Rendez-vous médicaux non honorés : le Sénat vote une « taxe lapins »

Rendez-vous médicaux non honorés : le Sénat vote une « taxe lapin »

Les sénateurs ont adopté ce 16 novembre une disposition visant à sanctionner les patients qui font faux bond dans les cabinets médicaux. « Très sensible » à cette problématique, le gouvernement veut néanmoins laisser cette question aux mains des syndicats de médecins et de l’Assurance maladie.
Guillaume Jacquot

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« C’est celui sur les lapins ? » Lorsqu’il prend le micro pour donner la position du gouvernement sur l’amendement que le Sénat s’apprête à voter, le ministre de la Santé convoque lui aussi le surnom en vogue pour désigner les Français absents des cabinets médicaux. De mois en mois, le sujet s’est imposé parmi les sujets de grogne des professionnels de santé. Dans une période où beaucoup de généralistes surchargés se voient dans l’obligation de refuser de nouveaux patients, les rendez-vous médicaux non honorés font désordre et grignotent du temps précieux.

Difficile d’évaluer avec précision le phénomène, qui s’est développé en parallèle de la montée en puissance des plateformes en ligne de demande de consultation. Selon l’Académie nationale de médecine et le Conseil national de l’ordre des médecins, il concernerait 6 à 10 % des patients qui disposent d’un rendez-vous chaque semaine. Les deux tiers d’entre eux sont des nouveaux rendez-vous. La Caisse nationale de l’assurance maladie évalue le taux d’annulation entre 3 et 4 %.

De plus en plus de parlementaires cherchent une parade pour responsabiliser les patients fantômes. Le Sénat n’en est pas à son coup d’essai, et Emmanuel Macron lui-même s’est dit favorable cette année à sanctionner les « rendez-vous lapins ». Ce 16 novembre, en première lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, le Sénat a adopté l’un des amendements importants de la commission des affaires sociales. Ce dernier vise à mettre à la charge des personnes qui n’honorent pas leur présence chez un médecin une somme forfaitaire. Le montant serait fixé par le gouvernement, dans un décret pris après consultation du Conseil d’État.

« Ce n’est pas par décret qu’on arrivera à régler ce sujet des lapins »

« Très sensible » à la question, Aurélien Rousseau, le ministre de la Santé s’est dit défavorable à la proposition sénatoriale, « non pas sur le fond » mais sur la forme. Il considère que sujet doit être renvoyé à la négociation conventionnelle entre les médecins et l’Assurance maladie. Pour rappel, c’est précisément cette demande qu’avait formulée le Sénat au début de l’année, lors de l’examen de la proposition de loi « Rist 2 » sur l’accès aux soins. L’ajout n’avait pas été retenu dans le compromis trouvé avec les députés. « Je ne crois pas que la rédaction proposée nous permettre aujourd’hui de trouver la solution, même si on travaille d’arrache-pied », a reconnu le ministre ce jeudi. « Ce n’est pas par décret qu’on arrivera à régler ce sujet des lapins ».

Les négociations autour de la nouvelle convention médicale ont repris ce 15 novembre et devraient durer jusqu’à la fin du mois de janvier.

Une voix s’est élevée en séance contre la proposition de la commission de sanctionner les « rendez-vous lapins », celle de Céline Brulin (communiste). « L’essentiel des gens qui vont sur les plateformes pour trouver un médecin, c’est précisément parce qu’ils n’en ont plus à proximité. Ils sont obligés de prendre une multitude de rendez-vous », a-t-elle expliqué.

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