Un an après avoir contracté un Covid long, 85 % des patients ont encore au moins un symptôme, affirme une étude de l’Assistance publique- Hôpitaux de Paris et de l’université Paris Cité, publié le 5 avril dans la revue Nature Communication. Le Covid long est une conséquence de l’infection au SARS-CoV-2, il désigne l’absence de retour à un état normal de santé après une infection à la Covid-19 et se caractérise par un ensemble de symptômes. Dans l’optique de faire un point sur la prise en charge des patients atteints du Covid long, l’Office parlementaire des droits scientifiques et technologiques fait un bilan de ce phénomène, dans un rapport plus global sur la lutte contre la pandémie de Covid-19, publié le 13 avril.
La difficulté persistante à définir ce qu’est le Covid long
Dans un premier temps, les députés Jean-François Eliaou et Gérard Leseul ainsi que les sénatrices Sonia de La Provôté et Florence Lassarade, soulignent la difficulté à établir concrètement ce qu’est le Covid long et par extension comment le prendre en charge. Au niveau des symptômes, le rapport de l’Office se base sur une étude suisse publiée en septembre 2021 dans the Annals of internal medecine, pour rappeler que ceux qui prévalent sont l’asthénie (la fatigue), l’anosmie (la perte de l’odorat), les céphalées, la dyspnée (respiration désagréable), les myalgies (douleurs musculaires) et la toux.
Les rapporteurs reviennent également sur les conclusions d’une étude sur le Covid long pédiatrique réalisée au Royaume-Uni en août 2021. Cette recherche menée sur 220 000 participants âgés de 11 à 17 ans, indique que 14 % des cas positifs au SARS-CoV-2 présentaient encore des symptômes après 15 semaines et différents de ceux des adultes : les céphalées et la fatigue sont les symptômes les plus fréquents. Le rapport précise toutefois que des études comparatives avec des enfants n’ayant pas eu la Covid restent nécessaires, afin de distinguer la part de ces événements associée au virus et celle attribuable au contexte épidémique. L’office consacre par ailleurs le second chapitre de son rapport aux conséquences indirectes du Covid-19 sur les enfants.
En France, des patients souffrant de Covid long inégalement pris en charge
Suite à ce bilan de ce qu’est le Covid long, le rapport fait un point sur la stratégie nationale de prise en charge et ses failles. Jusqu’ici, celle-ci a laissé une grande marge de manœuvre aux agences régionales de santé (ARS). Selon le rapport, le premier état des lieux établi en octobre 2021 montre que la France métropolitaine dispose d’un maillage de 118 cellules de coordination post-Covid avec un manque de maillage de proximité.
L’autre problème décrit par le rapport est la prise en charge inégale des patients souffrant de Covid long. En France, la Haute Autorité de santé (HAS) a retenu un délai d’un mois après infection, au-delà duquel il est nécessaire de faire des investigations afin d’éliminer la possibilité d’autres étiologies et de pouvoir prendre en charge les patients rapidement. Toutefois, il n’existe pas d’Affection de longue durée (ALD) exonérante spécifique pour le Covid. Or, celle-ci permettrait le remboursement intégral des soins et la mise en place d’un parcours thérapeutique. De plus, les patients restent inégalement pris en charge et reconnus : « Les personnes souffrant de Covid long ont matière à être déçues », note le rapport.
Renforcer le maillage territorial et créer un cadre clair pour la prise en charge du Covid long
Face à ces conclusions, l’Office parlementaire propose quatre leviers pour améliorer la prise en charge des patients souffrant de Covid long. Le premier consiste à veiller à une égalité d’accès aux parcours de soins post-covid en particulier dans les territoires d’Outre-mer : « La France présente un certain retard dans la mise en place d’un parcours fluide de prise en charge médicale, psychologique et sociale des patients ». Pour y parvenir, les rapporteurs préconisent le développement d’un maillage territorial plus précis et le renforcement de l’utilisation des ressources de télémédecine et de téléexpertise. Ce déploiement devant aller de pair avec la constitution de réseaux régionaux de professionnels pluridisciplinaires, qui permettrait de coordonner la prise en charge et d’éviter l’errance médicale ainsi que le retard de diagnostic. Dans un second temps, le rapport se penche justement sur les soignants et insiste sur la nécessité d’accompagner les médecins généralistes : « Ils constituent le premier recours dans la prise en charge post-Covid, il est nécessaire de les informer sur l’offre existante et de les accompagner dans les contraintes associées à ce syndrome émergent », détaille le rapport, avec pour objectif la réalisation par les médecins eux-mêmes des premières étapes de diagnostics, avant d’envoyer les patients vers un centre de référence dont la vocation est de prendre en charge les cas les plus difficiles.
« Les patients ont besoin d’une information adaptée sur l’offre de soins et les parcours possibles, y compris dans les situations les plus complexes », insistent les rapporteurs, dans la continuité de leurs autres recommandations. Le troisième levier essentiel pour eux est donc le déploiement de l’information autour du Covid long, celle disponible sur Internet demeurant trop hétérogène. Ils saluent toutefois quelques initiatives qui ont vu le jour, comme la CNAM qui a mis en ligne sur Ameli.fr une page spécifique aux symptômes persistants du Covid en lien avec l’association « TousPartenairesCovid ». Une association qui a créé une plateforme permettant d’anticiper et de faciliter la consultation en préparant des éléments pour le médecin traitant ou encore, des initiatives plus locales, comme l’ARS Bretagne et son webinaire à destination des patients, afin de présenter les filières, en collaboration avec l’association #ApresJ20, dans le cas d’un Covid long.
Enfin, les rapporteurs concluent par la nécessité de continuer la recherche sur cet aspect de la maladie en y allouant des financements dédiés, tout en établissant un cadre clair pour sa prise en charge. Ils soulignent aussi l’importance de prendre en considération la demande en ALD exonérante et la reconnaissance du Covid long comme maladie professionnelle réclamée par les patients. Tout en permettant, indique le rapport, un accès égalitaire à certains examens nécessaires à la constitution des dossiers : « Le professeur Tourette-Turgis dit constater une certaine méfiance médicale et une stigmatisation des patients, qui peuvent subir une disqualification de leur parole, des difficultés économiques ou émotionnelles, pour eux-mêmes et leur entourage », détaillent-ils. Outre le Covid long et les conséquences indirectes de la pandémie sur les enfants, l’Office parlementaire des droits scientifiques et technologiques a également étudié les impacts indirects de la crise sanitaire sur les maladies infectieuses et la prise en charge du cancer, avant de clôturer sur les questionnements autour de l’évolution de la pandémie ainsi que la stratégie à adopter sur le long terme.