La page de la présidentielle tournée, François Fillon a été de nouveau reçu lundi par les juges d'instruction dans l'enquête sur les soupçons d'emplois fictifs de son épouse et ses enfants comme assistants parlementaires.
Le candidat malheureux de la droite à l'Elysée, en retrait de la vie politique depuis son élimination dès le premier tour, s'est rendu au pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, a appris l'AFP de source proche du dossier. Sa voiture est arrivée peu avant 09H00 et est repartie vers 10H45, a constaté un journaliste de l'AFP.
Ce rendez-vous très court chez les magistrats pose question. "Il n'a pas eu le temps d'être entendu sur le fond du dossier", relève une source proche de l'enquête qui rappelle que l'épouse de l'ancien Premier ministre, Penelope Fillon, était restée plus de douze heures dans le bureau des juges le 28 mars avant d'être mise en examen.
Sollicité, l'avocat de François Fillon, Antonin Levy, n'a souhaité faire aucun commentaire. Le parquet national financier n'a ni confirmé ni infirmé cette convocation "en raison du secret de l'instruction".
L'ancien favori de la campagne présidentielle, qui avait vu sa popularité chuter après les révélations, fin janvier, du Canard enchaîné, a été mis en examen le 14 mars, notamment pour "détournement de fonds publics, complicité et recel de détournement de fonds publics, recel et complicité d'abus de biens sociaux".
Lors de ce premier rendez-vous avec les magistrats, il s'était borné à lire une simple déclaration, justifiant son refus de répondre aux questions par le "calendrier" judiciaire, "en plein cœur de la campagne présidentielle".
Il avait tout de même défendu, dans ce texte, la réalité de l'emploi de son épouse, estimant, au nom de la séparation des pouvoirs, qu'il n'appartient pas à l'autorité judiciaire "de porter un jugement sur le travail d'un parlementaire et la manière dont celui-ci s'organise avec ses collaborateurs".
Deux jours plus tard, les juges avaient élargi leur enquête à des soupçons de trafic d'influence, après les révélations sur les costumes offerts au candidat par une figure des réseaux de la "Françafrique" Robert Bourgi, et à des suspicions d'escroquerie aggravée.
- "Nouvelle convocation"? -
Au cœur de l'affaire, les contrats - de 1986 à 2013 avec plusieurs interruptions - de Penelope Fillon comme assistante parlementaire de son mari ou du suppléant de ce dernier à l'Assemblée nationale, Marc Joulaud, et pour lesquels elle a perçu au total 680.380 euros net. L'enquête a aussi révélé qu'elle avait été rémunérée dès 1982 par son mari pour des "missions" à l'Assemblée.
Autre volet, de possibles abus de biens sociaux alors que Penelope Fillon a été employée de mai 2012 à décembre 2013 à la Revue des deux mondes, propriété de l'homme d'affaires Marc Ladreit de Lacharrière, un proche de l'ex-Premier ministre.
Concernant l'escroquerie, les enquêteurs se demandent si le couple n'a pas cherché à minimiser la durée du travail censé être effectué par Penelope Fillon à La Revue des deux mondes alors qu'elle était, de juillet 2012 à novembre 2013, salariée du magazine littéraire et collaboratrice parlementaire, deux emplois rémunérés à temps plein.
Après le couple Fillon et Marc Joulaud, Marc Ladreit de Lacharrière, 23e fortune de France, a été mis en examen le 12 mai pour "abus de biens sociaux". Seules deux notes écrites par Penelope Fillon ont été publiées au cours de son contrat pour le magazine, alimentant les soupçons d'emploi fictif.
"François Fillon va devoir répondre de l'ensemble de ces soupçons et s'exprimer sur le fond. Il est fort probable qu'une nouvelle convocation soit envisagée dans un avenir proche", d'après la source proche de l'enquête.
Les enfants du couple également au coeur de l'enquête, Charles et Marie Fillon, devraient aussi être convoqués prochainement.