Augmentation des frais de mandats des sénateurs : la mesure ne passe pas pour cet agent de la fonction publique territoriale

Considéré à tort comme un secteur protégé par la baisse générale du pouvoir d’achat en France, la fonction publique peine à augmenter les plus bas salaires. Si l’annonce de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat a pu en soulager certains, elle ne concerne pas tous les agents territoriaux. Une décision jugée inégalitaire, injuste, et qui détonne avec la récente augmentation de 700€ des frais de mandats des sénateurs. Interrogé par Tâm Tran Huy dans l’émission Dialogue citoyen, Benjamin Rapicault, fonctionnaire territorial, dénonce cette disparité.
Axel Dubois

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

C’est un sentiment de déclassement, la sensation de ne pas être reconnu, et ce, malgré les années d’ancienneté : « on voit chaque année le salaire fondre comme neige au soleil ». Pour beaucoup de Français, les salaires n’ont pas suivi la forte inflation des dernières années. Au point que certains se retrouvent rattrapés par le SMIC : « Oui, on se sent rattrapé, même si je suis très heureux pour les collègues en début de carrière qui vont gagner plus au SMIC ! ». Un rattrapage qui reste toutefois douloureux, car symbolique.

Mais c’est une autre disparité, tout aussi symbolique, qui attise la colère de Benjamin : « Comment peut-on expliquer l’augmentation des frais de mandats des sénateurs de 700€ et dire aux agents de la fonction publique territoriale que c’est aux communes de décider si vous avez ou non une prime ? ».

 

Deux poids deux mesures ou faux débat ?

« Moi, je ne me l’explique pas » reconnait le sénateur socialiste (SER) de l’Oise, Alexandre Ouizille, qui avait demandé à l’époque, au Président Larcher d’augmenter uniquement les frais des collaborateurs. Une réponse qui ne manque pas de faire soupirer la sénatrice LR de l’Isère, Frédérique Puissat : « Je pense qu’il ne faut pas être démagogue. ». Et en effet, la question reste délicate : [Monsieur Rapicault] a raison : c’est compliqué à expliquer. ».

« Ne mélangeons pas salaire et AFM (l’avance pour frais de mandat) » tente de clarifier le sénateur RDPI des Yvelines, Martin Lévrier, « quelque part, c’est comme si nous étions chef d’entreprise et cet argent, ces 700€, correspondent au budget de fonctionnement de l’entreprise. Si on ne les dépense pas, on les rend au Sénat ». Car cette augmentation serait surtout due à l’augmentation des frais des hôtels selon Frédérique Puissat : « Je fais des déplacements toutes les semaines, quand je dors trois nuits à l’hôtel, c’est peut-être difficile à comprendre, mais ça coute 3 fois 200€. ».

 

Au bon-vouloir des collectivités

« Vous avez répondu sur l’augmentation des frais de mandats – c’est très bien – mais dans ma question je vous demandais aussi : pourquoi la fonction publique territoriale est encore la cinquième roue du carrosse » insiste Benjamin. C’est Alexandre Ouizille qui se charge de répondre : « Pour le coup, on est sous la Constitution – je vois que ce n’est pas agréable comme réponse et je partage – mais la règle c’est que les collectivités s’administrent librement. ». C’est justement cette autonomie qui impliquerait la disparité entre fonction publique d’état et hospitalière, et fonction publique territoriale : le versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat reste au bon vouloir des collectivités territoriales.

Il y a « beaucoup de collectivités qui ont du mal à boucler leur budget » rappelle Frédérique Puissat. Car l’autre versant de cette autonomie fiscale des collectivités, c’est « celui de la dépense publique » insiste la sénatrice, impliquant de fait des disparités entre collectivités. Des réponses insatisfaisantes pour Benjamin Rapicault, qui ne manqueront pas d’emporter son souffle agacé.

 

Retrouvez l’intégralité de l’émission ici.

Partager cet article

Pour aller plus loin

Dans la même thématique

Collectivités locales : la Cour des comptes épingle le recours aux cabinets de conseil
8min

Société

Lutte contre la corruption : « Un cadre juridique solide » mais des « résultats contrastés » en France, selon la Cour des comptes

Favoritisme, trafic d’influence, détournement de fonds… Les faits d’atteintes à la probité recensés par les autorités ont progressé ces dernières années. Dans un nouveau rapport, la Cour des comptes fait état d’une politique de lutte anticorruption en demi-teinte en France, malgré un socle légal plutôt adapté aux enjeux. Mais « l’ensemble complexe et peu lisible » des dispositifs et des acteurs chargés de cette mission fragilise les résultats en la matière.

Le

France Water Scandal
6min

Société

Perrier : « Il faut arrêter de prendre les consommateurs pour des idiots », s’indigne la sénatrice Antoinette Guhl

Plus de quatre millions de bouteilles de Perrier sont bloquées à Vergèze (Gard) après plusieurs contaminations. Alors que le préfet doit décider si la marque peut conserver son statut d’« eau minérale naturelle », la sénatrice écologiste Antoinette Guhl s’inquiète du manque de transparence de Nestlé Waters. Malgré ces incidents l’ARS Occitanie a rendu un avis favorable, mais sous réserve pour le renouvellement de l’autorisation d’exploitation.

Le