« Ce 17 juin, je vais supprimer le numerus apertus, pour former plus de médecins », annonçait Yannick Neuder jeudi dernier sur France Inter. Le ministre de la Santé va devoir patienter quelques heures de plus pour que la proposition de loi, qu’il avait déposée lorsqu’il était député l’an dernier, passe l’étape du Sénat.
Le texte était inscrit en deuxième partie de l’ordre du jour de la séance ce mardi 17 juin, mais les débats autour de la proposition de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement, avec près de 170 amendements en débat, se sont achevés peu avant minuit. La vice-présidente de séance, en accord avec la commission des affaires sociales et le gouvernement, a reporté le texte à ce mercredi 18, après les questions au gouvernement.
Le texte vise à réformer les modalités d’admission et de places ouvertes dans les études de médecine, et vise à augmenter à terme le nombre de praticiens formés. Le Sénat devrait s’orienter vers un vote conforme, puisque la proposition n’a subi aucune retouche en commission et les quelques amendements déposés recevront un avis défavorable du rapporteur, qui souhaite « favoriser son entrée en vigueur rapide ».
Les ARS pourront appeler les universités à augmenter leurs capacités d’accueil
La proposition veut mettre fin au numerus apertus, le système actuel d’entrée dans les études de médecine. Ce système avait lui-même pris le relais du célèbre numerus clausus, qui limitait strictement chaque année au niveau national le nombre de places disponible en deuxième année pour les études médicales, depuis les années 70.
Ce numerus clausus avait été supprimé par la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé de 2019, au profit d’un numerus apertus, un système plus flexible correspondant aux capacités d’accueil fixées par les universités elles-mêmes, en concertation avec les agences régionales de santé (ARS), et sur la base d’objectifs pluriannuels. Ce système a permis d’augmenter le nombre d’étudiants en médecine de deuxième année de 18 %.
Ce système est encore jugé « trop restrictif » par le ministre de la Santé. Le texte voté cette nuit va permettre aux ARS et aux conseils territoriaux de santé (CTS) d’appeler une université à accroître ses capacités d’accueil, si celles-ci ne correspondent pas aux objectifs pluriannuels qu’elle a arrêtés. Un décret doit préciser les modalités. Toujours selon les termes de la loi, ces objectifs devront « garantir la répartition optimale des futurs professionnels sur le territoire ».
L’Association nationale des étudiants en médecine (ANEMF) s’inquiète toutefois que les objectifs pluriannuels dépendent à l’avenir des « besoins de santé du territoire puis, à titre subsidiaire, des capacités de formation », comme le prévoit le texte. Elle redoute que les universités, « sous-financées », en soient réduites à « rogner sur la qualité de la formation ». D’autres acteurs, comme le syndicat Jeunes Médecins, pointent également le risque d’un manque de places pour les stages.
Lutter contre « la fuite des cerveaux à l’étranger »
L’un des leviers d’action du texte pour augmenter le nombre de médecins consiste aussi à récupérer les étudiants partis à l’étranger pour leur cursus. L’auteur du texte parle de « stopper l’hémorragie » des étudiants qui quittent la France pour embrasser des études de médecine en Belgique, en Espagne ou encore en Roumanie. Cette expatriation s’explique par la plus forte sélectivité du premier cycle des études de médecine en France par rapport à ces pays. Selon la Cour des comptes, 1 600 étudiants quitteraient le pays sur cette motivation chaque année.
Le texte propose que les étudiants français inscrits actuellement en études de médecine à l’étranger puissent être réintégrés, dans des modalités à définir par décret, au cursus français.
Un dernier point vise à consolider le dispositif des passerelles, qui consiste à permettre la reconversion de professionnels paramédicaux (infirmiers, les aides-soignants ou encore les kinésithérapeutes) dans des études de médecine. Actuellement, ils ne représentent que 5 % du total des admis en médecine.