Les propos de Michel Barnier sur la justice européenne, trouvent de l’écho au groupe LR du Sénat
Le candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle, qui souhaite un moratoire sur l’immigration, prône une « souveraineté juridique » de la France, pour éviter les condamnations de la part des instances judiciaires européennes.

Les propos de Michel Barnier sur la justice européenne, trouvent de l’écho au groupe LR du Sénat

Le candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle, qui souhaite un moratoire sur l’immigration, prône une « souveraineté juridique » de la France, pour éviter les condamnations de la part des instances judiciaires européennes.
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Les détails de sa proposition étaient relativement passés inaperçus dans la torpeur de l’été. Dans une tribune au Figaro le 28 juillet, Michel Barnier défendait la nécessité d’un « moratoire » sur l’immigration. Les modalités n’avaient pas été commentées outre mesure. Les journées parlementaires LR à Nîmes le 9 septembre ont changé la donne. Promettant un référendum pour que la France retrouve sa « liberté de manœuvre » en matière d’immigration, l’ancien ministre des Affaires étrangères a nommé les obstacles à contourner. « Nous ne pouvons pas faire tout cela sans avoir retrouvé notre souveraineté juridique, en étant menacés en permanence d’un arrêt ou d’une condamnation de la Cour de Justice européenne ou de la Convention des droits de l’homme, ou d’une interprétation de notre propre institution judiciaire. »

L’ancien commissaire européen et ex-négociateur du Brexit s’est retrouvé méconnaissable aux yeux de certains. « Comment une telle phrase peut-elle avoir été prononcée par un Européen aussi engagé ? », s’est exclamé le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes Clément Beaune, cité par la lettre d’information Politico. L’eurodéputée LREM, Nathalie Loiseau, a, elle aussi, fait part de sa surprise. « Comme négociateur européen du Brexit, Michel Barnier défendait bec et ongles la primauté de la Cour de Justice de l’UE et de la Cour européenne des droits de l’homme. Ou du moins on l’espère. Comme candidat à une primaire il renierait ce qu’il a défendu ? » A Bruxelles, les propos de l’Européen Michel Barnier ont été accueillis avec « consternation », relate le journal Le Monde.

Autant de critiques que peinent à comprendre ses soutiens. « Il connaît suffisamment bien l’Europe pour étudier toutes les possibilités juridiques. S’il a sorti cela, ce n’est pas sans l’avoir bordé juridiquement », défend la sénatrice Catherine Deroche. La sénatrice, présidente de la commission des affaires sociales, fait partie de ses soutiens au Palais du Luxembourg, et peine à comprendre les accusations d’euroscepticisme envoyées en direction de l’ancien commissaire. Selon la tribune de Michel Barnier, un « bouclier constitutionnel » devra garantir que « les dispositions prises durant ce moratoire ne pourront être écartées par une juridiction française au motif des engagements internationaux de la France ».

Les relations entre droit européen et droit national abordées au Sénat il y a trois mois

Le sénateur LR André Reichardt, qui ne soutient pour l’heure aucun candidat dans la primaire, n’est « pas loin de partager la même position ». « Je me demande de temps en temps quelle est la marge de manœuvre du législateur, quand on voit les carcans internationaux qui s’appliquent à nous », approuve le sénateur du Bas-Rhin.

Face au tollé provoqué dans une partie de la classe politique, Michel Barnier a dû repréciser ses intentions. Son « bouclier constitutionnel » ne s’appliquera qu’à la politique migratoire. « Pourquoi avoir limité ça au phénomène migratoire ? J’ose espérer que ce n’est pas juste à des fins électorales », soulève le sénateur Reichardt. Fin août, la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, s’est aussi engouffrée dans cette thématique en promettant de « rompre avec l’impuissance ».

Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes au Sénat, est aussi convaincu qu’il sera « compliqué » d’aborder la proposition de Michel Barnier sous la seule question de l’immigration. Le sénateur, proche de Xavier Bertrand, reconnaît néanmoins qu’il y a « lieu de s’exprimer sur le sujet » des décisions de la Cour de Justice de l’UE qui vont à l’encontre du droit français. En juin, sa commission avait d’ailleurs réuni une table ronde intitulée « pouvoir régalien et droit européen ». Un mois plus tard, la Cour de Justice de l’Union rendait un arrêt retentissant sur le temps de travail des militaires (relire notre article). « Si on n’agit pas, on n’arrivera jamais à retrouver de la sérénité entre le droit français et les instances européennes », admet Jean-François Rapin.

Quant à l’accueil glacial qui a pu être réservé aux propos de Michel Barnier, le sénateur spécialiste des affaires européennes les localise davantage à Bruxelles. « C’est plus eu égard à la stature qu’il avait à la Commission, qui était beaucoup plus européenne. »

A grand renfort de tribunes – en faveur d’une taxe carbone aux frontières de l’UE, puis de l’éducation qu’il érige au rang de « grande cause du prochain quinquennat », Michel Barnier continue d’occuper le terrain.

Partager cet article

Dans la même thématique

Les propos de Michel Barnier sur la justice européenne, trouvent de l’écho au groupe LR du Sénat
3min

Politique

Crise agricole : « Nous essayons de réduire le délai entre la vaccination et l’exportation », assure le ministre du Commerce extérieur, Nicolas Forissier

Vaccination massive et plan de sauvegarde renforcé dans le cadre du Mercosur, le gouvernement s’active pour tenter d'apaiser la crise agricole qui dure. Mais le mouvement ne semble pas faiblir et les mobilisations doivent se poursuivre dans la journée. Invité de la matinale de Public Sénat, le ministre délégué chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité, Nicolas Forissier, juge normal que la règlement de la crise prenne du temps. Il se félicite que la France ait imposé sa clause de sauvegarde dans l’accord du Mercosur.

Le

Les propos de Michel Barnier sur la justice européenne, trouvent de l’écho au groupe LR du Sénat
5min

Politique

Mercosur : le Sénat appelle l'exécutif à saisir la Cour de justice de l’Union européenne

Alors que le traité de libre échange pourrait être ratifié samedi par la présidente de la Commission européenne, la France a réaffirmé ce week-end son rejet du texte en l’état. Après l’Assemblée nationale fin novembre, c’est au tour du Sénat de se prononcer à l’unanimité sur une proposition de résolution visant à demander au gouvernement de saisir la Cour de justice de l’Union européenne pour vérifier la conformité de l’accord.

Le

French President Emmanuel Macron Meets Readers in Marseille to Discuss Democracy and Social Media
5min

Politique

Narcotrafic et plan « Marseille en grand » : ce qu’il faut retenir de la visite d’Emmanuel Macron dans la cité phocéenne

Nouvelle visite du chef de l’Etat dans sa ville de cœur. Après s’être rendu ce matin sur la tombe de Mehdi Kessaci, assassiné par des narcotrafiquants, Emmanuel Macron a annoncé une salve de mesures pour lutter contre le narcotrafic qui gangrène Marseille. Entre une rencontre avec les lecteurs de la Provence, l’inauguration d’un commissariat et la visite du chantier de la gare, Emmanuel Macron a aussi défendu le bilan de son plan « Marseille en grand ».

Le