Prix des médicaments et des consultations, arrêts de travail : le gouvernement présente son plan pour éviter un dérapage des dépenses de santé en 2025

La ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, accompagnée de sa collègue des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a présenté au Sénat ce 25 juillet ses mesures d’urgence, pour tenir les objectifs de dépenses de santé. La semaine dernière, un comité de l’Assurance maladie avait formellement lancé l’alerte.
Guillaume Jacquot

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Quatre mois après son adoption, les montants inscrits en financement de la Sécurité sociale pour 2025 sont déjà menacés, ce qui nécessite des mesures d’urgence de la part du gouvernement. C’est le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie qui a officiellement tiré le signal d’alarme le 18 juin. Ses membres estiment qu’il existe un « risque sérieux » que l’objectif de dépenses d’assurance maladie (Ondam), fixé à 265,9 milliards d’euros en février, soit dépassé de 1,3 milliard d’euros, c’est-à-dire 0,5 %.

Un seuil qui conduit l’exécutif et l’Assurance maladie à devoir prendre des mesures de correction et de contrôle pour tenir l’objectif sur lequel s’est prononcé le Parlement. La ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, aux côtés de la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, en a détaillé le contenu ce 25 juin, devant la commission des affaires sociales du Sénat. « Il ne s’agit pas d’un dérapage incontrôlé, mais de dynamiques spécifiques, bien identifiées, auxquelles nous devons continuer de répondre », a-t-elle tenu à préciser en préambule.

1,7 milliard d’euros d’économies au global

La bonne tenue des comptes sociaux est en effet un élément incontournable pour que le gouvernement puisse tenir la cible d’un déficit public à 5,4 % cette année. Pour Amélie de Montchalin, le respect de la loi de financement est « essentiel », d’autant que le gouvernement a revu sa prévision de croissance à la baisse à deux reprises.

Les causes de l’écart sont portées par plusieurs éléments, notamment les médicaments, les dépenses des établissements de santé, de la médecine de ville et « une hausse marquée des arrêts maladie » de 6,7 % sur les quatre premiers mois de l’année par rapport à la même période en 2024, selon Catherine Vautrin.

Le volume des différentes mesures proposées par le gouvernement se chiffre à 1,7 milliard d’euros, un chiffre supérieur au dépassement anticipé par la Sécu, mais qui aurait le mérite de compenser un dépassement plus élevé. Ce choix permettra de ne pas aller au déficit de 22,1 milliards d’euros, prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale, a souligné Amélie de Montchalin. Dès le début de l’année, le gouvernement a identifié des risques, en décidant de placer 1,1 milliard d’euros en réserve, sur le champ des dépenses de santé.

500 millions d’euros d’économies sur le médicament

Catherine Vautrin a notamment annoncé 500 millions d’euros sur le médicament, bien que le gouvernement et les représentants du secteur réunis dans le Leem (Les Entreprises du médicament) n’ont pas réussi à signer d’accord sur les prix. « Nous allons mettre en œuvre sans délai ces économies », a prévenu la ministre.

Le ministère, avec la Caisse nationale d’Assurance maladie, veut aussi décaler au 1er janvier 2026 les revalorisations tarifaires qui étaient prévues au 1er juillet pour certains professionnels, comme les kinésithérapeutes et les médecins. La rapporteure de la branche maladie, la sénatrice LR Corinne Imbert a demandé si les professions « impliquées » dans les hausses des dépenses étaient concernées ou si un large panel allait « payer pour d’autres ». « Il n’y a rien de pire qu’un sentiment d’injustice », a-t-elle émis. Catherine Vautrin a expliqué qu’une « application automatique » était préférable. « Il ne nous semblait pas crédible de commencer à discuter d’un avenant, alors même qu’on avait une alerte et une difficulté financière ».

Les arrêts maladie délivrés en téléconsultation dans le viseur du gouvernement

Le gouvernement attend également 100 millions d’euros d’économies sur les indemnités journalières, ces revenus versés aux salariés en arrêt maladie. Un renforcement des contrôles, ciblés en particulier sur les cas atypiques, et une action de sensibilisation des médecins, des entreprises comme des assurés, sont prévus.

Catherine Vautrin annonce d’ores et déjà continuer à agir sur ce terrain, à l’automne dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Depuis l’an dernier, la loi fixe des barrières aux arrêts maladie délivrés à la suite d’une téléconsultation. Ils ne peuvent plus excéder trois jours, sauf s’ils sont prescrits ou renouvelés par le médecin traitant. « Il faut peut-être se dire qu’il n’y a pas d’arrêt de travail quand il y a une téléconsultation. Je n’ai aucun problème, si on est encore là pour le PLFSS, à ce qu’on discute de ces sujets-là », a-t-elle annoncé. La ministre veut aussi s’inspirer des propositions faites par l’Assurance maladie dans son traditionnel rapport « charges et produits ».

Dernier axe, et non des moindres : le gouvernement n’entend pas lâcher dans la négociation avec les chauffeurs de taxi, sur la question des nouveaux tarifs dédiés au transport sanitaire. « Nous n’avons pas d’autre solution que cette réforme du modèle de tarification », a prévenu la ministre. Selon le ministère de la Santé, le coût des transports sanitaires a bondi de 45 % par rapport à la période précédent le Covid, pour atteindre 6,3 milliards d’euros sur un an.

« L’alerte n’a pas manqué au Sénat », note la rapporteure générale

Consciente que les décisions « ne sont pas simples », Catherine Vautrin a également voulu répondre une nouvelle fois aux députés qui dénonçaient ce matin « un coup de rabot ». « La question, c’est que le temps imparti pour répondre à ce comité d’alerte est un temps qui ne permet pas de réforme structurelle », a également fait savoir la ministre du Travail et de la Santé.

En réponse à l’exposé des ministres, qui ont appelé à garantir la soutenabilité de la protection sociale, la rapporteure générale Élisabeth Doineau a rappelé que « l’alerte n’avait pas manqué au Sénat ». Depuis plusieurs exercices, la commission des affaires sociales s’inquiète du manque de perspectives d’un retour à l’équilibre pour l’Assurance maladie et la Sécurité sociale dans son ensemble. « En termes d’anticipation, on peut faire mieux », a réagi la sénatrice de la Mayenne.

« C’est mon 20e PLFSS et depuis 2005, j’entends le même discours », a également critiqué le sénateur LR Alain Milon, longtemps président de la commission des affaires sociales. Bernard Jomier (groupe PS) a également regretté que la gauche n’ait pas été entendue sur la nécessité de renforcer les recettes. « Lors du dernier PLFSS, on a dit qu’il va manquer deux milliards d’euros dans les dépenses, c’est le chiffre que l’on avait avancé, et c’est le chiffre qui manque. »

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