Taxe sur les dividendes: un casse-tête pour Bercy… et pour les entreprises
Le coût faramineux de l'annulation de la taxe de 3% sur les dividendes, invalidée par le Conseil constitutionnel, est un casse...

Taxe sur les dividendes: un casse-tête pour Bercy… et pour les entreprises

Le coût faramineux de l'annulation de la taxe de 3% sur les dividendes, invalidée par le Conseil constitutionnel, est un casse...
Public Sénat

Par Valentin BONTEMPS, Eleonore DERMY

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Le coût faramineux de l'annulation de la taxe de 3% sur les dividendes, invalidée par le Conseil constitutionnel, est un casse-tête malvenu pour le gouvernement qui va devoir convaincre les entreprises du bien-fondé d'une "contribution exceptionnelle" pour solder ce litige.

Neuf milliards d'euros: voilà la somme que l'Etat va devoir débourser pour rendre aux entreprises les sommes prélevées au titre de cette taxe. Une ardoise équivalente à trois fois le coût de la réforme de l'ISF, et qui plomberait le déficit public de 0,5 point de PIB si l'Etat devait la rembourser en une année.

"C'est la preuve que lorsque l'on prend des décisions contraires aux règles, on est toujours rattrapés par la patrouille", a insisté le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, précisant que le gouvernement regardait "toutes les possibilités" pour solder ce litige.

La "taxe à 3%", prélevée sur les dividendes distribués par les entreprises, avait déjà été partiellement retoquée en mai par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), qui avait estimé contraire au droit européen que la France l'applique aux dividendes perçus d'une filiale établie ailleurs dans l'UE.

Mais d'autres types de dividendes pouvaient rester assujettis à ce prélèvement, instauré par François Hollande en 2012 afin de compenser une perte de recettes budgétaires et encourager les sociétés à réinvestir leurs bénéfices. Une situation que le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution, cette différence de traitement méconnaissant selon lui les "principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques".

- "risque considérable" -

Le gouvernement avait pris les devants en supprimant cette taxe dans son projet de budget 2018 et en provisionnant 5,7 milliard sur cinq ans pour les remboursements. Une provision qui ne sera "pas suffisante", a reconnu lundi sur France Info Bruno Le Maire, jugeant nécessaire d'étudier d'autres "options".

L'Etat souhaite négocier un "étalement" dans le temps des remboursement dus aux entreprises. "Si nous remboursons tout de suite, on court le risque considérable de ne pas sortir de la procédure pour déficit public excessif", imposée par Bruxelles en cas de déficit dépassant les 3% du PIB, a justifié le ministre.

En parallèle, "une contribution exceptionnelle est envisageable", a ajouté M. Le Maire, évoquant un "petit nombre de groupes" concernés sans préciser le nombre d'entreprises qui pourraient être touchées, ni la nature exacte de cette "contribution".

"Cette taxe a été payée de manière indue, c'est normal qu'on la rembourse". Mais les entreprises "doivent comprendre aussi que tout le monde est comptable de l'intérêt général", a-t-il insisté, jugeant que les grandes entreprises françaises avaient "aussi une responsabilité vis-à-vis de la Nation".

- "dysfonctionnement" -

Pas sûr toutefois que les groupes concernés partagent cet avis. Interrogée par l'AFP, l'Association française des entreprises privées (Afep), qui regroupe 121 grandes entreprises, a refusé de s'exprimer.

De son côté, le vice-président du Medef en charge de la fiscalité, Geoffroy Roux de Bézieux, a affirmé lundi sur BFM Business être "prêt à une discussion", indiquant que les entreprises étaient "conscientes qu'il y a un énorme déficit".

Mais "on considère que ce n'est pas aux entreprises de payer pour les dysfonctionnements de l'Etat", a complété l'organisation patronale auprès de l'AFP.

"Les chefs d'entreprise sont des acteurs responsables, ils savent que le gouvernement fait face à des contraintes budgétaires dans le cadre des critères de Maastricht, mais il n'est pas question qu'il y ait une surtaxe pour payer ce que le Conseil constitutionnel a retoqué", insiste-t-on.

Selon Les Echos et Le Figaro, la piste privilégiée serait en effet une surtaxe d'impôt sur les sociétés (IS) pour les grands groupes. Il faut "éviter toute précipitation en la matière, car quand on se précipite, en général, ça donne de mauvais résultats", a prévenu M. Le Maire.

Le mécanisme retenu ne sera ainsi pas intégré dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2018, actuellement débattu au Parlement, mais dans un projet de loi de finances rectificative (PLFR), qui sera proposé en novembre. Cela va "nous donner le temps d'étudier les choses sereinement", a assuré M. Le Maire.

Partager cet article

Dans la même thématique

PARIS , LES CANDIDATS REMI FERAUD ET EMMANUEL GREGOIRE
8min

Politique

« Force du dégagisme », « fin de cycle » et « bataille de chiens » à venir : les socialistes font le bilan, après la victoire d’Emmanuel Grégoire face à Rémi Féraud

La victoire d’Emmanuel Grégoire, dès le premier tour, lors de la primaire PS qui l’opposait au sénateur Rémi Féraud s’explique notamment par « la volonté de tourner la page Hidalgo » chez les militants, mais aussi le poids des rapports de force issus du congrès PS ou la « dérive clanique » autour de la maire sortante.

Le

SIPA_01206229_000010
6min

Politique

Programmation de l’énergie : en commission, les sénateurs ne reprennent pas le moratoire sur l’éolien et le photovoltaïque

En commission des affaires économiques, les sénateurs ont adopté la proposition de loi sénatoriale, dite Gremillet, qui avait été passablement dénaturée par des amendements des députés LR et RN, puis finalement rejetée par l’Assemblée nationale. Le moratoire sur l’éolien et le photovoltaïque ou encore la réouverture de la centrale nucléaire de Fessenheim ne figurent plus dans le texte adopté en commission pour une deuxième lecture prévue la semaine prochaine.

Le

Taxe sur les dividendes: un casse-tête pour Bercy… et pour les entreprises
3min

Politique

Loi Duplomb : un texte qui permet « de mettre les agriculteurs français au même niveau que les agriculteurs européens », assure son auteur

Ce mardi, Laurent Duplomb, sénateur LR de Haute-Loire, auteur du texte « visant à lever les contraintes sur le métier d’agriculteur », était invité sur la matinale de Public Sénat. Il a évoqué l’accord trouvé en commission mixte paritaire sur sa proposition de loi, ainsi que les critiques qu’elle suscite, notamment en ce qui concerne la réintroduction de l’acétamipride, un pesticide interdit en France depuis 2018.

Le

Taxe sur les dividendes: un casse-tête pour Bercy… et pour les entreprises
2min

Politique

Canicule : « La vigilance rouge ne concerne pas que les publics les plus fragiles, elle concerne tout le monde », déclare François Bayrou

Alors que la France fait face à un épisode caniculaire, François Bayrou, accompagné de Catherine Vautrin, Agnès Pannier-Runacher et Bruno Retailleau s’est rendu ce mardi au centre opérationnel de gestion des crises du ministère de l’Intérieur. L’objectif était de faire état de l’ensemble des mesures prises pour faire face à cette vague de chaleur.

Le