20 ans après la loi handicap, la ministre salue « des avancées significatives », mais il reste des « chantiers colossaux »

Auditionnée au Sénat, la ministre déléguée au Handicap, Charlotte Parmentier-Lecocq constate que des « progrès » restent encore à faire pour satisfaire les objectifs de la loi de 2005 en matière d’accessibilité et d’inclusion. Elle annonce par ailleurs une équipe de travail pour réduire la « lourdeur administrative » dans les demandes de prestation de compensation du handicap.
Guillaume Jacquot

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L’anniversaire législatif arrive à point nommé pour la ministre, en pleine élaboration de sa feuille de route. Charlotte Parmentier-Lecocq compte bien se nourrir pour les prochains mois de l’évaluation en cours de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette loi fondatrice pour l’inclusion des personnes en situation aura très exactement 20 ans le 11 février.

Auditionnée par la commission des affaires sociales du Sénat, la ministre déléguée chargée de l’Autonomie et du Handicap dresse ce 28 janvier un bilan en demi-teinte dans l’application de la loi. « Force est de constater que cette loi a été porteuse d’une approche radicalement différente du handicap et a permis des avancées significatives. Pour autant, et encore plus dans le contexte de l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques de l’été dernier, nous devons maintenir un haut niveau d’exigence pour parvenir véritablement à une société inclusive. Je sais encore les chantiers colossaux qui sont devant moi et devant nous tous », a reconnu la ministre.

Des progrès encore « nécessaires » pour satisfaire les objectifs de la loi

S’agissant des obligations d’accessibilité pour les établissements recevant du public, les transports, les services publics ou encore les écoles, l’ancienne députée Horizons a indiqué que 900 000 sur deux millions d’établissements recevant du public étaient « aujourd’hui engagés dans une mise en accessibilité ». Ces structures avaient 10 ans pour se conformer à la loi. Il y a deux ans, le Comité européen des droits sociaux, une institution du Conseil de l’Europe, avait dénoncé le retard pris par la France en la matière.

Au niveau de l’éducation, Charlotte Parmentier-Lecocq a mis en valeur les étapes déjà accomplies, tout en soulignant que de nouveaux progrès resteraient « nécessaires ». 520 000 élèves en situation de handicap scolarisés dans les établissements classiques, et un nombre « toujours croissant d’AESH pour les accompagner ». Le projet de loi de finances – toujours suspendu à l’émergence d’un compromis au Parlement – prévoit d’ailleurs d’ouvrir 2000 postes d’accompagnants supplémentaires, pour renforcer les 78 000 actuels (équivalents temps plein).

Une « task force » contre les délais de traitement inégaux dans les demandes de prestation de compensation

« Les défis pour l’emploi restent importants », a-t-elle également ajouté. Toute entreprise de 20 salariés et plus doit employer des travailleurs en situation de handicap dans une proportion de 6 % de l’effectif total. « L’ensemble des employeurs ne sont pas au rendez-vous sur cette obligation. Nous devons collectivement être plus proactifs, plus performants, plus efficaces, et ouvrir les portes de l’entreprise aux personnes en situation de handicap », a-t-elle signifié.

Interpellée par la rapporteure LR Chantal Deseyne sur les disparités territoriales en matière de qualité d’accompagnement des personnes en situation de handicap, en particulier concernant les délais, la ministre a annoncé le lancement rapide d’une « task force » pour y remédier. Consciente de la « lourdeur administrative » des dossiers, elle a souligné la « nécessité de vraiment simplifier le dossier » de demande de la prestation de compensation du handicap, qu’il s’agisse de son contenu ou de son traitement. « Ma boussole, c’est l’efficacité pour les familles ». Les difficultés administratives sont dénoncées par les associations depuis plusieurs années.

Prise en charge à 100 % des fauteuils roulants : une application en septembre 2025

Charlotte Parmentier-Lecocq est également revenue sur une promesse importante d’Emmanuel Macron, sur le remboursement intégral des fauteuils roulants. Selon elle, le schéma de remboursement devrait aboutir « tout début février ». Comme cet automne, le gouvernement se fixe toujours comme objectif d’une mise en œuvre concrète pour les usagers en « septembre 2025 ». « Je dois avoir un tout dernier tour d’horizon sur quelques arbitrages et réglages, pour permettre d’atterrir sur cette réforme », a précisé la ministre, nommée le 27 septembre par Michel Barnier, et reconduite par François Bayrou.

Un prochain comité interministériel du handicap « permettra de garantir le suivi de l’ensemble des travaux déjà engagés et de voir comment nous pouvons aller encore plus loin, y compris d’un point de vue législatif », a-t-elle encore indiqué, promettant de tenir compte des propositions parlementaires.

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