Vaccination obligatoire pour les enfants: la ministre relance le débat
Réactions épidermiques en perspective! La nouvelle ministre de la Santé Agnès Buzyn a relancé un débat sensible en annonçant vendredi qu'elle...

Vaccination obligatoire pour les enfants: la ministre relance le débat

Réactions épidermiques en perspective! La nouvelle ministre de la Santé Agnès Buzyn a relancé un débat sensible en annonçant vendredi qu'elle...
Public Sénat

Par Brigitte CASTELNAU, Paul RICARD

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Réactions épidermiques en perspective! La nouvelle ministre de la Santé Agnès Buzyn a relancé un débat sensible en annonçant vendredi qu'elle réfléchissait à rendre "obligatoires pour une durée limitée" onze vaccins pour enfants au lieu de trois, dans un contexte de défiance grandissante envers la vaccination.

Aujourd'hui seuls trois vaccins infantiles sont obligatoires, le DTP : diphtérie (depuis 1938), tétanos (depuis 1940) et poliomyélite (depuis 1964). Huit autres, dont la coqueluche, l'hépatite B ou la rougeole, sont seulement recommandés.

"Ce double système est une exception française. Cela pose un vrai problème de santé publique", estime Agnès Buzyn dans une interview au Parisien/Aujourd'hui en France.

Elle rappelle que "la rougeole réapparaît" et qu'elle a causé la mort de 10 enfants depuis 2008. "Le taux de couverture est de 75% alors qu'il devrait être de 95%", souligne-t-elle, et "on a le même problème avec la méningite. Il n'est pas supportable qu'un ado de 15 ans puisse mourir parce qu'il n'est pas vacciné".

"Nous réfléchissons donc à rendre obligatoires les onze vaccins (poliomyélite, tétanos, diphtérie, coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C) pour une durée limitée, qui pourrait être de cinq à dix ans", a déclaré la ministre.

François Hollande et Marisol Touraine,après un conseil des ministres à l'Elysée le 28 octobre 2015
François Hollande et Marisol Touraine,après un conseil des ministres à l'Elysée le 28 octobre 2015
AFP/Archives

Ce dossier des onze vaccins infantiles obligatoires avait été engagé par la précédente ministre de la Santé Marisol Touraine, qui ne l'a pas mené à terme avant la fin du quinquennat Hollande.

- Incohérence et méfiance -

Or, le temps presse. Les trois vaccins obligatoires font l'objet de trois injections groupées (DTP) avant l'âge de 18 mois. Mais depuis 2008, le DTP seul n'est plus commercialisé: les laboratoires l'associent à d'autres vaccins recommandés dans des vaccins polyvalents, vendus plus chers.

En février, le Conseil d’État avait pointé cette incohérence en donnant six mois au ministère pour la lever.

Ce dernier a plusieurs choix possibles. Premièrement, obliger les laboratoires à commercialiser le DTP seul. Deuxièmement, supprimer toute obligation vaccinale, ce qui peut être fait par décret. Troisièmement, étendre l'obligation à d'autres vaccins, ce qui nécessite une loi et semble être le choix de la nouvelle ministre.

Plusieurs organisations médicales plaident pour cette dernière solution, déjà préconisée par un comité en décembre, à l'issue d'une concertation citoyenne.

Mais au pays de Louis Pasteur, père de la vaccination moderne, la méfiance est grandissante: les anti-vaccins fustigent leur dangerosité supposée (notamment en raison des adjuvants comme l'aluminium que certains contiennent) et accusent les laboratoires pharmaceutiques de privilégier la rentabilité à la santé des enfants.

La députée européenne Michèle Rivasi le 29 octobre 2016, à Saint Marc-Jaumergarde, près d'Aix-en-Provence
La députée européenne Michèle Rivasi le 29 octobre 2016, à Saint Marc-Jaumergarde, près d'Aix-en-Provence
AFP/Archives

Selon une étude annuelle publiée en octobre pour le compte de l'organisation des industriels du secteur, 69% des personnes interrogées seulement font confiance aux vaccins (-2 points par rapport à 2015).

