Alors qu’Emmanuel Macron organise un nouveau cycle de consultations avant de nommer un Premier ministre, Olivier Faure ouvre la porte à des négociations avec les macronistes. Néanmoins, pour les autres composantes du Nouveau Front Populaire la non remise en question de la réforme des retraites n’est pas envisageable.
Stade de France : les forces de l’ordre auraient-elles pu utiliser des drones ?
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Dans son timide mea culpa au Sénat le 1er juin, Gérald Darmanin a reconnu certains ratés dans la gestion de la sécurité publique samedi dernier au Stade de France, qui accueillait la finale de la Ligue des champions. Le ministre de l’Intérieur, auditionné par les commissions des lois et de la culture, a notamment exprimé une déception dans la surveillance des flux de personnes. « Je rappelle que je regrette personnellement que nous n’ayons pas pu utiliser des drones », a expliqué avec un petit sourire le locataire de la place Beauvau. Avant d’ajouter, en guise de sous-entendu aux sénateurs : « Nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler dans d’autres circonstances. »
Est-ce que cet outil de surveillance aurait pu empêcher les violences et les débordements observés samedi ? Là n’est pas la question. Le ministère de l’Intérieur avait théoriquement une base légale à sa disposition pour faire décoller les aéronefs. Il s’agit de la loi du 24 janvier 2022 « relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure ».
« Enfin, la police et la gendarmerie pourront utiliser les drones », applaudissait le ministre en janvier
Quatre jours avant la promulgation, le Conseil constitutionnel avait validé partiellement la loi, en censurant quelques dispositifs. Un certain Gérald Darmanin s’en était d’ailleurs félicité sur Twitter. « Décision du Conseil constitutionnel : enfin, la police et la gendarmerie pourront utiliser les drones, outils essentiels pour assurer la sécurité de nos compatriotes. »
L’usage de drones avec caméras par les forces de sécurité intérieures est défini dans le texte de loi en question aux articles 15 et 16. Dans les circonstances qui motivent l’usage de drones, la loi cite par exemple la « sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique », en cas de « troubles graves à l’ordre public ».
Les conditions d’emploi sont strictement encadrées par cette récente loi. Les vols des aéronefs sont soumis à une autorisation préfectorale, délivrée après une demande précise qui justifie l’usage de drones, détaille le nombre de caméras, la durée ou encore la zone géographique. Le Conseil constitutionnel a censuré la procédure d’urgence qui aurait permis de faire décoller des drones, sans autorisation du préfet, pour une durée de quatre heures. Les Sages ont également refusé l’emploi de drones par la police municipale.
Un décret d’application est nécessaire
La législation prévoit également que les drones policiers ne peuvent pas procéder à une captation du son, ni comporter de traitements automatisés de reconnaissance faciale. Autre garde-fou : les personnels impliqués dans l’opération de maintien de l’ordre ne peuvent visionner les images « en temps réel ou différé » que « pendant la durée strictement nécessaire à l’intervention ».
Pour que les dispositions puissent servir au ministère de l’Intérieur, encore faut-il que la loi s’applique. Le texte promulgué le 24 janvier précise que les modalités d’applications du chapitre relatif aux drones « sont précisées par un décret en Conseil d’Etat pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ». La CNIL a formulé un avis le 24 mars sur un projet de décret. À l’heure où nous écrivons ces lignes, aucun décret d’application relatif à cette partie de la loi ne figure sur Légifrance.
Les drones policiers censurés dans la loi sécurité globale
Avec la loi du 24 janvier, et si le décret a été pris, le ministère de l’Intérieur n’est donc plus démuni pour l’usage de drones pour des raisons de sécurité. Présent à l’origine dans le projet de loi sécurité globale, qui a défrayé la chronique en 2020-2021, l’article sur l’usage des drones policiers avait été censuré par le Conseil constitutionnel en mai 2021. Les Sages avaient considéré que le dispositif était déséquilibré et que les garanties pour les libertés publiques n’étaient pas suffisantes. Leur décision a servi de base à la rédaction de la loi du 24 janvier 2022, entrée dans notre législation.
Deux mois plus tôt, sénateurs et gouvernement se sont affrontés sur l’article relatif à l’emploi des drones policiers. Contre l’avis de Gérald Darmanin, le Sénat défendait l’introduction d’un mécanisme d’autorisation préalable, délivrée par le procureur ou le préfet, suivant la finalité de l’opération. Une façon de border un dispositif particulièrement attentatoire aux libertés publiques, et notamment à la vie privée. « Cela complexifierait beaucoup l’utilisation de ces drones », avait reproché à l’époque Gérald Darmanin, n’y voyant qu’une procédure qui irait « alourdir le travail de la police ».
Dans ses travaux, la commission des lois du Sénat s’était appuyée sur un avis de la CNIL, saisie à leur demande. Mais la légitimité de cette argumentation n’avait pas convaincu le ministre. « Ce n’est pas parce qu’une autorité administrative donne un avis qu’elle engage le législateur », argumentait-il à l’époque. Depuis, le régime de l’autorisation préalable a bien été intégré à la loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure.
Avant 2021, malgré leur usage par le ministère de l’Intérieur notamment à l’occasion de manifestations, les drones à usage policier avaient une assise légale très fragile. À deux reprises, le Conseil d’Etat a estimé qu’une « base législative ou réglementaire était nécessaire pour définir le cadre juridique applicable à l’usage des caméras aéroportées par les autorités publiques ».