Manuel Bompard, Marine Tondelier, Bruno Retailleau, Gabriel Attal, Fabien Roussel et Jordan Bardella lors de La REF 2025 (Rencontre des Entrepreneurs de France) organise par le MEDEF les 27 et 28 aout 2025 a Roland-Garros.
Vote de confiance : réunis par le Medef, les oppositions ont déjà tourné la page Bayrou
Le Premier ministre a plaidé sa cause lors des universités d’été du Medef, ce vendredi 28 août, quelques heures avant un débat réunissant plusieurs de ses principaux opposants. Sourds aux appels à négocier, la gauche et le Rassemblement national esquissent leurs propres pistes de sortie de crise.
« Je suis certain que tout peut bouger dans les onze jours qui viennent, à condition qu’on s’engage, à condition qu’on n’ait peur de rien. » Après la CFDT mardi, c’est devant le Medef, ce vendredi 28 août, que le Premier ministre François Bayrou est venu défendre la survie de son gouvernement. À l’occasion des universités de rentrée de l’organisation patronale, il a repris dans un long discours, devant un parterre de chefs d’entreprise rassemblés à l’intérieur du court central de Roland-Garros, l’essentiel de l’argumentaire déroulé depuis lundi, lorsqu’il a annoncé vouloir demander le 8 septembre un vote de confiance à l’Assemblée nationale.
« Une politique nécessaire, urgente, ne peut pas se mettre en place si les Français n’en partagent pas la nécessité », a expliqué François Bayrou qui espère pouvoir faire passer un budget à 43,8 milliards d’euros d’économies, et dont les premières orientations ont soulevé de vives critiques du côté des oppositions. Modulant ses propos en fonction de son auditoire, le locataire de Matignon a pris soin, toutefois, d’insister sur la nécessité de préserver l’investissement. « Nous devons considérer l’investissement productif comme un trésor national. Tout ce qui amoindrit le redressement productif détourne notre pays, tout ce qui pousserait au déplacement des investisseurs nous devons le considérer comme un risque. »
Mais par moments, la prise de parole a aussi pris des accents de discours d’adieu, notamment lorsqu’il a salué le travail réalisé avec Patrick Martin, le président du Medef. Ou encore lorsque François Bayrou a évoqué le conclave des retraites, « où nous avons été si près d’aboutir ».
« Il n’y a pas de doute pour nous, il va tomber »
Ces dernières heures, le Palois a braqué les leaders des principaux partis d’opposition – qui à ce stade se sont tous prononcés contre la confiance – après avoir expliqué qu’il n’avait pas pu les contacter cet été, car ceux-ci étaient « en vacances ». « Il n’y a aucune polémique sur le fait que tout le monde a le droit d’être en vacances », a-t-il tenté de déminer en marge de sa visite. Le chef du gouvernement va devoir redoubler de diplomatie s’il ne veut pas voir tomber à l’eau le cycle de consultations qu’il espère lancer à partir de lundi avec ceux qui détiennent les clefs de son avenir à Matignon.
« Lundi, je pense que nous aurons des activités plus importantes à faire », a ironisé Marine Tondelier devant des journalistes à son arrivée en milieu d’après-midi à Roland-Garros. Outre la secrétaire nationale des écologistes, quatre autres chefs de partis ont été conviés par le Medef pour participer à une table ronde sur la place de la France dans le monde : Bruno Retailleau (LR), Gabriel Attal (Renaissance), Manuel Bompard (LFI) et Fabien Roussel (PCF). Un échange qui a pris des allures de débat électoral, à l’orée d’une potentielle nouvelle crise politique.
Si les écologistes ont fait savoir qu’ils ne donneraient pas suite au rendez-vous du Premier ministre, les communistes s’interrogent encore. Désormais, les oppositions veulent se projeter vers « l’après », et agissent comme si la page François Bayrou était déjà tournée. « Il n’y a pas de doute pour nous, il va tomber », assure Marine Tondelier. « On présentera notre plan de sortie de crise d’ici le 8 ». Elle ajoute : « Un Premier ministre de droite, ça n’a pas marché, un Premier ministre MoDem, ça n’a pas marché. Et si on essayait quelqu’un qui a gagné les législatives anticipées ? »
Jordan Bardella, le président du Rassemblement national, assure qu’il répondra à l’invitation du Premier ministre aux côtés de Marine Le Pen, mais seulement par courtoisie républicaine. Quoi qu’il arrive, le RN votera contre la confiance : « Je ne crois pas au Père Noël. À moins d’un miracle, rien ne nous fera changer d’avis », explique l’eurodéputé, qui qualifie la manœuvre du Premier ministre de « suicide politique ». Le RN estime qu’une sortie de crise passera « par un retour aux urnes », qu’il s’agisse d’une nouvelle dissolution ou d’une démission du chef de l’Etat. « Ce n’est pas l’Assemblée nationale qui est illégitime, c’est ce gouvernement », nuance Marine Tondelier.
