Ce matin, la proposition de loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a été adoptée par la commission des affaires économiques du Sénat. Elle prévoit des assouplissements sur les pesticides et le stockage de l’eau, et entend calmer les tensions entre les agriculteurs et l’Office français de la biodiversité.
De la téléréalité aux influenceurs sur les réseaux sociaux, les mêmes rêves et les mêmes ficelles ?
Par Nils Buchsbaum
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« La télévision est un média avec lequel j’ai grandi et je suis presque contemporain de son triomphe. J’ai bien connu ces murs entiers de VHS rangées avec de vieilles étiquettes, tout cela a disparu », déclare Aurélien Bellanger.
Ces souvenirs ne sont pas si vieux. Ils appartiennent pourtant à une époque que les nouvelles générations n’ont pas connue.
Dans son nouveau roman, Aurélien Bellanger narre le succès d’un producteur de télévision drômois monté à Paris et devenu un personnage incontournable du paysage audiovisuel français. Au fil des pages, on redécouvre la période du programme de téléréalité « Loft Story » au début des années 2000. L’hypothèse très audacieuse du livre est la suivante : pour l’auteur « la téléréalité est la forme d’art qui manquait à la télévision. Elle a toujours copié le théâtre ou le cinéma. En inventant la téléréalité, elle invente sa propre forme artistique. C’est cela que je voulais raconter ».
« Il y a tout un écosystème qui entoure les influenceurs »
Delphine de Vigan, elle, s’est intéressée aux « influenceurs », ces personnalités (parfois même ces enfants) qui se mettent en scène sur les réseaux sociaux et sont parfois rémunérés pour la promotion de marques et de produits.
« Je suis tombée un peu par hasard sur un reportage qui montrait deux de ces enfants accueillis dans un centre commercial comme des stars internationales. J’ai été saisie par cette image de notoriété, de célébrité chez des enfants si jeunes. J’ai ensuite lu plusieurs articles à ce sujet et j’ai découvert tout cet écosystème qui entoure ces influenceurs ».
Son livre raconte l’histoire d’une mère qui décide de se lancer dans cet univers en utilisant ses enfants. La description de ces pratiques, aujourd’hui quotidiennes pour certaines familles, croise dans l’ouvrage le genre du polar.
« Le roman s’ouvre au moment du Loft suivi par la France entière et la sortie des lofteurs face à une foule hystérique ».
Pour Delphine de Vigan, c’est le point de départ de ce que l’on peut voir aujourd’hui sur les réseaux sociaux. « La téléréalité a influencé de manière très durable notre langage, elle a aussi un peu défini les codes et le langage de YouTube et d’Instagram ». Elle observe : « Finalement, ces influenceurs qui sont au croisement de la téléréalité et du téléachat. Maintenant avec Internet et les moyens techniques à disposition, chacun peut créer sa propre téléréalité domestique ».
« Pour moi c’est une matière formidable parce qu’au fond tout est à imaginer »
Mais ces pratiques et leurs succès sont aussi la manifestation de notre besoin de récit. « Le principe du confessionnal que l’on a découvert dans le Loft met en récit une certaine vacuité ». Et Delphine de Vigan développe : « C’est quelque chose que l’on retrouve de manière très prégnante aujourd’hui sur Instagram où les influenceurs racontent leur vie par le menu ».
Interrogée par Guillaume Erner sur le rôle que peuvent alors conserver dans ce contexte les écrivains, Delphine de Vigan répond : « Mon travail de romancier c’est d’imaginer l’envers du décor, imaginer quelle faille, quelle dérive est à l’œuvre chez ces parents qui mettent en scène leurs enfants. Quels rêves de célébrité, quels rêves d’argent. Pour moi, c’est une matière formidable parce qu’au fond tout est à imaginer. La trivialité, la pauvreté de ces contenus finalement laissent un champ immense à l’imaginaire ».
Retrouver l’intégralité de l’émission ici.
« Les enfants sont rois » de Delphine de Vigan – Editions Gallimard.
« Téléréalité » d’Aurélien Bellanger – Editions Gallimard.