Un an après sa création, Place publique, co-fondée par l'essayiste Raphaël Glucksmann, s'accroche à son ambition d'unir la gauche sous une seule bannière, mais si le mouvement participe à nombre de rassemblements en vue des municipales de mars, il peine toujours à exister dans l'opinion.
A l'instar des autres formations de sa famille politique, Place publique a mis la "social-écologie" au cœur de son projet. Elle se veut aussi fortement "démocratisée", et toutes les décisions sont soumises au vote des militants.
"On a envie de créer une structure collective, où toutes les tendances sociales, écologistes et solidaires pourront se retrouver, et faire connaître les mobilisations citoyennes qui existent déjà", affirmait fin 2018 M. Glucksmann.
Un an plus tard, cette structure collective peine à se mettre en place. Pour Place publique, qui compte "plusieurs milliers" d'adhérents, selon ses dirigeants, amener les écologistes d'EELV dans le giron commun s'avère une tâche difficile. EELV, fort de son succès relatif aux élections européennes en mai (troisième position avec 13,5%), présentera une tête de liste écologiste dans la quasi totalité des villes de plus de 100 000 habitants.
Pourtant, "la seule possibilité pour nous (la gauche), c'est l'union. Pour une alternative crédible, il faut un seul mouvement. Sinon, nous seront condamnés à manger du pop-corn en regardant le match Macron-Le Pen" se répéter en 2022, analyse M. Glucksmann.
Avec sa stratégie de "rassemblement le plus large possible" dès le premier tour, Place publique ambitionne d'"apporter "un nouveau souffle" à la gauche, "en associant les citoyens aux décisions", explique Emilie Agnoux, chargée des municipales au sein du mouvement.
Par exemple, à Toulouse, Place publique participe à "l'Archipel citoyen" qui rassemble EELV, LFI et des collectifs citoyens derrière l'écologiste Antoine Maurice. A Saint-Malo, il organise des "+cafés malouins+, avec les citoyens pour co-produire le programme municipal".
- "Nouveau souffle à gauche" -
Presque partout ailleurs (Lyon, Marseille, Nantes, Paris...), il est de tous les rassemblements de gauche. Allié à LFI à Vannes, Place publique est même en tête de la liste, avec François Riou.
Aux Européennes, allié au PS - au grand dam des mitterrandistes historiques, outrés qu'il ait mis en cause leur ancien mentor dans un film sur le Rwanda - la liste Glucksmann n'avait réussi qu'un petit 6,5%. De quoi sauver les meubles malgré tout, avec l'envoi de six députés à Strasbourg, dont deux de Place Publique (lui-même et Aurore Lalucq).
"Après les Européennes, personne n'est mort, tout le monde est faible", juge-t-il aujourd'hui, promettant qu'il y aura "un rééquilibrage aux municipales". Après, "on fera le grand dépassement", veut-il croire. "Il nous restera deux ans (avant la présidentielle de 2022). Mais si la dynamique n'est pas enclenchée dans l'année qui suit les municipales, c'est cuit".
Ce qu'il souhaite, c'est un candidat unique à gauche en 2022, dès le premier tour. Pourquoi pas lui, l'interroge l'AFP ? "Je ne veux pas être président", assure-t-il dans un grand sourire.
Si le discours stratégique et théorique de Place publique est bien rôdé, la pratique est plus compliquée. Les deux autres co-fondateurs du mouvement ont ainsi déjà claqué la porte.
En mars dernier, l'économiste Thomas Porcher dénonçait "une liste d'apparatchiks, pas de citoyens". Et en octobre, c'était au tour de Claire Nouvian de rendre sa carte, "dégoûtée par les luttes intestines" d'un parti "où les courtisans réussissent plus que les combattants".
"Place publique ne s'est pas mal débrouillée stratégiquement", estime pourtant le politologue Jean-Daniel Lévy: "C'est une petite formation avec une personnalité identifiée qui ne la +ramène+ pas trop. Peu connue de l'opinion publique, elle est en revanche bien identifiée par la sphère politique".