Hausse des franchises médicales : le décret est prêt, le gouvernement attend la fin des débats au Parlement avant une éventuelle signature

Les sénateurs n’ont pas voulu réintroduire, dans le budget de la Sécurité sociale, l’extension du champ des franchises et participations forfaitaires à de nouvelles dépenses de santé. Concernant la hausse des franchises existantes, qui relève du pouvoir réglementaire, le gouvernement agira en fonction du déficit de la Sécurité sociale à l’issue des débats parlementaires.
Guillaume Jacquot

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Comme à l’Assemblée nationale, les débats ont été vifs au Sénat dans la nuit du 22 au 23 novembre sur le sujet des franchises et des participations forfaitaires, c’est-à-dire la part laissée aux patients sur les consultations médicales ou les achats de médicaments.

Le gouvernement a tenté en vain de réintroduire l’article 18, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. Supprimé par les députés à une très large majorité, il proposait d’étendre le champ de ces franchises, ou « forfaits de responsabilisation », selon le terme employé désormais par le gouvernement. Il était question d’y soumettre également les consultations chez les chirurgiens-dentistes, d’étendre la franchise annuelle aux dispositifs médicaux (comme les pansements ou les prothèses), et de créer un nouveau plafond spécifique aux transports sanitaires. Une mesure permettant à la Sécurité sociale d’économiser 600 millions d’euros à partir de 2027.

A l’instar de la commission des affaires sociales la semaine dernière, l’hémicycle n’a pas souhaité restaurer cet article. D’autant que le gouvernement a pour projet d’agir en parallèle, par voie réglementaire, pour doubler les montants de ces participations forfaitaires (ainsi que les plafonds au-delà desquels elles ne sont plus exigibles), pour la deuxième fois en l’espace de deux ans. La franchise sur les boîtes de médicament, par exemple, pourrait donc passer à deux euros.

« On verra à la fin des débats »

« Je crois que cela fait beaucoup, les conséquences seront sensibles pour les assurés », a déclaré la rapporteure Corinne Imbert (apparentée LR). « Ces franchises avaient été instaurées comme un outil, si je peux m’exprimer ainsi, de responsabilisation du patient. Or, là, ça devient quand même un outil de rendement ! » Ces différents relèvements devraient se manifester par un surcoût de 42 euros par patient chaque année, et jusqu’à 75 euros pour ceux en situation d’affection de longue durée (ALD). A l’échelle de l’Assurance maladie, l’économie pourrait atteindre 2,3 milliards d’euros.

Aux sénateurs qui lui reprochaient de revenir à la charge, la ministre de la Santé a répondu que l’amendement de rétablissement avait été déposé dans un souci de « transparence » et « pour avoir le débat ». Stéphanie Rist a une nouvelle fois rappelé que le reste à charge des patients restait parmi les plus faibles des pays de l’OCDE, et que 18 millions de Français (mineurs, femmes enceintes, bénéficiaires de la contribution santé solidaire, bénéficiaires des minima sociaux), n’étaient pas concernés par ces franchises.

Même si la hausse des franchises existantes relève du pouvoir réglementaire, et non d’un texte législatif, la ministre a souligné que rien n’était encore joué. « Le décret est prêt, il est écrit. Il n’est pas signé. Je dis depuis le début, à l’Assemblée nationale et au Sénat, que ce décret sera pas signé pendant nos débats. On verra à la fin des débats ce qu’il en est, et si ce dernier doit être signé, en fonction du déficit à l’arrivée. »

« Disons clairement les choses. C’est une réduction du périmètre de remboursement »

Les interventions ont été nombreuses à gauche pour dénoncer les intentions du gouvernement. Beaucoup y voient le risque d’une disposition qui aggravera les renoncements aux soins. « Disons clairement les choses. C’est une réduction du périmètre de remboursement pour diminuer les dépenses de la Sécurité sociale », a déploré le sénateur Bernard Jomier (groupe socialiste). Ce médecin de profession a par ailleurs souligné que beaucoup de médicaments matures allaient être déremboursés, notamment à cause des nouveaux conditionnements. Certains traitements nécessitent plusieurs boîtes, dont le volume de comprimés a été réduit.

La sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly a critiqué des mesures « profondément injustes ». Et l’écologiste Ronan Dantec s’est interrogé sur la stratégie menée par le gouvernement, pour pouvoir aboutir sur les textes financiers en fin d’année. « C’est vous-même qui revenez sur les arbitrages de l’Assemblée nationale, au moment où il semblait quand même qu’on voulait arriver à un accord à la fin ! »

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