Le Sénat s’oriente vers un rejet d’emblée du projet de loi de financement de la Sécu : « on a perdu la bataille de la lutte contre la dette »
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Le Sénat s’oriente vers un rejet d’emblée du projet de loi de financement de la Sécu : « On a perdu la bataille de la lutte contre la dette »

Opposée aux modifications des députés, la majorité sénatoriale plaidera en séance pour l’adoption d’une motion entraînant le rejet rapide du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Ce qui ouvra le champ à une dernière lecture à l’Assemblée nationale, dans les meilleurs délais.
Guillaume Jacquot

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Le Sénat prendra acte sans tarder de ses désaccords insurmontables avec l’Assemblée nationale ce vendredi matin, en nouvelle lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Réunie ce 10 décembre, la commission des affaires sociales, dominée par la droite et le centre, s’est accordée pour déposer une motion tendant à opposer la question préalable, en ouverture des débats. Son adoption entraînera donc le rejet du texte à l’issue de l’expression des différents groupes politiques.

Un débat s’était ouvert sur l’opportunité d’examiner à nouveau le texte, pour arracher de nouvelles modifications. Ce n’est finalement pas l’option qui a été retenue. « On considère que si le compromis a été trouvé à l’Assemblée nationale, on ne va pas faire d’obstruction, et on votera donc une question préalable. Il y a trop de divergences », déclare ce mercredi Élisabeth Doineau (Union centriste), rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le texte sera donc soumis plus tard pour un dernier mot à l’Assemblée nationale. La date de cette dernière lecture n’est pas encore connue.

Une copie qui ne correspond « pas du tout à la proposition du Sénat »

La veille, le projet de loi avait été adopté à l’Assemblée nationale au terme d’un long suspens, par 247 voix contre 234 (et 93 abstentions). Par rapport à la copie sénatoriale, le texte a restauré la suspension de la réforme des retraites, et n’intègre plus le gel des pensions de retraite et des minima sociaux. Autres concessions importantes accordées à la gauche : le projet embarque à nouveau une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) sur certains produits d’épargne, et un relèvement à 3 % au lieu de 2 % de l’objectif des dépenses d’Assurance maladie (Ondam).

« On est sur un certain nombre d’éléments qui ne correspondent pas du tout à la proposition du Sénat. On était plutôt sur la régulation des dépenses, plus importante que le recours à des nouvelles recettes », observe Élisabeth Doineau. « Ce n’est pas le choix qui a été fait. On a complètement perdu l’idée de baisser le déficit. On a perdu la bataille de la lutte contre la dette, alors qu’on est toujours en procédure de déficit excessif », ajoute la sénatrice de la Mayenne.

« On va dans le mur et on met le pied sur l’accélérateur ! »

Le texte est ressorti du Palais Bourbon avec un déficit estimé à 19,4 milliards d’euros pour 2026, contre 17,5 milliards d’euros dans le projet de loi initial. Or, la commission des affaires sociales du Sénat rappelle que ce déficit contenu sous la barre des 20 milliards d’euros est rendu possible grâce au transfert à hauteur de 4,5 milliards d’euros de ressources de l’État, la compensation de la réforme des allègements généraux de cotisations qui devait revenir à la Sécu.

Le problème est simplement déplacé. « Tout est une question de présentation. Le déficit est plutôt autour de 24 milliards d’euros », rétorque Élisabeth Doineau, soit un niveau supérieur à celui de 2025. « Ce qu’il faudra regarder, c’est le déficit global État et Sécurité sociale. Et on verra effectivement qu’on va dans le mur et qu’on met le pied sur l’accélérateur. On obère l’avenir des générations futures », condamne la parlementaire. Si le texte sénatorial avait bénéficié du même transfert, le déficit affiché aurait été de 14,6 milliards d’euros.

La droite a également eu des mots durs à l’égard du projet de loi amendé par l’Assemblée nationale. Le président des Républicains Bruno Retailleau a dénoncé « un budget qui n’est pas bon pour la France ».

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