- 'Cadeau aux labos'-

L'extension du nombre de vaccins obligatoires serait "un recul sans précédent des libertés", s'est insurgé Augustin de Livois, président de l'Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN), association à l'origine de la plainte auprès du Conseil d’État.

La député européenne EELV Michèle Rivasi a de son côté dénoncé un "cadeau fait aux laboratoires" en pointant du doigt "la multiplication des scandales sanitaires à répétition".

Le cas emblématique est la vaste campagne de vaccination contre l'hépatite B en 1994, qui a ensuite fait naître des soupçons de lien avec des maladies neurologiques comme la sclérose en plaques.

Après plus de 17 ans d'instruction, la justice a conclu l'enquête sur un non-lieu dans ce dossier en mars 2016.

"Imposer 11 vaccinations serait une faute grave", a réagi l'Association des victimes du vaccin hépatite B (Revahb).

A l'inverse, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) appuie la volonté de Mme Buzyn d'élargir l'obligation vaccinale. "Les controverses sur la vaccination ont été alimentées par des contre-vérités sans fondement scientifique rigoureux, mais aussi par les incohérences des pouvoirs publics", juge-t-elle.

Les pro-vaccins font valoir que la vaccination n'est pas qu'un acte individuel mais qu'elle est aussi destinée à protéger la collectivité.

Certains enfants, comme par exemple ceux qui sont atteints de leucémie, ne peuvent être vaccinés. Ils risquent donc d'attraper des virus potentiellement dangereux pour eux au contact d'autres enfants qui n'ont pas été vaccinés par choix.

Partager cet article

Dans la même thématique

World News – October 14, 2025
10min

Politique

Suspension de la réforme des retraites : vers « un vote contre » des députés Renaissance, mais un soutien des sénateurs macronistes

La suspension de la réforme des retraites divise au sein de Renaissance. « Il y a deux écoles », entre ceux, plutôt issus de l’aile gauche, prêts à soutenir « le deal » entre Sébastien Lecornu et le PS, et les autres, notamment de l’aile droite, qui ne veulent pas se « dédire » et pour qui cette « concession énorme » reste au travers de la gorge…

Le

« Gérard Larcher n’était pas content » : crispation au Sénat sur le calendrier budgétaire proposé par le gouvernement
5min

Politique

« Gérard Larcher n’était pas content » : crispation au Sénat sur le calendrier budgétaire proposé par le gouvernement

La définition des séances de travail sur le budget 2026 a froissé le président du Sénat, mardi, lors d’une réunion avec les présidents de commission et le gouvernement. Il estime que le Sénat ne peut pas prendre le relais des textes budgétaires dans de bonnes conditions. Une nouvelle conférence des présidents doit revenir sur la question la semaine prochaine.

Le

General policy speech by Prime Minister at Senate
5min

Politique

Lutte contre le communautarisme : la droite du Sénat propose encore une fois de réviser la Constitution

Lundi, le Sénat examinera une proposition de loi de la droite et du centre visant à inscrire dans la Constitution que « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s’exonérer du respect des règles applicables ». Un principe que la majorité sénatoriale remet à l’ordre du jour régulièrement ces dernières années par le dépôt de différents textes. On retrouve aussi la même idée dans un texte de Marine Le Pen.

Le

Vaccination obligatoire pour les enfants: la ministre relance le débat
3min

Politique

Suspension de la réforme des retraites : « Si cet amendement est proposé, il est fort possible qu’on le vote », indique le sénateur RN Aymeric Durox

Au micro de Public Sénat et LCP, le sénateur RN Aymeric Durox annonce que sa famille politique votera en faveur de l’amendement de suppression de la réforme des retraites, qui doit être présenté par le gouvernement lors de l’examen du budget de la Sécu. Il émet toutefois de sérieuses réserves sur les chances d’aboutissement du texte au vu du contexte politique.

Le