L’annonce est tombée jeudi lors du point presse du Premier ministre. Mayotte sera reconfinée dès ce soir, 18 heures (15h GMT), en raison de l’aggravation de la situation sanitaire sur place et de l’apparition des variants britannique et sud-africain. Depuis le 1er février, trois communes (Bouéni, Pamandzi et Dzaoudzi Labattoir) étaient déjà confinées du fait de l’observation de taux d’incidence particulièrement élevés.
« Il n’y avait plus d’autres choix au vu de la situation », commente le sénateur de Mayotte, Thani Mohamed Soilihi (RDPI, majorité présidentielle). Le département a effectivement connu une très forte augmentation des hospitalisations ces derniers jours : « 77 patients sont actuellement hospitalisés et 11 patients sont en réanimation », indique le ministère des Outre-mer.
En un mois, le taux d’incidence est passé de 50 à 415/100 000 habitants avec un taux de positivité de 17 %. L’âge des patients admis en réanimation constitue un signal d’alerte, on compte des patients plus jeunes (entre 45 et 60 ans) présentant des formes plus graves avec des détresses respiratoires aiguës sévères.
Un confinement qui ne fait pas l’unanimité chez les élus mahorais
Interrogé par l’AFP, le député LR de Mayotte Mansour Kamardine estime que ce confinement n’est pas la bonne solution : « Les conditions de vie et d’accès aux services de base (eau, électricité) de la moitié de la population rendent le confinement impossible à respecter ». D’après l’Insee, 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté. « Ce n’est pas parce qu’il y a des difficultés qu’il ne faut pas confiner. Le confinement est une mesure destinée à faciliter les politiques menées », estime pour sa part le sénateur Thani Mohamed Soilihi.
Pour le sénateur de Mayotte, la question qui doit se poser est comment faire respecter le confinement. « Il ne suffit pas de décréter le confinement, il faut le faire respecter, il faut l’accompagner d’une surveillance accrue des forces de l’ordre. Il faut un ensemble de mesures car il n’y a pas de solution miracle, même le vaccin ne constitue pas un remède miracle », souligne-t-il. Lors du premier confinement, le sénateur s’était inquiété du manque de contrôles : « La situation sanitaire aurait dû être gérée différemment pendant le premier confinement, la surveillance des forces de l’ordre s’était relâchée, des jeunes avaient organisé des Mrengué (boxe traditionnelle), il fallait taper du poing sur la table ».
Lors de son audition au Sénat le 14 janvier, le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, avait déjà annoncé un renforcement des contrôles aux frontières entre Mayotte et les Comores. A cette occasion, Thani Mohamed Soilihi avait déjà suggéré l’intervention des militaires : « Dans les quartiers où la population est moins encline à respecter le confinement, il faut envoyer l’armée, pas seulement pour un appui sécuritaire mais aussi d’un point de vue logistique comme ce qu’il s’est fait dans le Grand Est », défend-il aujourd’hui.
Une campagne vaccinale à la traîne
Par ailleurs, l’annonce de ce nouveau confinement pose des questions sur la stratégie vaccinale. Sur France info, la députée LREM de Mayotte Ramlati Ali rappelle que la campagne de vaccins a officiellement commencé le 25 janvier « dû aux modalités de conservation du vaccin Pfizer », alors qu’elle a été déployée le 27 décembre dans l’hexagone. La députée alerte le gouvernement sur la nécessité d’accélérer la vaccination, « il a eu jusqu’à ce jour 4 680 doses qui sont arrivées dans le territoire et 88 % ont été consommées ».
« Compte tenu de notre proximité avec les Comores, et de la proximité de la Guyane avec le Brésil, j’avais demandé au Premier ministre de déroger à la stratégie vaccinale pour augmenter le nombre de doses approvisionnées dans ces départements qui ne sont pas dans une situation d’égalité avec les autres territoires. La Guyane et Mayotte ont été classées en rouge, la logique voudrait que ces deux territoires soient prioritaires », soulève le sénateur de Mayotte même s’il comprend le refus du gouvernement. L’exécutif a également annoncé hier des mesures d’urgence économique ainsi qu’une aide alimentaire pour soutenir les Mahorais faire face au confinement.