Emouna : dialogue interreligieux, échanges et incompréhensions

Emouna : dialogue interreligieux, échanges et incompréhensions

« Emouna », cursus inédit des formations de Sciences Po, s’est donné pour objectif de participer au dialogue interreligieux. Créé en 2016, en réaction aux attentats terroristes, des responsables de cultes de tous horizons ont suivi ce parcours sans précédent avec l’ambition partagée du vivre-ensemble. Au programme de ce parcours : œcuménisme, laïcité ou encore bioéthique.
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Par Louis-Marie Le Béon

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C’est sur les bancs de l’Institut d’Études Politiques de Paris que se côtoient pour la première fois imams, prêtres, rabbins et responsables religieux de tous bords dans l’idée de pouvoir penser ensemble les rapports avec la République. Ainsi, dans les couloirs du prestigieux institut parisien, les cols romains et les kippas se confondent le temps d’une formation, avec les pantalons et baskets des étudiants sciencepistes.

 

Penser Dieu et la République

Penser un rapport c’est d’abord le définir ; ce qui est loin d’être un exercice facile. Le temps de la formation, ces étudiants atypiques sont invités à dessiner à grands traits ce qui constitue leur foi afin de pouvoir l’expliquer aux autres, exercice d’autant plus compliqué qu’il se heurte parfois aux barrières des concepts et de la langue. C’est cet obstacle que le théologien Dennis Gira, spécialiste américain du bouddhisme, expose avec humour à l’auditoire : « Le Bouddha n’a en fait jamais dit que tout est souffrance. Et pourquoi ne l’a-t-il jamais dit ? Eh bien pour une raison simple et fondamentale : il n’était pas français. Le Bouddha a dit « tout est dukkha ». Et maintenant vous vous demandez ce que ça veut dire. Et c’est ça le point de départ pour comprendre toute religion. […] Car sinon, nous réinterprétons l’autre en fonction de nous-mêmes, et ça c’est mortel ! Il faut avoir l’humilité de faire ce travail d’écoute de l’autre. »

Religions : " Nous réinterprétons l’autre en fonction de nous-mêmes, et ça c’est mortel ! "
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Le débat d’idées à l’épreuve du réel

Progressant dans le séminaire, les participants sont rapidement confrontés aux questions qui animent le débat public et agitent les communautés religieuses. De la présence de femmes dans les rangs des responsables du culte, aux risques du transhumanisme, en passant par la très centrale question de la laïcité : quelle place pour les croyants ?

C’est notamment autour d’un dialogue sur le début de la vie que les différences conceptuelles prennent forme. « Un embryon n’est pas encore un bébé jusqu’à, selon les traditions : la naissance. Et même un mois après la naissance, pour d’autres traditions. » explique ainsi Mathias Elasri, étudiant rabbin, aux participants interloqués, « c’est-à-dire que dans une situation où tu as à choisir entre la mère et l’enfant, systématiquement on va choisir la mère. Ce qui veut dire que dans le cas où un enfant meurt avant un mois, il n’y a pas d’enterrement. ». Démonstration qu’entendent ses camarades mais semblent encore demeurer loin de leur champ de compréhension. L’un d’eux murmure ainsi : « je comprends la logique mais en même, psychologiquement c’est… Wow ».

Quand se situe le début de la vie ? Les réponses des religions diffèrent...
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C’est avec un certain sens du symbole que cette première promotion du cursus « Emouna » se conclut : complices pour certains et rompant le pain : « nous mettre tous ensemble dans une pièce, c’est déjà un moment d’apprentissage. C’est quelque chose qui moi m’a poussé dans mes retranchements plus d’une fois. ». Ainsi, par cette acceptation de l’écoute et du questionnement, les participants posent les fondations du vivre ensemble.

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