Ce matin, la proposition de loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a été adoptée par la commission des affaires économiques du Sénat. Elle prévoit des assouplissements sur les pesticides et le stockage de l’eau, et entend calmer les tensions entre les agriculteurs et l’Office français de la biodiversité.
« 40 % des bars et restaurants » pourraient mettre la clé sous la porte, alerte Serge Babary
Par Pierre Maurer
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« Cela va être houleux ». De parole de sénateur, la nouvelle réunion déterminante pour l’avenir des restaurateurs s’annonçait sous haute tension. Usés par des semaines de fermeture, ces derniers devaient se voir annoncer – ou au moins se voir préparer - mardi après-midi au ministère de l’Economie un nouveau report de la réouverture des bars et restaurants initialement fixée le 20 janvier. Emmanuel Macron avait évoqué cette date en novembre dernier, à condition que les données sur l’épidémie le permettent. Mais le gouvernement distillait depuis quelques jours des éléments dans les médias allant dans le sens du report. Selon les confidences de sources gouvernementales recueillies par RTL, « la réouverture, ça ne sera pas le 20 janvier », peu importe que les conséquences sanitaires des fêtes de fin d’année ne soient pas encore connues. Si Bercy n’a pas souhaité commenter jusqu’ici, le ministre chargé des PME Alain Griset n’a pas caché dimanche 3 janvier sur Europe 1 un « probable » report de la date de réouverture des restaurants. Résultat, les mines sont dépitées mais un peu rassurées en quittant le bureau de Bruno Le Maire. « On oublie la réouverture le 20 janvier. C’est difficile de ne pas avoir de perspectives, mais nous avons senti un soutien très clair, très ferme de Bruno Le Maire jusqu’à ce que la situation sanitaire soit rétablie », a déclaré à la sortie de la réunion Didier Chenet, président du GNI (indépendants de l’hôtellerie-restauration). La décision doit être actée lors du nouveau conseil de défense de ce mercredi matin.
A Bercy donc, se réunissaient à 15 heures et en urgence les représentants syndicaux des bars et restaurants avec le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, et Alain Griset. Objectif du gouvernement, rassurer une profession en proie au ras-le-bol et au désespoir. Quitte à lui assurer une poursuite et un renforcement des dispositifs d’aides ? Ce devrait être le cas. Selon certains membres de la délégation, de nouvelles aides devraient apparaître, comme un nouveau prêt équivalent à 25 % du chiffre d’affaires et remboursable sur « une dizaine d’année ». Les hôteliers et restaurateurs espèrent notamment voir à nouveau élargi l’accès au Fonds de solidarité, afin qu’il puisse bénéficier davantage aux établissements regroupés dans des holdings et prolongé le chômage partiel « a minima jusqu’en juin 2021 ».
Depuis le début du mois de décembre les restaurateurs peuvent choisir entre une aide de 10 000 euros par mois pour ceux qui ont vu leur activité baisser d’au moins 50 % et une indemnisation à hauteur de 20 % de leur chiffre d’affaires de l’année précédente. Des mesures que les sénateurs estiment tous « à la hauteur » pour un Etat « au rendez-vous ». « Il faudra voir si les conditions des aides seront reconduites. Les 20 % de chiffre d’affaires, je ne sais pas si on pourra les tenir », prévient la présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas (LR). « Les aides ont été en partie efficaces pour les petites affaires, mais pour les plus grosses, ça ne couvre même pas le loyer. Cela permettait de faire patienter les troupes », tempère-lui aussi le sénateur Serge Babary (LR). Et puis, il faudra bien un jour assumer le « coût » de ces aides, alertent les sénateurs de droite. Sénatrice socialiste, Viviane Artigalas est favorable à un prolongement des aides mais se demande si « l’argent que l’on met là, si on le mettait pour les vaccins, peut-être qu’on pourrait rouvrir plus rapidement certaines structures… »
« Ce probable nouveau report est aussi dû au ratage de la vaccination »
Un nouveau report, mais jusqu’à quand ? « Un report sine die n’est pas ce que veulent les professionnels », croit savoir le sénateur Serge Babary, régulièrement sollicité par des restaurateurs. Lui plaide pour l’obtention d’une « date ». Au moins, relève-t-il, la décision est « anticipée ». « C’est déjà une amélioration mais il manquera toujours une perspective. Il faut dire si c’est le 30 janvier ou dans deux mois », presse le sénateur d’Indre-et-Loire. « La décision serait brutale mais assez raisonnable », pense quant à elle Sophie Primas. « C’est encore les restaurateurs qui vont trinquer », regrette le sénateur communiste Fabien Gay (CRCE). « Ils payent le prix fort comme le milieu culturel. C’est métro-boulot-dodo. Mais ce probable nouveau report est aussi dû au ratage de la vaccination », relève-t-il alors que la France a vacciné un peu plus de 5000 personnes. Pour le moment aucune date précise de réouverture ne doit être annoncée.
