Abnousse Shalmani reproche à la gauche d’avoir « abandonné l’amour de la patrie et le patriotisme »

Au lendemain des élections législatives ballottées entre les extrêmes, Abnousse Shalmani déplore que la gauche abandonne le patriotisme à l’extrême droite. Née iranienne et naturalisée française vers trente ans, l’écrivain et journaliste clame son amour pour le pays des droits de l’homme. Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Abnousse Shalmani dans « Un monde un regard ».
Lauralie Margalejo

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

« Je n’ai jamais su me définir autrement que française ». Celle qui a grandi en Iran est profondément attachée à la culture de la France. Et pourtant, elle observe une lente musique qui monte en Occident, « une sorte de crise, d’état de détestation de lui-même ». Tant et si bien que la gauche a fini par abandonner « l’amour de la patrie et le patriotisme ».

« L’amour de la culture française est désormais entre les mains de l’extrême droite qui laisse de côté le « savoir vivre » de l’Occident, son « savoir penser », et le réduit « de plus en plus à une lutte identitaire ». Une lutte qui « tue ce qui fait l’essence même de la culture occidentale » : « la liberté et l’ouverture ».

Naturalisée en 2009, celle qui se définit volontiers comme une « métèque heureuse », porte avec fierté sa nationalité française. Si la gauche rejette le patriotisme, Abnousse Shalmani a choisi son camp, celui de Romain Gary : « le patriotisme c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haine des autres ». Elle rappelle que si la culture occidentale « a fait la colonisation, elle a aussi, dans ses universités, hébergé ceux qui allaient faire la décolonisation, elle a créé l’esclavage mais elle a aussi créé l’abolition de l’esclavage. Donc c’est quand même une culture dont on devrait être fiers ». Elle est à la fois le « poison et l’antipoison, ce qui n’est pas le cas, loin de là, de toutes les cultures. C’est une culture qui se remet en question. On y est bien puisqu’on a des outils, on a l’esprit critique, on a la remise en cause permanente ».

« Je suis toujours joyeuse de voir que les gens exercent leur droit »

Si elle a connu la théocratie, Abnousse Shalmani chérit plus que tout la démocratie. Elle explique qu’en Iran, ses parents « étaient coincés dans leur vote » qui étaient en réalité « des faux votes, des votes par défaut ». Elle se réjouit aujourd’hui de voir la joie de ses parents qui, « malades ou pas malades, sont ravis d’aller voter ». Depuis qu’elle a acquis la nationalité française en 2009, elle non plus ne manque pas une occasion d’exercer son droit de vote. Elle se dit néanmoins « affolée » de voir à chaque élection « le choix se réduire entre les extrêmes ». Comme ça a été le cas durant la dernière campagne législative. N’en déplaise à certains, sa position est claire : « ni Rassemblement national, ni France insoumise ». Quand on l’interroge sur la dissolution de l’Assemblée nationale, elle avoue que si elle n’a « jamais été très haineuse vis-à-vis des politiques », car elle « n’en voit pas l’intérêt », « quelque chose qui était un peu de l’ordre de la haine » l’a « titillée vis-à-vis du Président Emmanuel Macron ». Il a selon elle « plongé le pays dans un état de panique, de crise de nerf et de malaise ».

Excentrique, mais pas en politique

Excentrique ? Celle qui a « poussé comme une herbe folle » l’est volontiers. Preuve en est : à l’âge de 6 ans, bravant les interdits de la politique étriquée et répressive des Mollahs, elle n’a pas hésité à « montrer ses fesses » dans la cour de récréation.

Mais s’il y a bien un domaine qui doit se prévenir de toute excentricité selon Abnousse Shalmani, c’est la politique : « Je suis pour l’excentricité, la folie et l’excès, en littérature, en art et même dans la personnalité (…). Le seul endroit où je pense qu’il faut éviter l’extrême, c’est bien évidemment la politique. L’écrivain explique que « s’il n’y a pas d’extrême en politique », c’est justement « ce qui permet à l’art et à la littérature, d’être absolument excessifs et extrêmes ». Or, « quand la politique devient extrême, les interdits s’installent ».

L’intégralité de l’émission est disponible en replay.

Partager cet article

Dans la même thématique

Russia: Newborns dressed in Christmas costumes in Moscow Region
3min

Société

Natalité en baisse : la population progresse uniquement grâce aux migrations

Pour la première fois depuis plus d’un siècle hors période de guerre, la France métropolitaine enregistre davantage de décès que de naissances. En 2024, la croissance démographique du pays repose presque exclusivement sur les migrations, confirmant un tournant historique aux conséquences économiques et sociales.

Le

Collectivités locales : la Cour des comptes épingle le recours aux cabinets de conseil
8min

Société

Lutte contre la corruption : « Un cadre juridique solide » mais des « résultats contrastés » en France, selon la Cour des comptes

Favoritisme, trafic d’influence, détournement de fonds… Les faits d’atteintes à la probité recensés par les autorités ont progressé ces dernières années. Dans un nouveau rapport, la Cour des comptes fait état d’une politique de lutte anticorruption en demi-teinte en France, malgré un socle légal plutôt adapté aux enjeux. Mais « l’ensemble complexe et peu lisible » des dispositifs et des acteurs chargés de cette mission fragilise les résultats en la matière.

Le

France Water Scandal
6min

Société

Perrier : « Il faut arrêter de prendre les consommateurs pour des idiots », s’indigne la sénatrice Antoinette Guhl

Plus de quatre millions de bouteilles de Perrier sont bloquées à Vergèze (Gard) après plusieurs contaminations. Alors que le préfet doit décider si la marque peut conserver son statut d’« eau minérale naturelle », la sénatrice écologiste Antoinette Guhl s’inquiète du manque de transparence de Nestlé Waters. Malgré ces incidents l’ARS Occitanie a rendu un avis favorable, mais sous réserve pour le renouvellement de l’autorisation d’exploitation.

Le