Grenelle des violences conjugales : un an après, le compte n’y est pas

Grenelle des violences conjugales : un an après, le compte n’y est pas

Un an après le lancement du Grenelle des violences conjugales, une conférence de presse était organisée par la Fondation des Femmes afin de faire le bilan des politiques mises en œuvre. Les responsables associatifs déplorent un manque de moyens et de suivi. Des critiques qui entrent en écho avec celles du Sénat.
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Par Steve Jourdin

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 « Édouard Philippe avait annoncé qu’il n’y aurait pas davantage d’argent. Sur ce point, les promesses ont été tenues ». Un an après le Grenelle des violences faites aux femmes, la présidente de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert, déplore l’absence de nouveaux moyens accordés à ce qui a été présenté par le gouvernement comme la grande cause du quinquennat. Un constat qui s’inscrit dans le prolongement d’un rapport sénatorial, rendu public fin août, et qui regrette un « tour de passe-passe budgétaire » orchestré par l’exécutif. En définitive, selon les associations et les sénateurs, les mesures mises en place auraient été réalisées à budget constant.  

 Un manque de suivi et de moyens

Un an jour pour jour après l’ouverture du Grenelle, Anne-Cécile Mailfert souligne que toutes les mesures annoncées n’ont pas été suivies d’effet. Au niveau comptable, « un tiers d’entre elles ont effectivement été réalisées, un tiers est en cours de réalisation et un autre tiers sont au point mort » selon elle. Les mesures les plus coûteuses, comme la création de nouvelles structures dédiées à la prise en charge psychologique des femmes, sont toujours en suspens. Par ailleurs, la présidente de la Fondation des femmes pointe l’ « absence de pilotage centralisé » de la politique du gouvernement, rejoignant ainsi les conclusions du rapport Bocquet-Bazin qui regrette le morcellement des crédits et l’absence de concertation interministérielle. Les politiques impulsées auraient souffert d’un manque de suivi préjudiciable.

 Les places d'hébergement : un sujet toujours aussi brûlant

Autre sujet de préoccupation des associations : le manque de places d’hébergement pour les victimes de violences conjugales. En déplacement ce mercredi à la Maison des femmes en Seine-Saint-Denis, Jean Castex a indiqué la création de 1000 places  supplémentaires. Des places qui s’ajoutent aux 1 000 déjà prévues dans le cadre du Grenelle, et qui devraient porter le total à 6 500. Une annonce accueillie avec scepticisme par les associations, qui demandent un fléchage des fonds et une meilleure répartition géographique des centres d’accueil.

 D’autant que, sur le terrain, la situation est toujours critique. Florent Guéguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (FNARS), signale une saturation chronique du 115, le numéro du Samu social, avec une proportion importante de femmes victimes de violences ne parvenant pas à trouver un abri. « Plusieurs centaines de femmes appellent chaque jour, notamment dans les grandes métropoles. Malheureusement, elles n’obtiennent pas de solution d'hébergement », souligne-t-il.

 Les associations critiquent également le sous-financement des places d’hébergement. Alors que la prise en charge coûte en moyenne 25 euros par jour et par place, il faudrait porter les dépenses à 40 ou 50 euros afin de proposer un accueil adapté. « Aujourd’hui l’hébergement des femmes repose principalement sur les centres d'hébergement généralistes. Ces femmes sont mélangées aux hommes, ce qui n'est pas sans causer des problèmes pratiques » selon Florent Guéguen. Un constat partagé par les sénateurs, qui recommandent de concentrer les efforts sur la création de nouveaux centres d'hébergement spécialisés.

 Les associations saluent néanmoins une prise de conscience générale de la société sur la situation des femmes. Le Grenelle aurait ainsi permis de mettre en lumière les problématiques rencontrées par les victimes. Mais alors que le nombre de féminicides a connu une hausse inquiétante en 2019 ( + 21 %), et que le déconfinement aurait fait repartir les violences à la hausse après une relative accalmie, le chemin est encore long : « Ce sont les femmes qui détiennent la clé », résume Ghada Hatemfondatrice de la Maison des Femmes à Saint-Denis. Comme un écho aux propos de Jean Castex, qui appelait mercredi les femmes à « sortir de l’ombre » pour faire reculer les violences. 

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