Serge Babary prévient : « La situation de ces établissements va devenir dramatique à partir de maintenant. La période difficile ça va être février-mars, quand ces entreprises auront épuisé leurs trésoreries ». Et l’élu de donner un chiffre étourdissant : « 40 % des bars et restaurants pourraient ne pas rouvrir ». En novembre, un sondage de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) révélait déjà que 30 % des entreprises du secteur envisagent de déposer le bilan, parfois dès le premier trimestre. Plutôt que de donner une nouvelle date de réouverture précise, Sophie Primas souhaiterait que le gouvernement donne « des objectifs en termes de contamination. Et préparer les restaurateurs à une ouverture partielle. Comme uniquement les terrasses », suggère-t-elle. Et puis « donnez une date si c’est pour l’annuler de nouveau… », souffle Serge Babary.
Rouvrir le midi dans certains départements ?
Le Sénat a déjà proposé des pistes pour alléger la charge des hôteliers-restaurateurs. Le 3 décembre dernier, 25 élus centristes ont ainsi réclamé dans un courrier adressé à Jean Castex la réouverture immédiate des restaurants pour le service du midi. Une mesure « d’équité et de bon sens » pour la Sénatrice Valérie Létard (Union centriste) qui porte toujours la proposition avec Olivier Henno (LR). Le sénateur du Nord ne comprend toujours pas pourquoi « les cantines scolaires et les restaurants d’entreprise peuvent être ouverts le midi et pas les restaurants classiques ! Par exemple, les restaurants routiers peuvent eux aussi ouvrir à midi. On continue de dire : pourquoi ce choix est fait ? »
Du côté des syndicats de restaurateurs, certains comptent demander une réouverture « par secteurs géographiques », là où le virus circule faiblement. « C’est une fausse bonne idée », estime Serge Babary, et ce serait prendre « des risques ». « Les gens circulent, donc le virus circule ». Olivier Henno est plus enthousiaste. « On n’est pas obligés de prendre les mêmes décisions là où les hôpitaux sont saturés et là où ils ne le sont pas. Il faut être plus dans la couture, c’est complexe mais nécessaire », plaide-t-il. « Si on territorialise le couvre-feu, comme c’est le cas, ne peut-on pas envisager une territorialisation pour la réouverture des restaurants le midi ? », interroge lui aussi Fabien Gay. Une réouverture territorialisée ? « Pourquoi pas ? », rétorque Sophie Primas, « cela permettrait de faire un peu de chiffre d’affaires… » Mais Viviane Artigalas n’y croit pas trop. « Le gouvernement ne fait pas assez confiance aux élus locaux. On est dans un pays très centralisé. Pour les stations de ski, c’est un problème de territorialisation aussi. Mais ce gouvernement ne sait pas faire », tance la sénatrice des Hautes-Pyrénées.