La puff cigarette electronique jetable

Cigarettes électroniques, puffs : un rapport veut lever le voile sur ces nouveaux produits du tabac

Depuis une dizaine années, les cigarettes électroniques, « puffs », sachets de nicotine et plusieurs autres produits font de la concurrence à la cigarette classique. Pensés comme des alternatives au tabagisme, première cause de mortalité évitable en France, ces produits restent cependant hautement addictifs. Pour mieux comprendre ce phénomène sous ses nouvelles formes, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), organe parlementaire réunissant des sénateurs et des députés, a réalisé un rapport sur les risques liés aux « nouveaux produits du tabac » à l’issue duquel il propose des recommandations.
Ella Couet

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Les risques liés à la consommation de nicotine ne sont pas nouveaux : bien qu’en baisse, le nombre de décès liés au tabac s’élevait à 75 000 en 2015, soit 13% de l’ensemble des décès. Les manières de consommer, en revanche, n’ont cessé de se réinventer au cours de ces dernières années. La plus connue reste la cigarette électronique. D’après les chiffres de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, elle était utilisée quotidiennement par 5,5% des adultes et 6,2% des jeunes de 17 ans en 2022. Depuis 2021, elles existent sous deux formes : la cigarette électronique classique, rechargeable, et celle à usage unique, dite « puff ». Parmi les alternatives au tabac fumé, le rapport parlementaire indique que d’autres produits sont également consommés plus à la marge, comme le tabac chauffé, le tabac à mâcher ou à priser et les sachets de nicotine, aussi appelés « pouches », inspirés des « snus » suédois mais privés de tabac.

Des connaissances éparses sur les effets

Ce qui caractérise ces produits, au-delà de leur composition nicotinée, est leur relative nouveauté et le manque de connaissances scientifiques à leur sujet. Le rapport, qui se donne pour objectif de lever le voile sur leurs effets, se heurte au manque d’exhaustivité et de consensus parmi les sources accessibles sur le sujet. Les différentes agences publiques de santé et centres de recherche arrivent parfois à des résultats contradictoires, quand les seules études disponibles ne sont pas produites par l’industrie du tabac elle-même. Difficile donc, parfois, de savoir de quoi on parle.

Certaines conclusions font cependant consensus parmi les spécialistes. La fumée inhalée en fumant une cigarette électronique est moins nocive que celle que la fumée du tabac, mais contient malgré tout différentes substances toxiques, qui varient selon la composition du produit. En revanche, fumer de manière concomitante une cigarette électronique et des cigarettes classiques, ce qui est le cas de la moitié des vapoteurs, ne constitue pas une réduction de risques par rapport à un usage exclusif de cigarettes classiques. Dans le cas des autres techniques utilisées, les risques sanitaires sont inférieurs à ceux créés par une consommation de tabac traditionnelle, mais ils restent multiples.

Entre solution pour sortir du tabagisme…

Si elles sont adoptées en remplacement du tabac fumé, ces nouvelles façons de consommer du tabac peuvent être envisagées comme des manières de se sevrer. L’efficacité de la méthode fait débat d’un point de vue scientifique, mais certains pays comme le Royaume-Uni ont décider de miser dessus. Plutôt que d’interdire les cigarettes électroniques en raison de leurs effets nocifs sur la santé, le pays a décidé de les inclure comme un outil de son plan de sortie du tabagisme d’ici 2030, dans une perspective de réduction des risques. A l’inverse, 34 pays recensés par l’OMS ont adopté une politique prohibitionniste à l’égard des cigarettes électroniques.

En France, la cigarette électronique est largement utilisée par les fumeurs qui cherchent à arrêter de fumer, mais elle ne le permet pas toujours. D’après une récente étude de l’Inserm, les ex-fumeurs qui ont remplacé la cigarette par sa version électronique ont davantage de chances de recommencer à fumer. Le rapport se veut clair : les nouveaux produits du tabac peuvent constituer une alternative moins nocive aux cigarettes classiques, mais ils ne sont pas des traitements de sevrage au même titre que le sont les substituts nicotiniques, recommandés par la Haute Autorité de santé.

… et porte d’entrée pour les jeunes

Les utilisateurs de ces produits ne sont pas tous des ex-fumeurs. Chez les plus jeunes principalement, le rapport met en valeur des liens de corrélation entre l’utilisation de cigarettes électroniques et l’entrée dans le tabagisme par la suite. Les « puffs », cigarettes à usage unique arrivées récemment en France, sont plébiscitées chez les adolescents. En 2022, elles avaient été utilisées par 13% des adolescents de 13 à 16 ans. Dans 28% des cas, il s’agissait de la première consommation de nicotine de leur vie.

Les « goûts » des liquides utilisés dans les cigarettes électroniques font également débat, car ils permettraient de faciliter à la fois la sortie de la cigarette, grâce à leur attractivité, mais également l’entrée des plus jeunes dans la consommation de nicotine. Le rapport dénonce un ciblage spécifique des enfants et adolescents par l’industrie du tabac, avec la commercialisation de puffs aux arômes fruités et sucrés destinés à leur plaire et la conception d’emballages attractifs. De plus, l’interdiction de la vente de ces produits aux mineurs ne serait que peu respectée.

Meilleure régulation et accélération de la recherche

Face à ces débats, le rapport de l’OPECST recommande l’instauration de politiques publiques partiellement restrictives. Il préconise l’interdiction totale des puffs, qui a par ailleurs été annoncée pour « début 2024 » par le ministre de la Santé Aurélien Rousseau. Le rapport recommande également l’interdiction des arômes dits « pièges à enfants » pour les cigarettes électroniques, ainsi qu’un alourdissement des sanctions en cas de vente à des personnes mineures et une contribution financière plus élevée de la part des fabricants. Il demande une accélération de la recherche scientifique indépendante sur les nouveaux produits nicotinés, afin de permettre la création d’un cadre juridique qui rattrape l’état actuel du marché, par rapport auquel il est en retard. Enfin, il suggère la mise en place de campagnes de prévention, d’un « noci-score » et d’emballages neutres pour tous les produits de vapotage.

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