Violence dans les facs: une « nouvelle génération » d’extrême droite à la manoeuvre?

Violence dans les facs: une « nouvelle génération » d’extrême droite à la manoeuvre?

Jets de fumigènes contre une faculté parisienne occupée, slogans extrémistes: la violence s'est invitée dans le mouvement de...
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Par Guillaume DECAMME

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Jets de fumigènes contre une faculté parisienne occupée, slogans extrémistes: la violence s'est invitée dans le mouvement de blocage des universités et certains y voient la marque d'une "nouvelle génération" de militants d'extrême droite prêts à en découdre avec l'ultra gauche.

"Ils nous ont balancé des fumigènes et des bouteilles. Ca a été d'une violence inouïe", s'émeut Caroline (prénom modifié), étudiante, quand elle raconte la nuit de vendredi à samedi dans la faculté parisienne de Tolbiac qu'elle occupe avec plusieurs dizaines de camarades pour protester contre la réforme de l'accès à l'université.

L'attaque n'a fait aucun blessé, mais elle rappelle d'autres agressions.

Dans la nuit du 22 au 23 mars, des hommes cagoulés et armés de bâtons ont chassé des étudiants qui occupaient un amphithéâtre de la faculté de droit de Montpellier.

Une semaine plus tôt, le lycée autogéré de Paris a été la cible de militants "se revendiquant du GUD (Groupe union défense, ndlr)" -un syndicat étudiant d'extrême droite connu pour sa violence-, "armés de barres de fer" qui ont "effectué des saluts nazis, proféré des insultes" et "agressé deux élèves", selon la direction de l'établissement.

Dans les trois cas, les étudiants agressés ont pointé du doigt des "groupuscules d'extrême droite".

De fait, après l'attaque de Tolbiac six personnes ont été arrêtées et une source policière a évoqué auprès de l'AFP leur appartenance à l'"ultra droite".

Tristan, camarade de faculté et de lutte de Caroline, a vu, lui, dans cette agression "des méthodes dignes de l'Action française ou de la Cocarde étudiante (...). En tout cas, c'était des fachos, ils gueulaient: +antifas, ah, ah, ah+".

Contactée par l'AFP, la direction nationale du mouvement royaliste nie toute implication et Maxime Duvauchelle, fondateur de la Cocarde étudiante, un syndicat étudiant souverainiste de droite, assure que les "partisans de l'occupation (de Tolbiac) n'ont pas besoin de nous pour se discréditer".

- "Guerre de territoire" -

A Montpellier, des étudiants ont dénoncé la présence de "groupuscules d'extrême droite, notamment du GUD" à la faculté de droit, mais aucune personne n'a été identifiée à ce stade parmi la dizaine d'individus cagoulés qui a fait irruption dans l'amphithéâtre. Seuls le doyen de la faculté et un professeur ont été suspendus et mis en examen.

En outre, le GUD se serait auto-dissous fin 2017 pour laisser place à un nouveau groupe, le Bastion social, sous la houlette de Steven Bissuel. Sollicité par l'AFP, ce dernier n'a pas donné suite.

Dès lors, plutôt que de groupes à l'obédience clairement identifiée, les violences seraient le fait de groupuscules très mobiles sans véritable leadership, car "dans les cadres à disposition, il n'y a guère de monde", explique à l'AFP Nicolas Lebourg, chercheur à l’Observatoire des radicalités politiques et chercheur associé au CEPEL (CNRS-Université de Montpellier).

Les dirigeants de la mouvance identitaire d'extrême droite "ont énormément travaillé à expliquer à leurs militants que la violence physique était contre-productive", dit-il.

Et pour la source policière interrogée par l'AFP, les attaques qui ont eu lieu en région parisienne entre dans le cadre plus large d'affrontements entre deux extrêmes.

"Il y a l'apparition d'une nouvelle génération dans l'ultra gauche comme dans l'ultra droite. Elle veut montrer qu'elle existe", dit cette source qui s'exprime sous le couvert de l'anonymat. "Il s'agit d'une guerre de territoire, notamment dans les facultés".

L'attaque de vendredi soir contre Tolbiac serait un acte de vendetta mené en réaction à "une attaque de l'ultra gauche sur l'ultra droite mercredi où des membres de l'ultra gauche ont été interpellés", poursuit cet interlocuteur, sans préciser les circonstances de ces interpellations.

Une violence d'extrême gauche dont la Cocarde étudiante dit avoir été victime la semaine dernière. Un de ses membres qui distribuait des tracts contre le blocage de Tolbiac a été "roué de coups à 15 contre un au sol", a expliqué le syndicat sur Twitter, photo d'un mouchoir ensanglanté à l'appui.

Preuve supplémentaire de la tension qui règne à Tolbiac: cinq cocktails Molotov ont été découverts à l'intérieur du bâtiment dimanche, provoquant l'ouverture d'une enquête.

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