Ces derniers mois les incidents graves s’accumulent autour du football en France. Une spirale qui interroge sur la sécurisation des rencontres avec parfois plusieurs dizaines de milliers de supporters. Quelles différences avec le modèle anglais qui présente des résultats ? Pour tenter d’y répondre, Public Sénat est allé à la rencontre de fans de foot, de responsables de la sécurité et de dirigeants politiques. Tous partagent un même constat : les choses doivent changer.
Le 5 décembre 2023, trois jours après la mort d’un supporter nantais après la rencontre Nantes Nice, Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports, décide d’un moratoire sur les déplacements de supporters. Une décision forte, destinée à créer un électrochoc. En plus de ce drame, depuis quelques mois, l’agression du jeune Kenzo à Ajaccio et le caillassage du bus de l’Olympique Lyonnais, mettent en exergue un nombre croissant de violences liées au foot. Un problème pris très au sérieux par les sénateurs de la commission de la culture et du sport.
Le sénateur centriste des Vosges, Jean Hingray estime que « l’avenir du foot en dépend. On ne va pas continuer à voir tout au long des week-ends des interdictions de stade, des actes violents dans un imbroglio, même d’un un point de vue image c’est catastrophique. Donc il faut qu’on prenne ce sujet à bras-le-corps avec la ministre et que chacun prenne ses responsabilités. »
Jean Hingray aimerait que la France s’inspire du modèle anglais, beaucoup plus sévère en matière de réponse pénale.
Le modèle anglais prône la connaissance des foules
Souvent considéré comme la patrie du ballon rond, le Royaume-Uni a longtemps été une place forte du hooliganisme. Aujourd’hui, l’île voisine fait figure de bonne élève en matière de gestion des rencontres de foot. Pour ce faire, les Britanniques ont créé une police dédiée au seul football, et construit un système basé sur une approche sociologique des supporters de football.
Le chef de la police du foot britannique Mark Roberts l’affirme : « Il faut comprendre à quelle foule on a affaire, car la grande majorité des gens qui assistent à des matches, aiment sincèrement le football. Je me suis rendu compte en voyageant à travers l’Europe, que parfois, la police est trop agressive avec les vrais supporters, alors qu’il faudrait simplement rester à côté d’eux. Il est très important de comprendre qu’il faut maintenir le dialogue avec la foule. Avec ces supporters qui ne posent pas de problèmes, nous devons communiquer, les impliquer afin que les supporters s’occupent d’eux-mêmes ». Il ajoute : « D’un autre côté, il y a les personnes qui vont au football uniquement pour se livrer à la violence et à des actes criminels. Ceux-là, il faut les exclure. C’est pourquoi il faut, à raison, utiliser la législation sur les interdictions de stade pour les poursuivre et, dans certains cas, les traiter comme un groupe criminel organisé et mettre en place une stratégie de lutte contre la criminalité pour les exclure. Quant aux personnes qui se comportent généralement bien, mais qui sont peut-être sous l’influence de l’alcool ou de la drogue, elles doivent être gérées d’une manière particulière », conclut-il.
Mais dans le football, beaucoup de sujets se croisent… et les causes sont multiples… comme l’explique Vivien Couzelas, journaliste et auteur du livre « Dans la tête d’un hooligan » : « Il ne peut pas y avoir un seul coupable. Ça ne peut pas être d’un seul côté les groupes de supporters, oui les autorités sont aussi coupables. […] D’ailleurs pour moi la solution ne viendra pas que des groupes de supporters, quand je disais tout à l’heure que la solution doit venir de la gestion des groupes de supporters. La gestion des groupes de supporters implique la gestion entre eux mais aussi la gestion de la part des autorités. »
Le monde amateur n’est pas en reste
Par ailleurs, si le nombre d’incidents augmente à l’intérieur et aux abords des stades professionnels, le phénomène ruisselle également sur le monde amateur. Bruno Herbst, président du district des Vosges, échelon départemental de la Fédération Française de Foot, en fait le constat chaque week-end sur les terrains.
Ce problème, Amélie Oudéa-Castéra, l’a également abordé lors d’un débat au Sénat le 17 janvier dernier. Pour apporter une réponse globale, aussi bien chez les pros que chez les amateurs, la désormais ministre de l’Education nationale et des Sports, a donné rendez-vous prochainement à tous les acteurs du foot pour des Assises qu’elle souhaite profondément réformatrices.
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