Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »

Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »

Ils se désintéressent, ils sèchent, ils décrochent. Chaque année 100 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification. Pour bon nombre d’observateurs, l’Éducation nationale doit opérer sa mue et mieux individualiser les parcours scolaires pour ne laisser personne au bord du chemin.
Public Sénat

Par Alexandre Delrieu

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

S’il n’existe pas de remède miracle au décrochage scolaire, des solutions éducatives alternatives permettent aux jeunes en difficulté ou déscolarisés de se réconcilier avec l’apprentissage et avec eux-mêmes. C’est notamment le cas du Pôle Innovant Lycéen (PIL) du lycée Lazare Ponticelli dans le XIIIe arrondissement de Paris, où des adolescents déscolarisés pendant une longue période reviennent sur le chemin de l’école. Accueillis dans des classes réduites, ils ont un an pour rebondir, réfléchir et définir un projet personnel. Car la personnalisation des parcours est très importante pour lutter contre le décrochage scolaire.

« Tous nos jeunes ne sont pas les mêmes »

Sur les 100 000 jeunes qui sortent chaque année du système éducatif sans diplôme en France (Cnesco 2017), tous n’ont pas le même profil. Pour les chercheurs, il n’y a pas de « décrocheur » type. D’où l’importance, souligne le pédopsychiatre Patrice Huerre, d’apporter à chaque élève un suivi individualisé afin de déceler en amont les difficultés d’apprentissage. « On a intérêt à perdre du temps au moment où on identifie une situation de décrochage, pour en gagner ensuite dans le remède qu’on apportera » estime le psychiatre.

Décrochage scolaire : "On a intérêt à perdre du temps au moment où on identifie une situation de décrochage, pour en gagner ensuite" #UMED
01:08

« Notre système a hiérarchisé les formations »

L’une des pistes avancées par le sénateur Jean-Claude Carle est l’adoption de « pédagogies différenciées » qui s’adaptent aux besoins de chaque jeune. « Il faut qu’on sorte de cette hiérarchisation des formes d’intelligence, où on ne valorise qu’une forme d’intelligence, l’intelligence abstraite, […] en oubliant d’autres formes d’intelligence, l’intelligence du geste », estime le parlementaire qui appelle l’Éducation nationale à opérer une « révolution ». Le chercheur en sciences de l'éducation Pierre-Yves Bernard, qui appelle à revaloriser les voies professionnelles, abonde en ce sens : « aujourd’hui on a tendance à utiliser une partie de l’enseignement professionnel comme voie de relégation ».

« Ne pas orienter un élève contre sa propre volonté »

Outre l’éventail des offres de formation proposées, le respect des choix d’orientation et du rythme de chaque jeune semble également primordial. « C’est très important de partir des trajectoires de chacun, de faire attention aux souhaits de chacun, et de ne pas orienter un élève contre sa propre volonté » insiste Olivier Haeri, enseignant au Microlycée de Sénart. « Il faut considérer qu’interrompre une trajectoire scolaire à un moment donné, faire autre chose, prendre un moment de pause ou de respiration, ce n’est pas nécessairement un drame », ajoute Pierre-Yves Bernard.

"Interrompre une trajectoire scolaire [...] n'est pas nécessairement un drame" #UMED
00:47

En ce sens, le psychiatre Patrice Huerre encourage les expériences extrascolaires comme les services civiques. « Faire une offre d’expérience de vie, de rencontre avec d’autres humains, qui vont partager leurs intérêts, leurs passions […]. Et on sait très bien que c’est dans ces rencontres-là que parfois va naître un choix d’orientation personnelle qui tiendra la route ».

Retrouvez l'intégralité du débat « Comment réconcilier les décrocheurs avec l'école ? » dans l'émission Un monde en Docs, présentée par Nora Hamadi, le samedi 7 juillet à 23 h 30, le dimanche 8 juillet à 9 h 55 et le dimanche 15 juillet à 18 h 55 sur Public Sénat.

Dans la même thématique

Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »
4min

Société

« Sur le handicap, le regard de la société a progressé plus vite que celui des institutions » se réjouit Eglantine Eméyé

Mannequin, animatrice de télévision et comédienne. Elle a médiatisé le combat de son second fils Samy, atteint d’autisme sévère, pour alerter sur le manque de prise en charge des enfants handicapés, mais aussi la solitude des mères et des parents. Malgré la disparition de son fils en 2023, elle a décidé de poursuivre le combat. Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Eglantine Eméyé dans « Un monde, un regard » sur Public Sénat.

Le

FRA: Aurore Berge deplacement CAF et creche
7min

Société

Crèches : ce rapport du Sénat qui épingle la faiblesse des contrôles

Dans un rapport rendu public ce jeudi 20 mars, le Sénat alerte sur le manque de moyens des organismes chargés d’évaluer les structures d’accueil des jeunes enfants. Les élus évoquent des contrôles souvent techniques et parcellaires, qui ne permettent pas toujours d’identifier les signaux de maltraitance, ni de s’assurer du bon emploi des deniers publics.

Le

Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »
3min

Société

Reconversion : « Pour trouver les aides, c’est un vrai parcours du combattant » lâche cet ex-ouvrier

Si aujourd’hui Laurent Maillet pose tout sourire devant sa crêperie familiale, il n’oublie pas pour autant le chemin parcouru et les difficultés rencontrées avant de pouvoir accueillir ses premiers clients. Licencié fin 2023 suite à un plan social, ce quinquagénaire décide de tenter l’aventure de la reconversion. Un an plus tard, il savoure sa réussite, accompagné par sa femme et son fils. Une histoire de reconversion racontée dans l’émission Dialogue citoyen.

Le