Le 16 mars 1981, la campagne présidentielle qui oppose, entre autres, Valérie Giscard d’Estaing et François Mitterrand, prend un tournant historique lors de l’émission « Cartes sur table » présentée par Alain Duhamel et Jean-Pierre Elkabbach. Invité sur le plateau d’Antenne 2, François Mitterrand est questionné sur la peine de mort. Ce jour-là, la une du Figaro, titrait « 63% des Français ne veulent pas entendre parler de l’abolition de la peine de mort » se souvient Jean-Pierre Elkabbach. « Pas plus sur cette question que sur les autres, je ne cacherai ma pensée. Dans ma conscience profonde, je suis contre la peine de mort » répond alors le candidat à l’élection présidentielle du Parti socialiste à Alain Duhamel au terme de l’émission.
Si la question n’avait pas été posée peut-être que l’abolition n’aurait jamais eu lieu (Jean-Pierre Elkabbach)
Même si l’abolition de la peine de mort figurait déjà au programme des « 110 propositions pour la France » présentée le 24 janvier 1981 par le Parti socialiste et son candidat, le débat est remis au cœur de la campagne par cette seule phrase prononcée et devenue mythique. « C’est presque grâce aussi à ça qu’il a été élu » considère avec le recul Jean-Pierre Elkabbach. Valérie Giscard d’Estaing, lui, qui se déclare au contraire défavorable à cette abolition est battu.
« Robert Badinter a écrit, quelques années après, que si la question n’avait pas été posée peut-être que l’abolition n’aurait jamais eu lieu » rappelle avec une certaine fierté Jean-Pierre Elkabbach. « Si la loi existe, c’est un peu grâce à nous, Duhamel et moi ».
Un déjeuner anniversaire avec Mitterrand
François Mitterrand élu, le projet de loi est discuté à l’Assemblée nationale dès le mois de septembre et adopté par le Sénat en première lecture le 30 septembre 1981. L’abolition de la peine de mort est aujourd’hui considérée comme la première grande réforme du septennat de François Mitterrand. Une victoire que le président socialiste a partagé avec le journaliste. « Cinq ans après, il m’invite à déjeuner à l’Elysée. C’était le jour même, le 16 mars. C’était une manière de rendre hommage à ce qui nous avait valu à l’époque la hargne et l’opprobre de la part de ce qu’on appelle la Mitterrandie » se rappelle Jean-Pierre Elkabbach.