Villani, dissidences et départs: les turbulences des municipales chez LREM
Avec la rupture avec Cédric Villani comme point d'orgue, la campagne des municipales de mars est un moment "difficile" pour le mouvement LREM et...
Par Adrien DE CALAN
Temps de lecture :
4 min
Publié le
Avec la rupture avec Cédric Villani comme point d'orgue, la campagne des municipales de mars est un moment "difficile" pour le mouvement LREM et son groupe parlementaire, qui poursuit son érosion, même si nombre de "marcheurs" présentent le cas Villani comme une situation à part.
. Exclure Villani, et après ?
La plupart des députés ont été pris de court par l'exclusion annoncée du candidat dissident à Paris Cédric Villani, que le mouvement devrait acter mercredi soir en bureau exécutif.
Sa mise au ban, après son rendez-vous dimanche soir avec Emmanuel Macron et son ultime refus de rallier Benjamin Griveaux à Paris, "est évidemment un immense regret" car "jusqu'à présent, on avait réussi à épargner le groupe (parlementaire) du débat des municipales", reconnaît le député Roland Lescure.
Après l'exclusion du parti, il reviendra au groupe parlementaire de se prononcer sur la place de Cédric Villani en son sein.
Quid de ses alliés ? Pour la députée Paula Forteza, sa tête de liste dans le XIXe arrondissement à Paris, les dés sont jetés, puisqu'elle a claqué la porte en fustigeant un mouvement "verrouillé" qui suit "une dynamique d'exclusion".
Meeting de Benjamin Griveaux le 27 janvier 2020 à Paris
AFP
Et le vice-président de l'Assemblée Hugues Renson ou la députée Anne-Christine Lang? "On n'a jamais intérêt à beaucoup exclure, mais plutôt à organiser le rassemblement", souligne leur collègue Guillaume Chiche.
"Il ne faudrait pas que la République en marche passe plus de temps à exclure des députés qu'à en accueillir de nouveaux", abonde un parlementaire.
A l'aile gauche de LREM, le pro-Villani Jean-François Cesarini, qui votera pour la liste EELV à Avignon, veut "qu'on nous dise où est la ligne rouge". Car "on peut se demander s'il ne va pas y avoir dix, vingt ou trente exclusions", vu les dissidences dans ces municipales.
. Vers un nouveau groupe parlementaire ?
Après le départ de Paula Forteza, le groupe LREM compte 302 membres et apparentés à l'Assemblée contre 313 en 2017 (303 et 314 en comptant le président de l'Assemblée Richard Ferrand), alors que la majorité absolue est à 289 sièges.
En outre, plusieurs députés ont quitté le mouvement tout en restant apparentés au groupe, sur fond de désaccord pour les municipales. Ainsi lundi de Frédérique Lardet, qui n'a pas été investie à Annecy et se présente face au maire sortant, l'UDI Jean-Luc Rigaut, soutenu par LREM.
La principale crainte à l'Assemblée est l'éventualité d'un départ groupé de plusieurs élus.
Jean-François Cesarini évoque régulièrement l'idée de créer un groupe supplémentaire, qui resterait dans le giron de la majorité mais aurait son identité propre.
Mais la rupture avec Cédric Villani "inquiète" davantage: "Il a une certaine aura. Le risque existe qu'il y ait une démarche transversale et plus structurée de parlementaires de sensibilités écologistes", estime un député.
"Je n'ai pas le sentiment qu'il y ait une envie au sein du groupe de marquer une défiance vis-à-vis du président de la République", nuance Bruno Questel (Eure) qui ne croit pas du tout à une "scission".
. Macron embarrassé ?
Emmanuel Macron s'est tenu publiquement à distance des municipales et a évité tout événement pouvant s'apparenter à la campagne pour le scrutin. La réception de Cédric Villani dimanche fait figure d'exception et a été médiatisée par le candidat, pas par l'Elysée.
Son tête-à-tête avec le mathématicien a agacé certains "marcheurs". "Je me demande encore qui le lui a conseillé. Ca n'a aucun sens. On ne parle que de Cédric Villani alors que Benjamin Griveaux faisait des propositions en même temps", déplore un député.
"Pas dans une position +autoritaire+", Emmanuel Macron a simplement "le souci du rassemblement et de l'unité" pour LREM, fait valoir la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye.
Nombre d'élus jugent normal qu'il y ait "tensions" ou "soubresauts" autour de ce premier scrutin municipal pour un jeune mouvement sans ancrage local comme LREM.
Emmanuel Macron "n'a jamais été élu local, ni chef de parti. Il n'a pas l'expérience politique de ces élections", témoigne un fidèle du chef de l'Etat, soulignant qu'"il ne dépend pas d'un réseau d'élus, comme Hollande ou Sarkozy avant lui".
Le ministre de l’Intérieur est officiellement candidat à la présidence des LR. Il peut compter sur « une très large adhésion majoritaire du groupe LR », selon le sénateur Marc-Philippe Daubresse. Mais les soutiens de Laurent Wauquiez, comme le sénateur Laurent Duplomb, l’accusent de relancer une « dramatique guerre des chefs ». L’enjeu pour Bruno Retailleau est maintenant d’obtenir un congrès au plus vite, car « les sondages, ça va, ça vient »…
Le sénateur socialiste des Landes met en cause le manque d’expertise de l’ancien président de la République sur le terrain du droit. « Emmanuel Macron est spécialiste des erreurs institutionnelles », ajoute-t-il.
Alors que Bruno Retailleau vient de déclarer sa candidature à la présidence des Républicains, les regards se tournent vers 2027. « Toutes les ambitions sont légitimes », observe le président du groupe Renaissance au Sénat. Mais pour François Patriat, seule une candidature unie de la droite et des macronistes permettra de l’emporter.
Dans un courrier adressé aux militants Les Républicains, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau indique qu’il briguera la présidence de son parti. Alors que l’ancien sénateur a le vent en poupe dans les enquêtes d’opinion depuis sa nomination au gouvernement, cette annonce pourrait contrarier les ambitions présidentielles de Laurent Wauquiez, le patron des députés de la Droite républicaine, qui a pris en main la refondation du parti.