Le budget de la Sécu a repris son chemin tortueux, sept semaines après avoir été l’élément déclencheur de la première censure d’un gouvernement depuis 1962. Les sénateurs ont approuvé ce 23 janvier les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui s’était tenue le 27 novembre. C’est ce texte qui avait provoqué la chute du gouvernement de Michel Barnier. L’engagement de la responsabilité du Premier ministre sur ce projet de loi avait eu pour conséquence le dépôt puis l’adoption par une majorité de députés d’une motion de censure. Le PLFSS a donc été rejeté par la même occasion.
Le vote favorable des sénateurs ce jeudi marque donc un désaccord entre les deux chambres. Rare sont les commissions mixtes paritaires sous les Ve République qui n’ont pas ensuite été approuvées par l’Assemblée nationale et le Sénat.
Une nouvelle lecture qui offre moins de marges de manœuvre
Comme nous l’expliquions il y a deux semaines, une nouvelle lecture va donc s’ouvrir, sur la base du texte adopté par le Sénat en première lecture. Les travaux devraient reprendre dès le 29 janvier à l’Assemblée nationale, nous indique-t-on au ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités. L’examen en séance pourrait avoir lieu la première semaine de février.
Quant au Sénat, le texte devrait être examiné en commission des affaires sociales le 12 février, avant de revenir dans l’hémicycle les 17 et 18 février, selon une source sénatoriale. Une dernière lecture, avec un dernier mot donné à l’Assemblée nationale, devrait logiquement être l’ultime étape.
La nouvelle lecture va cependant complexifier la marge de manœuvre des parlementaires dans la réécriture du texte. En raison de la règle de l’entonnoir, qui consiste à resserrer les modifications possibles au fur et à mesure que la navette parlementaire progresse, les parlementaires ne pourront pas introduire de nouvelles dispositions. Ils devront rester dans le cadre des dispositions initiales du texte.
Dégradation sensible des comptes sociaux
Afin de faciliter l’adoption du texte, François Bayrou a déjà consenti à retirer ou atténuer certaines mesures impopulaires. Le Premier ministre s’est engagé à ne pas dérembourser les consultations médicales et les achats de médicaments, ou à relever d’un milliard d’euros l’objectif annuel de dépenses de santé. Le gel partiel des pensions, qui était prévu dans le texte initial, fait déjà partie du passé. Au 1er janvier, l’ensemble des retraites a été revalorisé automatiquement selon le droit commun, sur l’inflation (2,2 %).
L’un des enjeux de la nouvelle lecture sera de limiter la dégradation de la trajectoire financière des comptes sociaux. Le retard pris dans la mise en œuvre des autres mesures de régulation, en l’absence de loi de financement pour 2025 mais aussi la dégradation des prévisions de croissance et donc de recettes, font creuser un peu plus le déficit. Initialement, le gouvernement Barnier s’était donné pour objectif d’un déficit à 16 milliards d’euros, après le trou de 18,5 milliards en 2024. Après la CMP, la prévision pour l’exercice 2025 s’est rapprochée dangereusement de ce niveau. Le gouvernement évoque désormais un déficit proche de 25 milliards d’euros. Voire 30 milliards, si aucune loi de financement n’était adoptée. La situation serait comparable au record enregistré durant la première année de la pandémie (près de 40 milliards d’euros).