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Cinq ans après le confinement : quels sont les nouveaux virus qui nous menacent ?

Pourrait-on revivre un Covid-19 ? Cinq ans après le début du confinement, quels sont les risques épidémiologiques qui pèsent sur la France ? Si de nombreuses découvertes et pratiques médicales permettent aujourd’hui de limiter une épidémie de type Covid, de nouveaux virus apparaissent sur le territoire, portés notamment par le réchauffement climatique.
Marius Texier

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« Je ne sais pas si le Covid aura été le début d’une longue série d’épidémies. Mais ce que je sais, c’est que ce sujet n’est pas suffisamment abordé et donc n’est pas suffisamment anticipé », alertait le sénateur centriste Stéphane Demilly, en préambule d’une table ronde au Sénat, le 10 avril 2024, sur les épidémies et le changement climatique.

Est-il possible de voir resurgir en France une épidémie de type Covid-19 ? Au 8 janvier 2023, le nombre de personnes ayant été infecté par la pandémie s’élevait à plus de 650 millions dans le monde dont 38 millions en France. En plus d’avoir plongé plus de la moitié de la population mondiale dans un confinement, le virus aurait coûté la vie à plus de 15 millions de personnes jusqu’à la fin de l’année 2021 selon une estimation de l’Organisation mondiale de la santé.

Dans un avis présenté en avril 2024, le Comité de Veille et d’Anticipation des Risques sanitaires (COVARS) s’est intéressé sur le risque de voir resurgir un phénomène de type pandémie dans l’hexagone. Pour les chercheurs, les zoonoses (transmission de maladies des animaux aux humains) et les arboviroses (maladies transmises par les moustiques) se distinguent parmi les menaces les plus pressantes.

La grippe aviaire inquiète les scientifiques

Parmi les virus se transmettant de l’animal à l’humain, le cas de la grippe aviaire inquiète de nombreux chercheurs. « Il faut prendre en considération le risque pour les animaux », prévient Brigitte Autran, directrice du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires, le 13 mars, sur le plateau de Sens Public. « Nous aussi nous sommes des animaux. La grippe aviaire a déjà commencé à infecter les grands mammifères aux Etats-Unis ».

Présente dans au moins 26 pays, le virus de la grippe aviaire (H5N1) touche plus de 48 espèces de mammifères. Selon le COVARS, la maladie ne cesse de progresser ces dernières années. Transmis par les volatiles aux mammifères, le virus n’a pas encore muté pour passer facilement à l’homme. Cependant, plusieurs cas commencent à inquiéter les scientifiques. Aux Etats-Unis, en à peine six mois, 66 cas humains de grippes aviaires ont été recensés en janvier 2025. Un éleveur de volaille est mort de la maladie à 65 ans.

Ces 20 dernières années, l’OMS a enregistré 880 cas humains d’infection de la grippe aviaire. Parmi eux, 463 sont morts, soit un taux de mortalité de 52 %.

« Les facteurs de risques qui amènent à l’émergence de nouveaux virus sont de plus en plus présents comme la forte densité animale et humaine ou encore la déforestation », alerte Anne Sénéquier, chercheuse et co-directrice de l’Observatoire de la santé mondiale de l’IRIS, sur le plateau de Sens Public.

Brigitte Autran insiste sur la prise en considération de la santé animale : « La santé humaine doit être vue dans le contexte de la santé animale, explique-t-elle, nous parlons de one health (une seule santé) ».

Des cas de dengue et de chikungunya en France

Mais les scientifiques alertent aussi sur l’augmentation des risques liés au changement climatique. « Nous observons des maladies qui remontent à cause du réchauffement climatique », explique Brigitte Autran.

Les arboviroses, ces virus transmis par les moustiques, symbolisent le lien entre maladie et changement climatique. Même si leur présence est autochtone, c’est-à-dire importés sur le territoire via un autre pays, les cas de dengue et de chikungunya commencent à alerter en France. De nombreuses espèces invasives comme le moustique tigre, qui a colonisé une grande partie du territoire, facilitent la transmission de virus. Ces nouvelles espèces, arrivées en France, prolifèrent en raison du réchauffement climatique.

Lors de la table ronde au Sénat le 10 avril 2024, la professeure d’entomologie (l’étude des insectes) médicale à l’Institut Pasteur, Anne-Bella Failloux a alerté sur la nécessité de s’intéresser aux épidémies dans le monde : « La situation épidémiologique à l’extérieur de la France est extrêmement importante puisque cela va désormais conditionner les cas en France », analyse-t-elle.

Le danger du virus West-Nile

Autre virus dont la circulation est facilitée par le changement climatique : le virus West-Nile. Moins épidémique que la dengue, il peut s’avérer potentiellement grave dans 20 % des cas. « L’infection au virus West-Nile, qui est beaucoup moins connue en France est encore plus grave que la dengue », s’inquiétait Brigitte Autran. Le virus, présent sur tout le territoire chez les populations aviaires, ne cesse de progresser. Tout comme la dengue ou le chikungunya, il se transmet par les moustiques et provoque une forte fièvre et des douleurs musculaire. Si sa transmission chez l’homme reste relativement faible, les scientifiques se préoccupent de sa prolifération dans le bassin méditerranéen.

Le retour de virus millénaires

Dès lors, le changement climatique qui conduit à un réchauffement de la planète tend à devenir la menace la plus pesante sur les risques épidémiques de ces prochaines années. La fonte du permafrost, ce sol gelé en permanence, au moins pendant deux ans, pourrait bien faire ressurgir des virus inconnus ou ayant disparus depuis plusieurs années. Ce qui inquiète ? La libération de virus millénaires risque de créer des perturbations sur la biodiversité, et potentiellement sur l’homme.

Selon les scénarios optimistes, c’est 30 % du permafrost qui est amené à disparaître d’ici 2100. En 2016, un cas d’anthrax (maladie du charbon) a décimé plus de 2 300 rennes en Sibérie. La cause ? Un renne mort de la maladie s’est retrouvé exhumé du permafrost à cause de la fonte de la glace. Un petit garçon a également succombé à l’infection après avoir consommé de la viande de renne infectée.

« Ce qui nous protège des virus du permafrost, c’est qu’il n’y a personne en Sibérie. Le jour où il y aura beaucoup plus de monde, ce sera autre chose », prévient Anne Sénéquier.

Pour Brigitte Autran, il est absolument nécessaire de prendre en compte les nouvelles modalités climatiques dans la recherche. « Il faut désormais que la recherche soit faite de manière intersectorielle, entre la santé et l’environnement ».

A l’image du Covid-19 dont la propagation a été facilitée par l’interconnexion entre les Etats ainsi que par la densité humaine et animale, l’émergence de nouvelles épidémies pourrait prendre racine dans le réchauffement climatique qui s’accélère d’année en année.

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