Pensez énergies renouvelables et il vous viendra sans doute en premier à l’esprit des images d’éoliennes ou de panneaux photovoltaïques. L’hydroélectricité – produite comme son nom l’indique à partir de la puissance de l’eau – est pourtant la première des énergies renouvelables, totalisant la moitié de leur capacité. Dans la production d’électricité totale, l’hydroélectricité se taille même une place de choix, avec 13 % du total l’an dernier. En clair, cette source d’énergie fait figure de « pilier vert » du mix énergétique français.
Malgré ses atouts et son potentiel – ceux d’une énergie largement décarbonée, capable de s’adapter rapidement à la demande nationale – elle est « confrontée à de multiples difficultés », selon le sénateur LR Daniel Gremillet. Le président du groupe d’études Energies à la Haute assemblée a déposé une proposition de loi « tendant à inscrire l’hydroélectricité au cœur de la transition énergétique et de la relance économique ». Son texte, débattu en séance ce 13 avril, veut simplifier la réglementation sur ce secteur et relâcher la pression fiscale sur ces installations. La filière représente à l’heure actuelle près de 12 000 emplois.
La commission des affaires économiques reste très déçue par les dispositions de la loi énergie-climat de 2019 en matière d’hydroélectricité. Le cadre stratégique est qualifié d’ « inachevé ». A l’initiative du Sénat, la loi précise que la politique énergétique nationale a pour objectif (parmi d’autres) d’encourager la production d’énergie hydraulique. Mais l’Assemblée nationale avait supprimé au cours de la navette les objectifs chiffrés introduits par les sénateurs.
Le projet de loi climat-résilience « étonnamment muet sur l’hydroélectricité »
Le sénateur Daniel Gremillet revient à l’offensive avec sa proposition de loi, en proposant un nouvel horizon pour la loi : 27,5 gigawatts de capacités installées de production hydroélectrique d’ici à 2028 (actuellement, elles se chiffrent à 25,5 gigawatts), dont un quart de hausse entre 2016 et 2028 consacrée aux petites installations dont la puissance (inférieure à 4,5 MW). Les niveaux visés sont supérieurs à ce que prévoit aujourd’hui la PPE (programmation pluriannuelle de l’énergie) pour 2028 : 26,4 à 26,7 gigawatts de puissance installée.
La commission des affaires économiques s’inquiète d’ailleurs que le projet de loi « climat-résilience », actuellement en débat à l’Assemblée nationale, soit « étonnamment muet sur l’hydroélectricité ».
La proposition de loi veut aussi « restaurer le rôle des parlementaires » dans le domaine de l’hydroélectricité. Ils pourront évaluer l’application de ces objectifs. Elle propose d’inscrire les moyens mis en œuvre pour l’électricité dans le rapport sur l’impact environnemental du budget, annexé à chaque projet de loi de finances initiale.
Des articles qui s’attaquent à la complexité normative ou administrative
C’est sur le front de la « complexité normative » que la proposition de loi s’attaque. Elle souhaite par exemple faciliter les augmentations de puissance des petites installations hydrauliques jusqu’à 25 % (même au-delà de 4,5 mégawatts). Elle veut aussi offrir un cadre assoupli expérimental pour les installations de moins de 10 mégawatts. « Afin de remédier aux situations de complexité et d’instabilité normatives qui perdurent localement et sont sources de retard ou, pire, de contentieux, cette expérimentation offrira plusieurs souplesses administratives aux porteurs de projets ou aux gestionnaires », espèrent les sénateurs. Face à la multiplicité des acteurs ou directions publiques, Daniel Gremillet veut un « portail national de l’hydroélectricité » pouvant renseigner les professionnels du secteur en un seul point dématérialisé.
La loi n’est pas la seule source de complexité, le sénateur LR identifie aussi le champ réglementaire, tous les textes publiés par le gouvernement. Il a déposé parallèlement une résolution « tendant à lever les freins réglementaires et administratifs au plein essor de l’hydroélectricité », la loi ne pouvant défaire les actes administratifs.
Réduction de la pression fiscale
Pour encourager le développement de l’hydroélectricité enfin, le texte de Daniel Gremillet propose d’améliorer les incitations fiscales. Un article prévoit une exonération de principe de la taxe foncière sur les parties des installations hydroélectriques destinées à la préservation de la biodiversité et de la continuité écologique. Le sénateur note que la taxe foncière concentre 7 % du total des coûts de fonctionnement annuels. Un article prévoit d’appliquer un plafond de 3 % du chiffre d’affaires pour le cumul des redevances pour prise d’eau et pour occupation du domaine, lorsque les installations hydrauliques autorisées sont situées sur le domaine public fluvial de l’État.
La petite hydroélectricité est également favorisée, avec une réduction d’impôt (de 30 %) sur le revenu des personnes physiques pour les propriétaires de « moulins à eau », basée sur les travaux réalisés pour une mise en conformité avec les règles de préservation de la biodiversité.