Réalisée par l’Institut Pasteur en collaboration avec l’agence sanitaire Santé publique France et l’Inserm, l’étude vient confirmer l’une des pistes que l’on avait déjà : la grande majorité de la population n’a pas été infectée par le Covid-19, et ne le sera pas d’ici le 11 mai, date à laquelle le gouvernement a annoncé le début d’un déconfinement partiel.
« Pour que l’immunité collective soit suffisante pour éviter une deuxième vague, il faudrait 70 % de personnes immunisées. On est très en dessous », indique Simon Cauchemez, épidémiologue à l’Institut Pasteur.
Le confinement efficace contre la propagation du virus
L’étude révèle qu’avant le 17 mars, un malade contaminait 3 personnes. C’est désormais 0,5. « On a mis en place un confinement qui a eu un impact très important sur la transmission. On estime qu’il a permis de réduire le taux de transmission de 84% » poursuit Simon Cauchemez.
Le but du confinement, mesure prise par de nombreux autres pays, était d’empêcher un afflux massif de patients au même moment, qui aurait dépassé les capacités du système hospitalier.
Résultats : une épidémie qui ralentit, moins de patients en réanimation. Mais d’un autre côté, moins de personnes infectées, donc moins de personnes immunisées.
5,7 des Français contaminés
Le président du comité scientifique Jean-François Delfraissy estimait il y a encore quelques jours que 10 à 12% de la population avait rencontré le virus.
Les résultats indiquent que c'est probablement deux fois moins : seulement 5,7% des Français auront rencontré le virus au 11 mai prochain. Ce niveau est très insuffisant pour éviter une deuxième vague épidémique si toutes les mesures étaient intégralement levées après le 11 mai.
Tout faire pour que la « deuxième vague » soit moins forte
« Sans traitement, ni vaccin, ni immunité collective, il y aura forcément une deuxième vague » assure Bernard Jomier, médecin et sénateur de Paris. « L’enjeu sera de tout faire pour que cette deuxième vague ne soit pas aussi forte que la première en ayant recours de façon massive aux masques, aux tests viraux généralisés, aux gestes barrières, et à l’isolement des personnes potentiellement malades. » Ajoutant qu’un « second confinement n’est pas à exclure » si cette deuxième vague menace de nouveau les hôpitaux de saturation.
Avec trop peu de patients infectés par le Covid-19, l’Institut Pasteur craint également une seconde vague. « La perspective d’un rebond de l’épidémie obligera à un déconfinement très progressif à partir du 11 mai, explique le sénateur. « Il est clair que les Français ne retrouveront pas tout de suite et probablement pas avant longtemps une vie normale. Ce virus nous oblige à beaucoup d’humilité car beaucoup d’incertitudes demeurent. »
« L’immunité collective est un mythe »
L’Institut recommande ainsi le maintien d'efforts conséquents "au-delà du 11 mai pour éviter une reprise de l'épidémie". Ces conclusions sont basées sur le concept de l'immunité collective - actuellement estimée à 70%-, mais selon Michel Amiel, médecin et sénateur des Bouches-du-Rhône : « Rien ne permet aujourd’hui de dire que les anticorps protègent dans la durée. La maladie n'est a priori peut-être pas immunisante. C’est pourquoi le principe d’immunité collective est un mythe. »
Des doutes émis également par Jean-François Delfraissy, auditionné au Sénat mercredi dernier: « On se demande si une personne positive au Covid-19 sera ensuite protégée contre ce virus. Finalement nous ne savons pas si ces anticorps forment une protection. »
De fait, une résurgence du coronavirus a déjà été identifiée sur d'anciens malades à l'étranger il y a quelques semaines. En Corée du Sud, début avril, un essai a révélé que 51 personnes considérées comme guéries ont été de nouveau testées positives au coronavirus.