Ukraine : qu’est-ce qu’un « couloir humanitaire » ?

Ukraine : qu’est-ce qu’un « couloir humanitaire » ?

Kiev a refusé lundi la mise en place de couloirs humanitaires par la Russie, car les civils ukrainiens, ainsi évacués, auraient été envoyés en Biélorussie ou en Russie. Si l’instauration d’un couloir humanitaire pour évacuer des zones de guerre les populations qui n’interviennent pas directement dans un conflit est un principe fixé par la Convention de Genève, il est souvent difficilement respecté.
Romain David

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Emmanuel Macron condamne « le cynisme moral et politique » du Kremlin. Dans un entretien accordé à LCI lundi 7 mars, le chef de l’Etat a fustigé la proposition russe d’installer des couloirs sanitaires pour évacuer les civils ukrainiens des principales zones de conflits. Une initiative aussitôt retoquée par Kiev, dans la mesure où la Russie se proposait d’évacuer les citoyens vers son propre territoire ou vers la Biélorussie. « Il faut que les acteurs de l’humanitaire puissent intervenir, et qu’il y ait des trêves complètes quand ils interviennent pour mettre en protection les femmes, les enfants et les hommes qui doivent être sortis de la zone de conflit. Ce ne sont pas seulement des couloirs qui sont tout de suite menacés, et ça n’est pas ce discours hypocrite qui consiste à dire, on va aller protéger les gens pour les emmener en Russie. Tout cela n’est pas sérieux », s’est agacé le président français.

Douze jours après le début de l’invasion russe de l’Ukraine, les Occidentaux et Moscou ne parviennent pas à s’attendre sur la mise en place d’un cessez-le-feu durable dans le pays. Deux rounds de pourparlers entre représentants russes et ukrainiens ont déjà échoué, une troisième série de discussions était prévue ce lundi. D’après des déclarations des autorités russes, elles devraient être centrées notamment sur la mise en place de ces fameux couloirs.

Une obligation imposée par la convention de Genève

Un « couloir » ou « corridor » humanitaire est un itinéraire sécurisé dans une zone de conflit ou de catastrophe naturelle qui doit permettre l’acheminement d’une aide ou l’évacuation de personnes. L’article 23 de la Convention de Genève de 1949, qui définit les règles à respecter dans un conflit armé, fixe la nécessité du « libre passage de tout envoi de médicaments et de matériel sanitaire ainsi que des objets nécessaires au culte, destinés uniquement à la population civile. » Ce texte évoque également « l’envoi de vivres indispensables, de vêtements et de fortifiants réservés aux enfants de moins de quinze ans, aux femmes enceintes ou en couches. » L’obligation de mise en place de ces convois est « subordonnée » à la certitude qu’ils ne puissent pas être détournés par l’ennemi.

Ce principe des corridors humanitaires a été réaffirmé par une résolution de l’ONU de décembre 1990. Elle rappelle que l’acheminement d’une aide est généralement assuré par des organisations intergouvernementales ou non gouvernementales, et enjoint donc les Etats « à faciliter la mise en œuvre par ces organisations de l’assistance humanitaire ». La convention de Genève, quant à elle, précise que la distribution sur place peut être supervisée « par les puissances protectrices ». « Que ce soit dans des conflits étatiques ou non étatiques, avec des bandes armées, tout acteur est tenu de garantir l’accès à une aide humanitaire. Les blocus et les entraves à l’acheminement constituent des atteintes au droit international », insiste auprès de Public Sénat Jon Cerezo, responsable humanitaire pour Oxfam France.

Difficile mise en place

On l’aura compris, au-delà de la nécessité d’une aide ou d’une évacuation des populations qui ne font pas partie du conflit, les règles internationales ne sont pas très claires, ni sur la manière dont ces couloirs humanitaires doivent être mis en place, ni par qui. Notamment parce que, dans des régions particulièrement dévastées, ces corridors réclament un important dispositif logistique, qui dépend généralement du bon vouloir des belligérants. « Les organisations attendent des pourparlers un respect absolu du droit international humanitaire, le respect de l’intégrité des travailleurs humanitaires et, bien sûr, la possibilité d’acheminer des biens de première nécessité. », poursuit Jon Cerezo. Autant de conditions qui, bien souvent, sont rarement réunies. « Il faut rappeler qu’il y a eu très peu de corridors réellement mis en œuvre dans l’histoire des conflits », indique ainsi Frédéric Joli, porte-parole du Comité international de la Croix Rouge dans un entretien à Marianne. « C’est une mesure souvent amenée sur la table qui s’avère très compliquée à mettre en œuvre. »

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