Ventes d’armes : « Il faut à l’évidence améliorer le contrôle des assemblées parlementaires », selon Jean-Dominique Merchet

Ventes d’armes : « Il faut à l’évidence améliorer le contrôle des assemblées parlementaires », selon Jean-Dominique Merchet

Troisième pays exportateur au monde, la France est critiquée pour sa politique de ventes d’armes. Si cette industrie est stratégique en matière d’emploi et de sécurité, la question des exportations reste sensible. Faut-il renforcer la transparence de l’État et ouvrir une discussion autour des contrats ? Jérôme Chapuis et ses invités ouvrent le débat, pour Un Monde en docs, sur Public Sénat.
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Par Victor Missistrano

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À quoi servent les 700 millions d’euros d’armements vendus par la France à l’Arabie saoudite en 2020 ? La guerre au Yémen a relancé le débat sur la question des ventes d’armes. Le Royaume wahhabite, qui s’est engagé dans ce conflit sanglant en 2015, figure en tête des pays clients de la France en matière d’armements dans le rapport annuel rendu public par le ministère des Armées. Ce document détaille la politique française, ses 4,9 milliards d’euros d’exportation de matériels en 2020 et les différents enjeux stratégiques et économiques.

Secret défense, secret des affaires

En France, vendre des armes à un pays étranger est officiellement interdit par la loi. Seule une autorisation spéciale du gouvernement peut permettre à une entreprise d’exporter. Le ministère insiste sur la grande vigilance accordée à l’attribution de ces licences. Chaque année, plusieurs centaines de refus sont décidées au nom de huit critères établis par la position commune européenne comme le respect des droits de l’homme ou la préservation de la paix. « Pourquoi ces refus ne figurent-ils pas dans le rapport ? », s’étonne Aymeric Elluin, chargé de plaidoyer sur les armes à Amnesty International France. Il regrette un manque de détails à propos de ces décisions. De son côté, le sénateur écologiste Guillaume Gontard pointe cette mainmise de l’exécutif sur la gestion des autorisations : « Les autres pays fonctionnent différemment », déplore le parlementaire qui s’interroge : « Comment ces licences sont accordées, pourquoi on vend à certains pays et pas à d’autres ? ». Réponse d’Hervé Grandjean porte-parole du ministère des Armées : « Quand on accorde une licence, on a estimé les usages qui seront faits de cet armement, mais ce n’est pas toujours possible d’en spécifier précisément les usages ». Les impératifs du secret-défense et du secret des affaires compliquent la diffusion des informations.

« Une meilleure visibilité »

Le rapport annuel publié par le ministère des Armées constitue une première étape vers une transparence de l’État, mais il est jugé insuffisant par de nombreux parlementaires et des ONG qui s’accordent sur la nécessité d’un espace de discussion sur ces sujets, qui serait bénéfique en matière d’image et de démocratie. « On a tous intérêt, même les industriels, à ce qu’il y ait une meilleure visibilité et qu’on comprenne bien que parfois il y a besoin de vendre des armes à tel ou tel pays », plaide Guillaume Gontard.

On a tous intérêt, même les industriels, à ce qu’il y ait une meilleure visibilité et qu’on comprenne bien que parfois il y a besoin de vendre des armes à tel ou tel pays.

Une position que rejoint Jean-Dominique Merchet : « Si on l’a fait pour le sujet des services de renseignement, dossier au combien sensible, on peut le faire ici. » Il ajoute : « C’est un vrai sujet, qui doit être débattu au Parlement, dans les médias, les ONG, parce que c’est la politique de la France qui est en jeu ». Le débat, comme celui portant sur le renseignement, pourrait offrir une légitimité aux décisions politiques ; sans forcément ôter les doutes sur une éventuelle responsabilité de la France dans des crimes de guerre.


Retrouvez en replay sur notre site le documentaire « Made in France, au service de la guerre » ainsi que le débat animé par Jérôme Chapuis.

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