Université d’été du Medef : l’inquiétude des entreprises

Université d’été du Medef : l’inquiétude des entreprises

Chaque année, les patrons français ont rendez-vous à l’université d’été du Medef. L’édition 2020 s’ouvre aujourd'hui dans un contexte économique qui n’a jamais été aussi dur et incertain. Malgré les efforts et promesses de l’État, l’inquiétude demeure du côté des chefs d’entreprise et la prudence reste de mise.
Public Sénat

Par Marion Vigreux

Temps de lecture :

5 min

Publié le

4 mois après le déconfinement, la crise du Coronavirus est encore dans tous les esprits. À tel point que l’évènement annuel du Medef, qui s'ouvre cet après-midi, change de nom. Les Rencontres des entrepreneurs de France deviennent la Renaissance des entreprises de France. Car la renaissance, c’est bien tout l’enjeu.

La crise a bouleversé l’économie mondiale et les entreprises françaises n’ont pas été épargnées. Pour les soutenir et les accompagner, l’État n’a pas lésiné sur les moyens. Fonds de solidarité, prêts garantis par l'État (PGE), reports d’échéances fiscales... En tout, ce sont 450 milliards d’euros d’aides publiques qui ont été mis sur la table, auxquels doivent s’ajouter les 100 milliards d’euros du plan de relance, dont l'annonce a été reportée au 3 septembre.

Pour le sénateur Les Républicains Serge Babary, s’il faut saluer l’effort financier fait par l’État, rien n’est gagné pour autant. « Évidemment ces aides sont les bienvenues mais améliorer la situation ne veut pas dire que ça va bien. Je suis assez pessimiste sur la fin de l’année notamment pour les secteurs de l’évènementiel, de la culture mais aussi pour tous les sous-traitants des industries aéronautiques et automobiles. Ils vont devoir attendre des mois avant que les éléments financiers du plan de relance leur reviennent. »

« L’État a été très protecteur comparé à d’autres pays »

Patrick Reimeringer dirige en Alsace la filiale française de l’entreprise allemande Brukert, spécialisée dans les systèmes de régulation de fluides. S’il n’a pas été impacté pendant la crise, il constate en revanche un ralentissement de son activité au mois d’août, de l’ordre de 30 %.

Il reste donc prudent, reporte certains investissements et ne s’interdit pas d’avoir recours au chômage partiel. « Je suis très surpris par l’ampleur de l’aide déployée. Je ne pensais pas que le gouvernement investirait à ce point pour les entreprises. Il a été très protecteur comparé à d’autres pays. Les Allemands, par exemple, sont très étonnés de l’engagement de l’État français ».

« Les douze prochains mois vont être dramatiques ».

« Mais méfions-nous », clame Sylvain Apaire. Le président du Medef du Pays Choletais estime que l’État n’est pas du tout à la hauteur. « On fait croire aux Français que l’ensemble des chefs d’entreprise ont été subventionnés mais c’est faux. Avec le prêt garanti par l’État, on leur a fait signer un contrat flou avec un taux qui n’est pas encore fixé. Et si Bruno Le Maire négocie un taux à 3 %, ce n’est pas du tout avantageux ».

95 % des entreprises qui ont eu recours au PGE sont des TPE et PME. Et à ses yeux, beaucoup risquent de fermer. « Les douze prochains mois vont être dramatiques car on compte sur une reprise dont on ne sait rien. L’État a pris des décisions qui sont hors de son périmètre financier. Et les entreprises vont se retrouver avec des dettes qu’elles n’ont pas voulues et qu’elles vont devoir assumer. Mais comment ? Je suis très inquiet. »

« Le télétravail a fortement mis à mal la culture de l’entreprise »

Pour la sénatrice Pascale Gaudry, secrétaire de la délégation sénatoriale aux entreprises, il faut que les banques s’impliquent davantage. « Pour aider les entreprises, l’État a pris des risques, les régions aussi et je suis très déçue de l’attitude des banques. Je trouve qu’elles ne jouent pas le jeu. Il faut qu’elles s’investissent davantage pour relancer l’économie française. »

Et la rentrée la préoccupe. « Les entreprises ont fait le dos rond cet été mais on sent bien que l’activité ralentit. Les carnets de commandes sont de plus en plus courts. L’ambiance est assez morose et on observe une perte de motivation de la part de certains salariés. Le télétravail les a éloignés de l’entreprise et la culture de l’entreprise a été fortement mise à mal pendant cette période », juge-t-elle.

4 ministres à l’université d’été du Medef

Pour Bruno Le Maire, la France peut retrouver son niveau d’activité d’avant la crise d’ici deux ans. En attendant, Le gouvernement se presse au chevet des entreprises françaises. L’agenda de l’université d’été du Medef le prouve. Pas moins de 4 ministres, parmi les plus haut placés dans l’organigramme gouvernemental, sont attendus. Jean Castex, le Premier ministre, qui a précisé ce matin les dernières orientations du gouvernement pour la rentrée, interviendra mercredi après le discours d’ouverture du président Geoffroy Roux de Bézieux.

Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, participera à un débat sur la nouvelle guerre des mondes. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, interviendra sur la question de la souveraineté européenne. Et enfin, Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique, abordera la problématique de la crise comme révélateur d’une conscience écologique.
 

Dans la même thématique

PARIS, Ministere de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, situe a l’Est de la capitale, dans le quartier de Bercy.
8min

Politique

Fiscalité : à quoi pourrait ressembler un nouvel impôt local ?

« Il n’y aura pas de nouvelle taxe, mais il faut réfléchir à une participation possible au fait de vivre dans la ville ou le village », avance la ministre Catherine Vautrin, qui ouvre la réflexion avec les élus. Au Sénat, le président de la délégation aux collectivités, Bernard Delcros, évoque une « réforme de la taxe foncière », quand le vice-président de l’AMF, Philippe Laurent, défend une contribution qui « tient compte très largement du revenu ». Le débat est loin d’être clôt.

Le

Paris : Debate session of public finances
9min

Politique

Narcotrafic : de courtes peines de prison pour les consommateurs de drogue, une proposition qui divise les mondes judiciaires et politiques

En écho aux nombreux faits divers liés au trafic de drogue, le député Rassemblement national, Jean-Philippe Tanguy, demande la création de courtes peines de prison pour les consommateurs de stupéfiants. Une solution que rejette Raphaël Glucksmann ou Mathilde Panot et qui fait réagir les syndicats de magistrat et de police.

Le

Ursula von der Leyen attends Renaissance European Campus in Bordeaux
6min

Politique

Coup d’envoi des auditions des commissaires européens : « Une évaluation des compétences, mais aussi un filtre politique » 

Ce lundi 4 novembre marque le coup d’envoi des auditions des commissaires européens qui dureront jusqu’au 12 novembre. Ces oraux doivent permettre aux commissaires de développer leur vision de leur action au sein de la Commission européenne. Ce sera aussi l’occasion pour les députés de contrôler l’exécutif et faire valoir leurs priorités politiques.

Le