Violences conjugales : « Ce n’est pas la loi qu’il faut changer, mais les mentalités »
La commission des Lois du Sénat a adopté le rapport de la sénatrice LR Marie Mercier sur la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales.

Violences conjugales : « Ce n’est pas la loi qu’il faut changer, mais les mentalités »

La commission des Lois du Sénat a adopté le rapport de la sénatrice LR Marie Mercier sur la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales.
Public Sénat

Par Sandra Cerqueira

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La proposition de loi répond au Grenelle contre les violences conjugales de novembre dernier. «  C’est la troisième, après la loi Pradié et la loi Schiappa, et peut-être celle de trop ! Il manque une vision globale qui permette une vraie politique de lutte pour éviter ces violences », regrette Marie Mercier, auteure d’un rapport sur la proposition de loi LREM votée en janvier dernier à l’Assemblée Nationale. Plusieurs mesures y figurent pour protéger les victimes, comme la suspension du droit de visite et d’hébergement d’un enfant mineur lorsqu’un parent violent est mis en examen. La possibilité également de suspendre les obligations alimentaires des ascendants et descendants de personnes condamnées.

Pas de suspension automatique des aides alimentaires

 Le Sénat a modifié le texte sur ce point en ôtant le caractère automatique, prenant l’exemple de Jacqueline Sauvage ( condamnée pour le meurtre de son mari violent) qui en cas de suspension systématique n’aurait pas pu bénéficier de l’aide de ses enfants.

Le rapport propose également d’élargir le champ d’application pour éviter que les enfants dont, par exemple, le père a tué la mère, ne soient plus contraints de subvenir aux besoins de leur père meurtrier au nom de l’obligation alimentaire. « Ces dispositions répondent à une demande forte des associations » note la commission.

Enfin, le texte prévoit la levée du secret médical lorsque la victime est en danger et qu’elle est sous l’emprise de son agresseur. « Dans ces cas-là, la victime ne peut pas se protéger à cause d’une contrainte morale exercée due à une influence abusive » précise Marie Mercier. Le rapport souligne que le dispositif proposé laisse aux professionnels de santé le soin d’apprécier, « en conscience », si le signalement est opportun, au regard de leur évaluation du danger.

Soigner les hommes violents

Selon la sénatrice,  cette loi « a le mérite  de clarifier des petites choses, de faire des ajustements »mais elle ne va pas assez loin en ce qui concerne le traitement des hommes violents. « Il faut pouvoir les écouter, les soigner. La prison n’est pas la solution » assure-t-elle. Agir plus en amont permettrait d’éviter la récidive « qui conduit parfois à la mort de la victime. »Marie Mercier déplore que cette prise en charge soit laissée de côté : « La question du suivi des hommes violents a été absente du Grenelle. C’est encore un angle mort de la réponse des pouvoirs publics et c’est çà qui doit changer »

Faire évoluer les mentalités

L’autre sujet de fond pour l’auteure du rapport, c’est l’éducation et comment faire évoluer les mentalités : « Tout est déjà dans les textes, ce n’est pas la loi qu’il faut changer mais les mentalités. »Et de citer les films pornographiques où la violence à l’égard de la femme est banalisée, « nous devons lutter contre cela en faisant de la prévention dès le plus jeune âge.»

Marie Mercier est persuadée qu’éviter les violences passe aussi par l’accompagnement des parents quand les débuts sont difficiles et ce,dès la maternité. « Les hommes violents ont souvent été cabossés pendant leur enfance. Il faut une réelle prise en charge avec les moyens qui vont avec.»La sénatrice réclame une grande politique d’éducation qui dépend de l’Éducation Nationale en lien avec le ministère de la Santé, pour que le sujet des violences conjugales «  devienne enfin une priorité politique. »  Le texte, adopté fin janvier à l’Assemblée Nationale, sera discuté en séance publique au Sénat le 9 juin prochain.

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