Publication large des déclarations de patrimoine des parlementaires, transparence des frais de mandat: la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) réclame de nouveau ces mesures pour des avancées plus ambitieuses, dans un rapport publié jeudi.
Après des abus dans l'usage de l'IRFM (indemnité pour frais de mandat des parlementaires) dans le passé, le système a été réformé début 2018, avec des règles plus strictes et un contrôle aléatoire des dépenses. Les députés disposent désormais d'une "avance" de 5.373 euros mensuels, dont 600 euros peuvent être dépensés sans justificatifs, les sénateurs de 5.900 euros, dont 885 euros sans justificatifs.
Il y a "d'indéniables avancées" mais l'usage de l'indemnité "n'est pas plus transparent dans le nouveau système que dans l'ancien", épingle la HATVP dans son rapport d'activités pour l'année 2017.
"Les députés peuvent même opposer le secret à leur déontologue, lors d'un contrôle, sur des informations qu'ils estiment confidentielles ou l'identité de tierces personnes", relève cette institution indépendante, créée en 2014 et présidée par Jean-Louis Nadal, ancien haut magistrat.
La HATVP demande une publication "en open data" des relevés de compte dédiés aux frais de mandat, à l'instar de ce qui se pratique en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, d'autant que "la transparence permet une meilleure appréhension de l'activité des parlementaires".
"En 2017, lors du contrôle de la variation de patrimoine des parlementaires en fin de mandat, la Haute autorité a été particulièrement attentive à un possible usage irrégulier, voire illicite, de cette indemnité", ajoute-t-elle. A ce stade, elle n'a cependant pas transmis de dossier à la justice pour ce motif.
Des parlementaires ont financé par l'IRFM l'acquisition de leur permanence, intégrée ainsi à leur patrimoine. En février, après le signalement d'une association, une enquête préliminaire a ainsi été ouverte sur des soupçons de détournement de fonds publics, après l'achat puis la mise en vente par Jean-Jacques Urvoas, l'ex-garde des Sceaux et ex-député PS du Finistère, de sa permanence à Quimper.
Concernant les déclarations de patrimoine des députés et sénateurs, la HATVP renouvelle également son souhait d'une plus grande transparence. Ces déclarations-là sont uniquement consultables en préfecture et ne peuvent pas être divulguées, conformément à la législation sur la transparence post-Cahuzac de 2013.
"Cette limitation particulièrement drastique (...) n'est pas satisfaisante au regard de l'objectif visant à renforcer la probité et à prévenir les conflits d'intérêts", selon la HATVP, qui évoque un nombre de consultations "très faible" et suggère une publication sur son site.
Au total en 2017, année de fort renouvellement des élus et de certains emplois décidés par le gouvernement, soumis également à son contrôle, la HATVP a reçu 10.622 déclarations de patrimoine et d'intérêts. Sur l'année, elle a enregistré 3,5 millions de pages vues sur son site, un record.
La Haute autorité, qui compte 50 agents, a aussi reçu 106 signalements de citoyens - un chiffre bien supérieur aux années précédentes - ce qui a, dans un quart des cas, conduit à ouvrir ou rouvrir des dossiers.
Globalement, la HATVP à la suite de ses travaux a transmis 19 dossiers à la justice. Treize dossiers concernant des députés et sénateurs sont actuellement étudiés par la Haute autorité pour des omissions substantielles d'intérêts.