Vous pouvez “reprendre une activité normale”: les Guignols s’arrêtent sur Canal+

Vous pouvez “reprendre une activité normale”: les Guignols s’arrêtent sur Canal+

"Vous pouvez éteindre la télévision et reprendre une activité normale": la voix impertinente des "Guignols", émission...
Public Sénat

Par Taimaz SZIRNIKS

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

"Vous pouvez éteindre la télévision et reprendre une activité normale": la voix impertinente des "Guignols", émission emblématique de la grande époque de Canal+ qui déplaisait à son nouveau propriétaire Vincent Bolloré, se taira définitivement à la rentrée.

Après près de trente ans sur la chaîne cryptée, leur fin a été scellée vendredi lors d'un comité d'entreprise, a indiqué la chaîne vendredi à l'AFP, confirmant une information du site Les Jours.

Cette parodie grinçante de journal télévisé créée en août 1988, qui attirait dans ses grandes années jusqu'à trois millions de téléspectateurs, était en sursis depuis l'arrivée de Vincent Bolloré à la tête de Canal+ en 2015. Ce dernier avait reproché à la chaîne un abus "de dérision" et une tendance à se "moquer des autres".

- Un arrêt "inéluctable"-

"On s'en doutait, il y avait des bruits, des démissions" a indiqué vendredi à l'AFP Yves Lecoq, l'un des imitateurs historiques de l'émission (avec les voix du présentateur Patrick Poivre d'Arvor, dit PPD ou Jacques Chirac). "J'ai des rendez-vous la semaine prochaine pour des enregistrements des Guignols. J'attends que l'on me dise ce qui va se passer", a-t-il ajouté, précisant qu'il n'avait pas été informé par la chaîne.

"Ca me rend triste. On connaissait l'issue, inéluctable", a déclaré à l'AFP Yves le Rolland, le "chef d'orchestre" des Guignols pendant 21 ans. "Mais c'est comme lorsque vous êtes au chevet de quelqu'un de très malade: c'est horrible, vous ne savez pas si c'est un soulagement, une délivrance".

De nombreux fans partageaient vendredi leur déception sur les réseaux sociaux, les Guignols devenant le sujet le plus commenté sur Twitter en début d'après-midi.

Souvent tournée en ridicule dans l'émission, l'eurodéputée LR Nadine Morano s'est au contraire réjouie de son arrêt définitif: "Bien fait! Pas d’enterrement, crémation directe. Ni couronne ni fleur mais une plaque +bêtes et méchants+".

En 2015, Les Guignols n'avaient dû leur survie qu'à une forte mobilisation du public. Le président François Hollande lui-même avait pris position en estimant que "la caricature fait partie du patrimoine" français, rejoint par Manuel Valls ou encore Alain Juppé.

L'émission était revenue fin 2015 dans une nouvelle version diffusée en crypté, plus lisse, avec de nouveaux auteurs et sans PPD à la présentation. Les audiences en chute libre n'avaient pas été sauvées par une nouvelle diffusion en clair à partir de 2016.

-Voilà, sans transition-

Longtemps présentée en direct juste avant le JT de 20H des autres chaînes, copiée dans le monde entier, l'émission a marqué le langage courant avec de nombreuses répliques: l'"A tchao bonsoir" et le "Voilà, sans transition" de PPD, le "Mais euuuuh" de François Bayrou ou le "Je peux dire une connerie?" du gardien de but Fabien Barthez.

En 1988, Alain de Greef, directeur des programmes de Canal+, cherchait à remplacer le JT des "Nuls" avec une contre-programmation du JT, d'abord baptisée "Les arènes de l'info".

En 1990, l'émission est rebaptisée "Les Guignols de l'info" et s'impose à l'occasion de la guerre du Golfe. "Il n'y avait plus qu'une émission avec un discours décalé sur la guerre: les Guignols", selon Yves le Rolland.

L'humour sans tabou de l'émission a souvent causé des scandales et des poursuites: la romancière Françoise Sagan avait notamment été la première à obtenir en justice l'arrêt d'une séquence.

Rançon du succès, l'équipe de Canal+ avait aussi été critiquée pour son influence politique. On lui avait notamment reproché d'avoir favorisé l'élection de Jacques Chirac en 1995 en présentant sa marionnette d'une façon trop sympathique.

Les Guignols étaient une des dernières émissions du Canal+ historique. "Le Grand Journal" a disparu après plusieurs remaniements, le "Zapping" a migré sur France Télévisions, et "Le Petit journal" a perdu son présentateur Yann Barthès, parti pour le groupe TF1. Enfin, mardi, Canal+ a perdu les droits de la Ligue 1 de football qu'il détenait depuis 26 ans. Seuls "Groland" et le "Journal du hard" résistent.

Dans la même thématique

Ticket-restaurant
8min

Politique

Budget : ces mesures d’aides qui passent à la trappe avec le vote de la censure

Le vote de la motion de censure n’a pas seulement fait tomber le gouvernement Barnier. Il empêche l’adoption de nombreux dispositifs, notamment toutes les mesures d’aides. Les agriculteurs et la Nouvelle Calédonie en font les frais, comme l’indexation de l’impôt sur le revenu. Il faudra attendre un nouveau budget, en début d’année, pour y remédier.

Le

Beaucaire: Jordan Bardella inaugurates Julien Sanchez s office
6min

Politique

« Il resserre les boulons » : le Parlement européen refuse de payer comme assistant parlementaire le directeur de cabinet de Jordan Bardella

Dans le contexte du procès des assistants parlementaires du FN, Jordan Bardella se voit refuser la reconduction de François Paradol, son directeur de cabinet, comme assistant parlementaire local. « Le Parlement européen est devenu plus regardant sur les activités du RN », indique Olivier Costa, spécialiste de l’Union européenne.

Le

Vous pouvez “reprendre une activité normale”: les Guignols s’arrêtent sur Canal+
3min

Politique

« Nous n’aspirons pas à figurer dans un gouvernement dont le Premier ministre serait de gauche », assure Mathieu Darnaud

Invité de la matinale de Public Sénat, Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains au Sénat, a répété ce jeudi que son parti ne participerait pas à « un gouvernement dont le Premier ministre serait de gauche et porterait le programme du Nouveau Front populaire ». Le responsable pointe « l’irresponsabilité » des forces politiques qui ont voté la censure.

Le

Vous pouvez “reprendre une activité normale”: les Guignols s’arrêtent sur Canal+
3min

Politique

Revalorisation du barème de l’impôt : « On peut imaginer plusieurs scenarii », selon Claude Raynal

Après avoir été présenté en conseil des ministres ce mercredi 11 décembre, le projet de loi spéciale sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 16 décembre et au Sénat en milieu de semaine prochaine. Cet après-midi, les ministres démissionnaires de l’Economie et du budget ont été entendus à ce sujet par les sénateurs. « La Constitution prévoit des formules pour enjamber la fin d’année », s’est réjoui le président de la commission des Finances du Palais du Luxembourg à la sortie de l’audition.

Le