Veolia Suez : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle et un projet industriel, on ne peut pas avancer » affirme Philippe Varin
Les représentants de Suez, auditionnés au Sénat ce mardi, ont fustigé « l'agressivité, l’outrance verbale » de Veolia mais aussi un rapprochement qu’ils ne souhaitent pas voir aboutir. Les discussions sont au point mort entre les deux groupes. 

Veolia Suez : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle et un projet industriel, on ne peut pas avancer » affirme Philippe Varin

Les représentants de Suez, auditionnés au Sénat ce mardi, ont fustigé « l'agressivité, l’outrance verbale » de Veolia mais aussi un rapprochement qu’ils ne souhaitent pas voir aboutir. Les discussions sont au point mort entre les deux groupes. 
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

Le feuilleton économico-politique de la rentrée met en scène deux fleurons français : Veolia et Suez. Au Sénat, ce mardi le directeur général de Suez, Bertrand Camus, et le président du conseil d’administration, Philippe Varin ont sans relâche défendu leur groupe : « La France doit éviter la disparition d’un fleuron français », appellent-ils. 

Pour comprendre ce qu’il se joue, il faut remonter au 5 octobre dernier, date à laquelle Veolia est parvenu à racheter au groupe Engie les parts qu’il détenait chez Suez : 29,9 %. Un rachat qui s’est effectué sans l’aval de l’État qui a voté contre. Depuis les discussions n’ont pas reprises, pire c’est un duel au grand jour que se livrent les deux groupes. Le Monde publie d’ailleurs, ce jour, une interview du PDG de Veolia, Antoine Frérot, qui lui non plus n’est pas avare de mots : « Le seul obstacle à cette OPA, c’est l’actuel conseil de Suez, et aucun obstacle ne nous arrêtera ». 

Si le sujet intéresse les sénateurs aujourd’hui, c’est que l’enjeu est de taille puisque ces entreprises travaillent principalement dans le domaine de la gestion des eaux et du traitement des déchets. « Ce sont des services qui touchent au quotidien les Français », a rappelé le président de la commission de l’aménagement et du développement durable, Jean-François Longeot. Le sénateur a fait part des préoccupations de la commission concernant les effets de ce rapprochement sur l’emploi et le savoir-faire de Suez. Mais aussi au sujet des effets sur les prix et la qualité des services pour les collectivités locales. Le rôle de l’État dans cette opération qui ne cesse de créer la polémique est lui aussi au cœur de ces auditions. 

« Notre principal concurrent a lancé, par voie de presse, une opération hostile en vue de racheter en deux temps Suez »

Les représentants de Suez n’ont pas mâché leurs mots devant les sénateurs, condamnant sans cesse la démarche et le « cynisme de Veolia qui n’accorde pas le respect élémentaire aux différentes parties prenantes ». 

« Notre principal concurrent a lancé, par voie de presse, une opération hostile en vue de racheter en deux temps Suez », dénonce Philippe Ravin. « Moi, je n’ai jamais testé l’amicalité lancé avec un train à grande vitesse (...) Je ne pense pas que l'agressivité, l’outrance verbale soient aujourd’hui de bons moyens pour pouvoir rapprocher les points de vue. » Et de prévenir : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle, tant qu’il n’y a pas de projet industriel, tant qu’on ne sait pas ce qu’il y a vraiment sur les remèdes et sur l’emploi, on ne peut pas avancer ». 

Conséquences sur l’emploi : « 4000 à 5000 emplois en France » 

Veolia Suez : « Un projet néfaste », dénonce Bertrand Camus (Suez)
01:46

Le directeur général du groupe Suez, Bertrand Camus a alerté sur « un projet néfaste » pour l’emploi : « Nous avons fait évaluer par des experts les conséquences sur l’emploi de ce rapprochement que nous estimons de l’ordre de 4000 à 5000 emplois en France sans compter les emplois indirects et près du double au niveau mondial ». 

Selon le directeur général du groupe Suez, le rapprochement entre Veolia et Suez aurait aussi des conséquences sur la recherche et le développement entraînant une « fragilisation de l’innovation » qui serait « un vrai gâchis car nous sommes un véritable leader en la matière ». 

Auditionnés au Sénat le 15 octobre, les syndicats du groupe relayaient les mêmes craintes : « Les deux groupes ont les mêmes activités et il est impossible que Veolia conserve toutes les activités de Suez. Cela signifie que le groupe va être démantelé, tout va être dispersé. Ce seront les salariés les victimes », affirmait  Carole Pregermain, élue Force ouvrière et secrétaire du comité de groupe France de Suez (lire notre article).

