Violences : la réponse sécuritaire du gouvernement
Face aux dernières violences dans le cadre de la manifestation des gilets jaunes, Edouard Philippe annonce la possibilité d’interdire les manifestations sur les Champs-Elysées. Les drones et produits marquants renforceront l’attirail des forces de l’ordre. Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, joue les fusibles.

Violences : la réponse sécuritaire du gouvernement

Face aux dernières violences dans le cadre de la manifestation des gilets jaunes, Edouard Philippe annonce la possibilité d’interdire les manifestations sur les Champs-Elysées. Les drones et produits marquants renforceront l’attirail des forces de l’ordre. Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, joue les fusibles.
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Mis en cause après les nouvelles violences, samedi, lors de la dernière journée de mobilisation des gilets jaunes, le gouvernement met sur la table ses nouvelles mesures. L’exécutif a mis 48 heures pour donner ses réponses. Une première réunion de crise s’est déroulée dimanche, à Matignon, puis une autre ce lundi à l’Elysée autour d’Emmanuel Macron.

« Renforcer la fermeté »

Pour le pouvoir, il s’agit de montrer sa fermeté, alors que l’opposition de droite accuse Emmanuel Macron de laxisme. Entouré notamment de son ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, dont certains dénoncent la gestion des événements, et de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, Edouard Philippe a annoncé sa volonté de « renforcer la fermeté de notre doctrine de maintien de l’ordre ».

Il a de nouveau reconnu des « dysfonctionnements » dans la conduite des opérations. Alors que de nombreuses blessures ont été dénoncées depuis des semaines chez les manifestants, en raison de l’usage des lanceurs de balles de défense (« flashball »), Edouard Philippe a regretté la retenue des forces de l’ordre samedi :

« Les polémiques sur le LBD ont conduit à ce que des consignes inappropriées soient données pour réduire leur usage ».

Lire aussi sur le sujet notre article « LBD : pourquoi les forces de l’ordre ont rectifié le tir ? »

Les manifestations sur « les Champs-Elysées à Paris, Pey-Berland à Bordeaux et la Place du Capitole à Toulouse » pourront être interdites

Comme certains le demandaient, le premier ministre sort de son chapeau des interdictions de manifester localisées. Si rien ne change « quand une manifestation sera déclarée et pacifique », « en revanche, nous mettrons en œuvre une stratégie renforcée de lutte contre les manifestants des mouvances ultras ».

« Chaque fois qu’il le faudra, nous interdirons les manifestations se revendiquant des gilets jaunes, (…) dès lors que nous aurons connaissance de présence d’éléments ultras » annonce le premier ministre, évoquant les zones des « Champs-Elysées à Paris, de Pey-Berland à Bordeaux, de la Place du Capitole à Toulouse ». Des mesures qui seront prises « en concertation avec les maires concernés ».

« Plus grande autonomie donnée aux forces de l’ordre »

Pour une plus grande « efficacité », il demande que « le maintien de l’ordre soit réorganisé, en donnant une plus grande autonomie aux forces de l’ordre », « placées sous un commandement unifié et dotées de larges capacités d’initiatives ». Les détachements d’action rapide vont être transformés en « unités anticasseurs ». Des moyens nouveaux seront mis à disposition : « Les drones, les produits marquants, l’utilisation des moyens vidéos à des fins de manœuvre et judiciarisation ».

Demandé déjà après les dégradations de l’Arc de Triomphe, l’exécutif a décidé du limogeage du préfet de police de Paris, Michel Delpuech. Il est remplacé par Didier Lallement, ancien secrétaire général du ministère de l’Intérieur et ancien préfet de la région Aquitaine.

Les mesures du texte anticasseurs « mises en œuvre dès l’entrée en vigueur de la loi »

Sur le plan législatif, il était difficile pour le gouvernement de faire dans la surenchère. Et pour cause : une loi anticasseurs vient d’être adoptée par le Parlement. Initié à l’origine par le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau, le texte a été repris par l’exécutif. « J’ai demandé à ce qu’elle soit immédiatement mise en œuvre dès l’entrée en vigueur de la loi » a expliqué Edouard Philippe. Elle doit encore passer par le filtre du Conseil constitutionnel, saisi par Emmanuel Macron lui-même.  Le chef de l’Etat s’est retrouvé sur le sujet pris en étau entre une partie de sa majorité, qui s’est abstenue face à un texte jugé trop sécuritaire ses yeux, et la droite qui dénonce son « laxisme ».

La loi anticasseurs doit notamment permettre de renforcer les contrôles aux abords des manifestations, de prononcer des interdictions administratives de manifester « pour les éléments les plus violents » – point le plus polémique du texte – et de poursuivre les personnes qui dissimulent leur visage pour manifester. Une disposition qui vise les black blocs.

Les « personnalités (qui) ont encouragé et légitimé les violences et continuent à le faire sans vergogne » pourront être mises en causes

« Je ne confonds pas les casseurs et la très grande majorité des gilets jaunes » a assuré Edouard Philippe. Mais le gouvernement entend mettre en cause ceux qui encourageront « sur les réseaux sociaux » à participer aux manifestations interdites. Ils se « rendent complices » et « devront prendre leurs responsabilités » prévient le locataire de Matignon. Face aux « personnalités (qui) ont encouragé et légitimé les violences et continuent à le faire sans vergogne », Edouard Philippe demande « au ministre de l’Intérieur de saisir systématiquement la justice à leur encontre » via l’article 40 du code de procédure pénale. Quant aux commerces qui subissent les dégradations, le plan de soutien va être « renforcé ».

Si l’exécutif décide aujourd’hui de faire tomber l’homme à la tête de la préfecture de police de Paris, certains posent la question des responsabilités politiques. Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, et celui de l’Economie, Bruno Le Maire, sont auditionnés ce mardi par le Sénat. Le premier sera, à n’en pas douter, mis sur le grill par les sénateurs.

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