Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »
Ils se désintéressent, ils sèchent, ils décrochent. Chaque année 100 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification. Pour bon nombre d’observateurs, l’Éducation nationale doit opérer sa mue et mieux individualiser les parcours scolaires pour ne laisser personne au bord du chemin.

Décrochage scolaire : « Il faut que l’Éducation nationale fasse sa révolution »

Ils se désintéressent, ils sèchent, ils décrochent. Chaque année 100 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification. Pour bon nombre d’observateurs, l’Éducation nationale doit opérer sa mue et mieux individualiser les parcours scolaires pour ne laisser personne au bord du chemin.
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Par Alexandre Delrieu

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S’il n’existe pas de remède miracle au décrochage scolaire, des solutions éducatives alternatives permettent aux jeunes en difficulté ou déscolarisés de se réconcilier avec l’apprentissage et avec eux-mêmes. C’est notamment le cas du Pôle Innovant Lycéen (PIL) du lycée Lazare Ponticelli dans le XIIIe arrondissement de Paris, où des adolescents déscolarisés pendant une longue période reviennent sur le chemin de l’école. Accueillis dans des classes réduites, ils ont un an pour rebondir, réfléchir et définir un projet personnel. Car la personnalisation des parcours est très importante pour lutter contre le décrochage scolaire.

« Tous nos jeunes ne sont pas les mêmes »

Sur les 100 000 jeunes qui sortent chaque année du système éducatif sans diplôme en France (Cnesco 2017), tous n’ont pas le même profil. Pour les chercheurs, il n’y a pas de « décrocheur » type. D’où l’importance, souligne le pédopsychiatre Patrice Huerre, d’apporter à chaque élève un suivi individualisé afin de déceler en amont les difficultés d’apprentissage. « On a intérêt à perdre du temps au moment où on identifie une situation de décrochage, pour en gagner ensuite dans le remède qu’on apportera » estime le psychiatre.

Décrochage scolaire : "On a intérêt à perdre du temps au moment où on identifie une situation de décrochage, pour en gagner ensuite" #UMED
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« Notre système a hiérarchisé les formations »

L’une des pistes avancées par le sénateur Jean-Claude Carle est l’adoption de « pédagogies différenciées » qui s’adaptent aux besoins de chaque jeune. « Il faut qu’on sorte de cette hiérarchisation des formes d’intelligence, où on ne valorise qu’une forme d’intelligence, l’intelligence abstraite, […] en oubliant d’autres formes d’intelligence, l’intelligence du geste », estime le parlementaire qui appelle l’Éducation nationale à opérer une « révolution ». Le chercheur en sciences de l'éducation Pierre-Yves Bernard, qui appelle à revaloriser les voies professionnelles, abonde en ce sens : « aujourd’hui on a tendance à utiliser une partie de l’enseignement professionnel comme voie de relégation ».

« Ne pas orienter un élève contre sa propre volonté »

Outre l’éventail des offres de formation proposées, le respect des choix d’orientation et du rythme de chaque jeune semble également primordial. « C’est très important de partir des trajectoires de chacun, de faire attention aux souhaits de chacun, et de ne pas orienter un élève contre sa propre volonté » insiste Olivier Haeri, enseignant au Microlycée de Sénart. « Il faut considérer qu’interrompre une trajectoire scolaire à un moment donné, faire autre chose, prendre un moment de pause ou de respiration, ce n’est pas nécessairement un drame », ajoute Pierre-Yves Bernard.

"Interrompre une trajectoire scolaire [...] n'est pas nécessairement un drame" #UMED
00:47

En ce sens, le psychiatre Patrice Huerre encourage les expériences extrascolaires comme les services civiques. « Faire une offre d’expérience de vie, de rencontre avec d’autres humains, qui vont partager leurs intérêts, leurs passions […]. Et on sait très bien que c’est dans ces rencontres-là que parfois va naître un choix d’orientation personnelle qui tiendra la route ».

Retrouvez l'intégralité du débat « Comment réconcilier les décrocheurs avec l'école ? » dans l'émission Un monde en Docs, présentée par Nora Hamadi, le samedi 7 juillet à 23 h 30, le dimanche 8 juillet à 9 h 55 et le dimanche 15 juillet à 18 h 55 sur Public Sénat.

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