupitre, Yannick Jadot a consciencieusement déroulé ses propositions sur le volet travail de son programme. Vendredi 17 décembre, dans le 9e arrondissement de Paris, le candidat d’Europe Ecologie Les Verts a ainsi tenté de percer le mur du son cacophonique de la gauche.
Au même moment, l’ancienne garde des Sceaux, Christiane Taubira, annonce envisager « d’être candidate à l’élection présidentielle ». Quelques instants plus tard, c’est la candidate du Parti socialiste, Anne Hidalgo, qui propose un débat « télévisé » à tous les candidats de gauche : « Débattons, faisons émerger les convergences, mais aussi nos différences ».
Une gageure dans ces circonstances d’imposer un débat d’idées sur le travail ou simplement de détailler des propositions. Gageons tout de même. Yannick Jadot a donc présenté quatre axes pour « redonner du sens au travail ». Sans oublier de tacler les candidats de droite coupables de « mettre en scène une valeur travail qui se traduit par de moins en moins de droits pour les salariés ». Emmanuel Macron a ainsi été blâmé pour avoir insisté sur la pénibilité au travail lors de son interview sur TF1 « alors qu’il a saboté cette question-là ».
Rémunération et pouvoir d’achat : vers un smic à 1 500 euros nets
Le candidat des Verts l’affirme, le smic est détourné de sa fonction première et justifie aujourd’hui « un salaire qui humilie », notamment pour des travailleurs avec une ancienneté conséquente. « J’augmenterai le smic de 125 euros net dès l’été 2022 et le porterai à 1 500 d’euros nets d’ici à la fin du quinquennat », a promis le candidat. Actuellement, le smic est de 1 269 euros nets.
Dans un souci de « répartir équitablement le fruit du travail », Yannick Jadot propose également de rendre obligatoire la renégociation des grilles de salaires des conventions collectives. Mais seulement dès lors que le salaire minimum conventionnel est inférieur au smic.
Dégel du point d’indice des fonctionnaires
Pour les agents de la fonction publique, les Verts poussent une revendication phare : le dégel du point d’indice. Il y a quelques jours, les syndicats ont claqué la porte du ministère de la Fonction publique après l’annonce du gel du point d’indice des fonctionnaires. Excepté deux faibles augmentations de 0,6 % en 2016 et 2017, le point d’indice de la fonction publique n’a pas été revalorisé depuis 2010. Les Verts promettent aussi un plan de « déprécarisation et de titularisation des contractuels dans la fonction publique ».
Sujet d’importance : les travailleurs des plateformes. Au Sénat, l’ubérisation de la société et le sort des travailleurs de ce secteur ont d’ailleurs fait l’objet d’une mission d’information édifiante (voir ici). Yannick Jadot s’engage ici à « reconnaître la présomption de salariat » de cette armée d’auto-entrepreneurs.
Le travail c’est la santé (ou du moins une promesse de campagne)
Sur le volet de la santé des travailleurs, le candidat des Verts veut faire sien un sujet visibilisé par le confinement et la hausse du télétravail : le burn-out. Yannick Jadot propose ainsi de faire reconnaître la dépression et le burn-out comme maladie professionnelle.
L’écologiste s’engage à revenir sur la suppression du compte personnel de prévention de la pénibilité, de le simplifier et d’en renforcer les droits. Pénibilité, un mot contesté par le président de la République au motif qu’il donnerait « le sentiment que le travail serait pénible ».
Le candidat des Verts rappelle, ce vendredi, que les conditions de travail ont des effets concrets et quantifiables : « 13 ans d’espérance de vie séparent les 5 % des plus aisés, des 5 % les plus modestes ».
Après la suppression des CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), Yannick Jadot entend aussi rétablir une instance représentative du personnel dédiée à la santé au travail.
Démocratiser le monde de l’entreprise
Yannick Jadot veut « s’inspirer du modèle allemand » et obliger à ce que la moitié des membres des conseils d’administration ou de surveillance des grandes entreprises soient des représentants des salariés. Démocratiser l’entreprise, c’est le mot d’ordre, le projet porté par plusieurs universitaires dont Dominique Méda et Julia Cagé dans « Le manifeste travail » (Ed. Seuil, 2020). Un sujet qui devrait s’imposer durant la campagne présidentielle.
Le candidat des Verts veut également créer « un chèque syndical » pour permettre aux salariés de soutenir les représentants de leur choix. Le chèque syndical figurait également dans le programme d’Emmanuel Macron en 2017 et aussi dans celui de Benoît Hamon. Un outil censé légitimer les organisations syndicales et redynamiser le dialogue social. Le chèque syndical permettrait ainsi de consolider la négociation collective.
Supprimer le plafonnement de l’indemnité prud’homale
Yannick Jadot promet de revenir sur une des mesures phares du président de la République : le plafonnement des indemnités de licenciement.
Travailler plus ou gagner plus (ou l’inverse)
La réduction du temps de travail est un des axes forts de ses propositions. Pas d’annonces chocs comme, au hasard, l’instauration de la semaine de 4 jours, pour l’écologiste. Il prône cependant la mise en place « d’un compte personnel de temps indemnisé utilisable tout au long de la vie active ». Yannick Jadot promet aussi le lancement, dès le début du mandat, d’une Convention citoyenne sur le temps de travail.