Bruno Retailleau cultive sa différence
À leur arrivée à Roland Garros, les deux représentants du bloc gouvernemental, Gabriel Attal et Bruno Retailleau, ont préféré éviter d’affronter les questions des journalistes. L’exercice est périlleux pour ces deux responsables politiques, que l’on dit tiraillés par des ambitions présidentielles : défendre le Premier ministre qu’ils ont soutenu, tout en évitant d’être emporté avec lui.
Dès l’ouverture des débats, le ministre de l’Intérieur a tenu à rappeler le rôle singulier de sa famille politique depuis septembre 2024 : « J’ai toujours été un opposant à Emmanuel Macron, je me suis engagé dans un gouvernement pour éviter le pire ». S’il appelle à ne pas transformer le vote du 8 septembre en « référendum pour ou contre François Bayrou », il estime « qu’il faudra changer de pied » sur les questions économiques. « Mais ça, ce sera en 2027 », glisse le Vendéen, qui partage le diagnostic posé par le chef du gouvernement mais se montre beaucoup plus critique vis-à-vis du plan d’économie proposé.
Des cinq chefs de partis réunis par le Medef ce jeudi soir, Bruno Retailleau a été le plus applaudi, notamment lorsqu’il a fustigé « le système social étatiste ». Paraphrasant Ronald Reagan, le patron des LR a soulevé l’ovation des chefs d’entreprise : « Tout ce qui bouge on le taxe, ce qui bouge encore on le réglemente, et ce qui ne bouge plus on le subventionne ! »
« Pour empêcher le chaos, il faut empêcher Monsieur Bayrou de présenter son budget »
Dans son couloir, Manuel Bompard, le coordinateur de La France insoumise, a appelé à en finir avec la politique de l’offre « qui nous amène dans un mur », misant plutôt sur « une relance sociale ». Face à ceux qui accusent le mouvement de Jean-Luc Mélenchon d’alimenter la crise économique en jouant la carte de la déstabilisation politique, le député des Bouches-du-Rhône retourne l’argument : « Notre responsabilité c’est d’empêcher le chaos, et pour empêcher le chaos, il faut empêcher Monsieur Bayrou de présenter son budget. »
Un grand absent sur la scène : le socialiste Olivier Faure, retenu à Blois pour le lancement des universités d’été du PS, où il doit présenter samedi le contre-budget imaginé par son parti. Une base de négociation pour François Bayrou ? Rien n’est moins sûr, tant le parti à la rose, qui a évité au Premier ministre une censure en début d’année, est désormais remonté contre sa politique.
François Bayrou a pris de court la classe politique en annonçant, lundi 25 août, qu’il engagerait la responsabilité de son gouvernement devant l’Assemblée nationale le 8 septembre prochain. En quête d’une « clarification », le premier ministre espère rallier une majorité autour de sa trajectoire budgétaire, qu’il présente comme décisive pour l’avenir économique du pays. Mais le rapport de force parlementaire laisse présager une issue défavorable.
Après l’annonce du vote de confiance à l’Assemblée le 8 septembre, Marine Le Pen a émis le souhait d’une nouvelle dissolution. Une demande qui, à première vue, interpelle de la part de la patronne des députés RN, frappée d’une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire. Pourquoi Marine Le Pen pense-t-elle pouvoir se représenter ? Explications.
A peine lancée, l’invitation de François Bayrou aux chefs de partis pour tenter de trouver des points d’accord sur le budget, lui assurant sa survie à Matignon avant le vote de confiance, a déjà du plomb dans l’aile. Le RN ira mais ne bouge pas. Le PS, qui fera des propositions ce week-end, réserve encore sa réponse. Les Ecologistes ne se déplaceront pas. Un trou de souris qui semble se refermer, comme un piège.
Le mouvement fondé par Jean-Luc Mélenchon s’investit nationalement pour les élections municipales en pensant aux élections sénatoriales qui ont lieu six mois après.