Public Sénat : Quels enseignements tirez-vous de ce scrutin ?
Le premier enseignement, c’est très nettement l’abstention. Elle est historique sous la Ve République, alors les élections municipales sont traditionnellement les élections qui mobilisent le plus les électeurs après l’élection reine : la Présidentielle. Si l’on notait une décroissance de la participation depuis 1983, soulignons que l’abstention gagne pas moins de 21 points par rapport au second tour de 2014 ! Les raisons de cette abstention sont multiples. D'abord, la crise sanitaire a non seulement suscité une inquiétude auprès des électeurs – et pas seulement chez les plus âgés, mais a également empêché la campagne d’exister. Ensuite et à côté de cette raison structurelle, il y a des raisons politiques : l’illisibilité de l’offre politique causée par de nombreuses dissidences et alliances à géométrie variable qui brouillent les repères et n’aident pas à la mobilisation. Et enfin, après quinze semaines d'écart entre les deux tours, les municipales n'étaient tout simplement pas le coeur de leurs préoccupations.
Malgré le taux d’abstention, on tire aussi l’enseignement d’une forte percée écologiste…
Tout à fait, les Verts ont réalisé un score historique en conquérant des villes emblématiques comme Lyon, Strasbourg, Besançon, Bordeaux… Bordeaux qui est d’ailleurs la surprise de ce scrutin puisque les écologistes ont ravi cette ville historiquement ancrée à droite, malgré l’alliance avec LREM. L’enjeu, pour les écologistes, c’est désormais de confirmer cette dynamique sur une élection nationale.
A contrario, La République en marche essuie un échec de grande ampleur…
C’est un énorme échec de la greffe locale. Dans ce scrutin, La République en Marche n’était présente que dans la moitié des villes de plus de 9000 habitants et beaucoup de ses candidats ont fait un score à un chiffre au premier. La victoire d’Edouard Philippe au Havre, c’est finalement l’arbre qui cache la forêt.
Quid des partis « traditionnels » ?
Ce scrutin a également démontré que l’ancien monde n’était pas mort. Le Parti socialiste conserve des fiefs importants et conquiert même de nouvelles villes, comme Nancy ou Saint-Denis. Les Républicains avaient réalisé un très bon premier tour, mais cette dynamique a été tempérée par la perte notamment possible de Marseille et de Bordeaux, même s'ils conservent Toulouse. Le Rassemblement national, quant à lui, s'enracine dans la plupart des villes emblématiques conquises en 2014, mais n’est finalement aux manettes que d’une seule grande ville : Perpignan.
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