« La manière dont ce vote s’est déroulé n’est pas claire » 

Veolia Suez : « La manière dont ce vote s’est déroulé n’est pas clair », dénonce Philippe Varin
01:54

La question du rôle de l’État est à plusieurs reprises revenue dans les questions des sénateurs, appelant des réponses réservées. « Factuellement, ce que nous pouvons dire, c’est que la manière dont ce vote s’est déroulé n’est pas claire. Ce n’est, je crois, jamais arrivé qu’un conseil d’une société dont l’État détient 23,4 % passe outre l’avis de l’État », a souligné Philippe Varin. 

Il a également rappelé la déclaration du Premier ministre, Jean Castex, qui le 3 septembre, avait déclaré que le rapprochement Suez Veolia « faisait sens ». D’après le président du conseil d’administration de Suez, cette sortie, bien que rattrapée par Bruno Le Maire, « a créé un retard à l'allumage » dans leur recherche d’investisseurs pour une offre alternative. « On ne va pas, quand on est un investisseur français, s’opposer à l’État », souligne-t-il. 

Dans l’interview accordée au Monde ce mardi, Antoine Frérot reproche aux dirigeants de Suez d’avoir créé « une entité opaque pour rendre inaliénable Suez Eau France ». Devant les sénateurs, Philippe Varin assure, lui, que ce n’est en aucun cas « une pilule empoisonnée » mais simplement « un outil de négociation » face à Veolia, ajoutant aussi que cette fondation pouvait être dissoute à tout moment. 

Toujours concernant l’interview du PDG de Veolia, la sénatrice LR Sophie Primas s’est interrogée sur la menace à peine voilée d’Antoine Frérot de faire débarquer le conseil d'administration de Suez avec le concours des actionnaires. Quelle est la résistance du conseil d’administration du groupe ? « C’est un conseil qui partage la même boussole », assure Philippe Varin. 

Les représentants de Suez sont aussi venus avec une question : « Pourquoi Engie n’a-t-il pas organisé un processus de vente robuste au regard de ces enjeux ? ». Cette question, les sénateurs pourront la poser demain au président d’Engie, Jean-Pierre Clamadieu, qui sera lui aussi auditionné par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. 

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Veolia Suez : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle et un projet industriel, on ne peut pas avancer » affirme Philippe Varin
3min

Politique

Héritage des Jeux : « En 6 ans, on a pu faire ce qu’on aurait dû faire en 30, 35 ans » affirme le sénateur de Seine-Saint-Denis Adel Ziane

Une croisière sur le canal Saint-Denis, des visites des sites olympiques de Paris 2024… Et si les Jeux avaient transformé l’image de la Seine-Saint-Denis au point de rendre ce département plus touristique ? Un an après les JOP, quel est le résultat ? La Seine-Saint Denis a-t-elle changé de visage ? Oui, déclare le sénateur du département Adel Ziane, dans l’émission Dialogue Citoyen, présentée par Quentin Calmet.

Le

Veolia Suez : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle et un projet industriel, on ne peut pas avancer » affirme Philippe Varin
3min

Politique

« C'est 50.000 euros de manque à gagner » : un an après les Jeux, ce para-sportif dénonce le départ de ses sponsors

Un an après, quel est l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques ? Inclusion, transports, infrastructures, sponsors… pour Sofyane Mehiaoui, joueur de basket fauteuil qui a représenté la France, si l’accès à la nouvelle Adidas Arena porte de Clignancourt à Paris est un vrai bénéfice, le départ de ses sponsors révèle le manque d’engagement durable des marques auprès de parasportifs. Il témoigne dans l'émission Dialogue Citoyen, présenté par Quentin Calmet.

Le

Veolia Suez : « Tant qu’on n’a pas reçu une offre formelle et un projet industriel, on ne peut pas avancer » affirme Philippe Varin
6min

Politique

Agences de l’État, qui veut gagner des milliards ? 

La ministre des Comptes publics propose de supprimer un tiers des agences de l'État pour faire deux à trois milliards d’économies. Seulement, pour en rayer de la liste, encore faudrait-il savoir combien il en existe…Une commission d'enquête sur les missions des agences de l’État s’est plongée dans cette grande nébuleuse administrative. ARS, France Travail, OFB, CNRS, ADEME, ANCT, des agences, il y en a pour tous et partout ! Mais “faire du ménage” dans ce paysage bureaucratique touffu rapportera-t-il vraiment les milliards annoncés par le gouvernement et tant espérés par la droite ? Immersion dans les coulisses de nos politiques publiques…

Le

President Emmanuel Macron Visits the 55th Paris Air Show at Le Bourget
7min

Politique

Budget 2026 : « Emmanuel Macron a une influence, mais ce n’est pas le Président qui tient la plume »

Le chef de l’Etat reçoit lundi plusieurs ministres pour parler du budget. « Il est normal qu’il y ait un échange eu égard à l’effort de réarmement qui est nécessaire », explique l’entourage d’Emmanuel Macron. « Il laisse le gouvernement décider », souligne le macroniste François Patriat, mais le Président rappelle aussi « les principes » auxquels il tient.

Le