StopCovid : vers une nouvelle audition de Cédric O devant la commission d’enquête du Sénat ?
Une nouvelle version de l’application StopCovid devrait voir le jour le 22 octobre. C’est ce qu’a annoncé Jean Castex, ce matin. Problème, jeudi dernier, Cédric O a indiqué aux sénateurs qu’une procédure d’appel d’offres serait lancée fin octobre pour sélectionner un nouveau chef de projet de l’application.
« Décidément à chaque interview, Jean Castex doit faire monter les pulsations de Cédric O à 150. Le Premier ministre a dit exactement le contraire de ce que le secrétaire d’État nous a affirmé jeudi » relève Alain Milon, président LR de la commission d’enquête du Sénat sur la gestion de l’épidémie de Covid-19.
En effet, si l’on écoute l’audition de Cédric O, jeudi, devant la commission d’enquête, l’annonce de Jean Castex, ce matin, sur franceinfo, a de quoi surprendre.
Suite à l’échec de StopCovid « le gouvernement, le président de la République, ont demandé à travailler sur une nouvelle version qui sera officiellement lancée le 22 octobre » a lancé le Premier ministre, précisant au passage, que celle-ci, il la téléchargera. « J'ai pris un portable sécurisé, donc je n'ai pas téléchargé téléCovid (sic) ». « Je ne comprends pas. On nous a dit que StopCovid était une appli totalement sûre en ce qui concerne les données personnelles. Il n’y a pas de raison que ça change avec le Premier ministre » s’amuse Alain Milon. Le président de la commission d'enquête avait d'ailleurs demandé à Cédric O comment avait réagi sa montre connectée quand il avait appris que le Premier ministre ne figurait pas parmi les utilisateurs de l'appli (voir la vidéo).
Plus sérieusement, suite à l’annonce de Jean Castex, Alain Milon songe désormais à auditionner de nouveau le secrétaire d’État à la transition numérique. « Je vais en discuter avec les rapporteurs mais j’aimerais bien ».
Selon des informations révélées par Europe 1, la nouvelle version de l’application s’appellerait « Alerte Covid et « a été arbitrée au dernier conseil de défense qui s'est tenu à l'Élysée le mercredi 7 octobre » soit la veille de l’audition de Cédric O devant les sénateurs.
Pour Cédric O, « Nous ne sommes pas à une semaine près »
Devant la commission d’enquête, le secrétaire d’État était pourtant bien moins empressé que le chef du gouvernement, à voir naître une nouvelle version de StopCovid. « Nous n’aurons pas de deuxième chance (…) « Nous ne sommes pas à une semaine près, compte tenu de la durée prévisible de l’épidémie. Nous y travaillons, nous y réfléchissons. Nous regardons ce qui s’est passé en Angleterre. C’est assez intéressant l’exemple anglais car l’application n’est pas exactement la même dans ses fonctionnalités que celle de l’application allemande qui elle est très proche de l’application française » (…) « Par ailleurs, nous avons besoin de trouver des relais et des alliés (…) Si les professions médicales estiment que c’est utile, alors elles doivent le dire (…) Si les responsables de cafés, hôtels, restaurants estiment que c’est quelque chose qui aidera à ne pas fermer les établissements alors il faut qu’ils nous aident à ce que les gens téléchargent ou activent Stopcovid. Parce qu’on a aussi ce problème-là. Les gens ne savent pas que s’ils n’activent pas l’application alors elle n’est plus utile » avait-il développé.
À écouter Jean Castex, le gouvernement n’aurait plus que 10 jours pour sortir la nouvelle version. Là encore, le calendrier ne coïncide pas avec les propos de Cédric O formulés devant les sénateurs en fin de semaine dernière. « Jusqu’à fin octobre, Capgemini qui est le maître d’œuvre du projet, travaille gratuitement. À partir de fin octobre, nous allons lancer un appel d’offres qui permettra de faire en sorte de désigner, selon des règles de marchés publics, un nouveau chef de projet » avait-il indiqué tout en précisant que ce changement de chef de projet doublerait les coûts de fonctionnement de l’application, de 100.000 euros aujourd'hui à « probablement autour de 200.000 euros ».
« La déclaration de Jean Castex est très surprenante. On a l’impression que l’incohérence des messages gouvernementaux se poursuit. Ça ne va pas les aider à trouver la confiance qui leur a manqué et qui a conduit à l’échec de la première version de l’application » note le sénateur PS, David Assouline.
Pour rappel, seuls 2,6 millions de Français ont téléchargé StopCovid depuis son lancement au mois de juin. Dans le même temps, 1,1 million l’ont désinstallé. De quoi faire pâlir le gouvernement si l’on compare ces données à ceux d’outre-Manche et d’outre-Rhin : 16 millions de personnes ont téléchargé l’application anglaise, et 18 millions l’application allemande.
« Ce n’est pas ce qu’on avait compris »
René-Paul Savary, vice-président LR de la commission d’enquête regrette, lui, « l’absence d’interactivité » de la première version l’application. « Quand vous la téléchargez, vous l’oubliez ensuite. Il faut en faire la promotion au travers l’assurance maladie à l’image des campagnes de vaccination contre la grippe. Si ça permet d’éviter des mesures contraignantes, il ne faut pas se priver des outils numériques » plaide-t-il tout en jugeant lui aussi « un peu incohérentes » les déclarations successives du secrétaire d’État et du Premier ministre. « Ce n’est pas ce qu’on avait compris ».
« L’entêtement du gouvernement »
10 jours pour sortir de nouvelles fonctionnalités à l’application, cela laisse également peu de temps au gouvernement pour saisir la CNIL (la Commission nationale de l’informatique et des libertés) et éventuellement le Parlement pour un vote consultatif, comme cela avait été fait pour la première version de StopCovid. Le secrétaire centriste du Sénat, et membre de la CNIL, Loïc Hervé dénonce « l’entêtement du gouvernement ». « StopCovid est un échec, c’est une réponse centralisée et hyper-techno à une épidémie qui requiert du renseignement humain. En Corée l’application marche mais il y a 30 000 personnes qui travaillent derrière ».
Devant la commission d’enquête, Cédric O avait confié avoir « besoin de trouver des relais et des alliés » pour « relancer l’application ». « Si les professions médicales estiment que c’est utile, alors elles doivent le dire (…) Si les responsables de cafés, hôtels, restaurants estiment que c’est quelque chose qui aidera à ne pas fermer les établissements alors il faut qu’ils nous aident à ce que les gens téléchargent ou activent StopCovid. Parce qu’on a aussi ce problème-là. Les gens ne savent pas que s’ils n’activent pas l’application alors elle n’est plus utile » avait-il développé.
« Là, on est sur une pression sociale lourde » relève Loïc Hervé. « Il est hors de question qu’une personne se voie refuser l’entrée d’un restaurant, d’un bar… soit discriminée parce qu’elle n’aurait pas téléchargé l’appli » prévient-il.
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