FRA: Proposition de reduction de la vitesse a 110km sur l’autoroute rejete par le gouvernement

Hausse des accidents mortels sur autoroute : les sénateurs LR veulent une loi pour « une justice plus ferme et dissuasive »

L’association des sociétés françaises d’autoroute déplore une hausse de 43 % des accidents mortels en 2022. L’alcool, la drogue et les médicaments restent les premières causes de ces accidents. Pour y remédier, les sénateurs proposent plusieurs solutions parmi lesquelles améliorer la prévention, empêcher les remises de peines pour les délinquants routiers ou abaisser la vitesse sur les autoroutes.
Stephane Duguet

Temps de lecture :

7 min

Publié le

Mis à jour le

C’est un rapport qui appelle à la prudence en cette période de grands départs en vacances. L’association des sociétés françaises d’autoroute qui regroupe tous les concessionnaires (ASFA) a publié son bilan annuel « Accident mortel sur autoroutes concédées ». En 2022, sur les 1 654 accidents corporels causés sur les autoroutes françaises, il y a eu 167 accidents mortels, soit 43 % de plus qu’en 2021.

Dans le détail, le document de l’ASFA explique que les 18-34 ans sont surreprésentés dans les accidents mortels sur l’autoroute. Ils ne représentent que 17 % des conducteurs, mais 32 % de ces accidents. Du côté des causes, on retrouve en haut de la liste « alcool, drogues et médicaments » à l’origine de 26 % des accidents mortels, explique l’association.


« Relâchement des automobilistes »

« Quand on voit cela, c’est que les campagnes de prévention ne sont pas assez efficaces », déplore la sénatrice Les Républicains Alexandra Borchio Fontimp pour qui l’augmentation du nombre d’accidents mortels est due au « relâchement des automobilistes ». L’élue des Alpes-Maritimes très engagée sur le sujet de la sécurité routière est co-auteure d’une proposition de loi « pour une meilleure prévention routière » avec d’autres collègues dont le LR Laurent Somon.

Concernant la prévention, la sénatrice regrette que le gouvernement ne se focalise pas plus sur la drogue dont la consommation reste illégale : « On voit qu’il y a sans cesse des nouvelles drogues qui sortent et qui sont disponibles sur internet. L’alcool reste le facteur le plus important, mais avec l’émancipation de la prise de stupéfiant, ce serait bien que le gouvernement fasse des publicités où on parle de la conséquence de la prise de drogue sur les routes. »

Appliquer la loi

Au-delà de la question de la prévention, la proposition de loi des sénateurs LR insiste sur l’application des peines dans le cadre de délits routiers. « Il y a 40 % des auteurs d’accidents mortels qui ne sont pas condamnés à de la prison ferme. Il faut une justice plus ferme et plus dissuasive », plaide Alexandra Borchio Fontimp. Pour celle qui est aussi porte-parole du parti Les Républicains, « il n’y a pas besoin d’augmenter les peines, il faut juste les appliquer ».

L’article 221-6-1 du Code pénal prévoit aujourd’hui cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende pour le délit d’homicide involontaire, renommé homicide routier fin juillet par le gouvernement. « On parle d’homicide routier, mais cette sémantique est faible et lâche s’il n’y a pas de réponse judiciaire plus ferme », estime la sénatrice. Le Code pénal prévoit aussi sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende si le conducteur est reconnu coupable d’une circonstance aggravante comme conduire sous l’empire de l’alcool ou de la drogue. La peine peut même atteindre 10 ans de prison ferme et 500 000 euros d’amende si deux circonstances aggravantes sont retenues.

Dans leur proposition de loi, les sénateurs Les Républicains réclament qu’un conducteur condamné aille effectivement en prison. « S’il y a une condamnation à de la prison ferme, on demande que le coupable ait six mois ferme sans remise ni aménagement de peine possible », explique Alexandra Borchio Fontimp pour qui cela serait dissuasif. « C’est évident qu’il faut des peines à la hauteur pour les coupables de délits routiers, mais je doute sur le fait qu’une personne qui conduit sous l’empire de l’alcool ou excès de vitesse agira différemment si on lui dit qu’elle va avoir de la prison ferme », s’interroge Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste au Sénat.



">

Abaisser la vitesse de 130 à 110 km/h

Le bilan de l’ASFA indique également que 16% des accidents mortels en 2022 sont la conséquence d’un excès de vitesse. Pour le sénateur de l’Isère, la réduction de la vitesse maximum de 130 à 110 km/h sur autoroute, proposée par la convention citoyenne mais écartée par Emmanuel Macron, est une solution appropriée. « Cela permet de diminuer les rejets de CO2, de réduire la consommation d’essence et donc la facture et en plus de baisser le nombre d’accidents. C’est évidemment contraignant pour les automobilistes, mais ce serait une habitude à prendre », indique Guillaume Gontard. « Dans les Alpes-Maritimes, la limitation de vitesse sur autoroute est passée à 90 km/h au lieu de 130 à certains endroits et c’est une bonne chose, ça réduit l’accidentologie », abonde Alexandra Borchio Fontimp.

Guillaume Gontard souhaite aussi engager une réflexion sur le suivi des automobilistes après l’obtention de leur permis. « Pourquoi pas envisager un système de revoyure en remettant des points de rappels à la loi, en rappelant les conséquences que peut engendrer une conduite en excès de vitesse ou en ayant consommé de l’alcool. J’ai mon permis depuis 18 ans et on ne m’a plus jamais rien demandé depuis. »

Pédagogie « incohérente »

Les deux sénateurs estiment qu’une meilleure pédagogie à l’école et pendant l’apprentissage de la conduite est nécessaire. « Ma fille passe son code et va attaquer ses heures de conduite. A part lui dire qu’il ne faut pas conduire avec tant de litres d’alcool dans le sang, il n’y a rien et pourtant ce serait le moment de rappeler qu’on transforme son véhicule en arme si on conduit en ayant bu ou pris de la drogue », témoigne la sénatrice LR. Elle aimerait aussi que les établissements qui vendent des boissons alcoolisées soient dans l’obligation de mettre à disposition des consommateurs des alcootests.

Les annonces faites le 17 juillet par Élisabeth Borne après un comité interministériel dédié à la sécurité routière n’ont pas convaincu les deux élus. « C’était plus de la communication que du concret », regrette Alexandra Borchio Fontimp. Pour Guillaume Gontard : « Ça ne va pas dans le bon sens ! Quand on supprime le retrait de points pour un excès de 5 km/h, ça veut plutôt dire : c’est pas si grave, vous pouvez dépasser la limite ». L’écologiste compare ce message à celui envoyé par les départements qui ont rétabli les 90 km/h sur les routes départementales à la place des 80 km/h. « Pour la sécurité routière, c’est déplorable qu’il y ait des à-coups et des messages incohérents », s’inquiète-t-il.

Vers une loi débattue au Sénat ?

Si le cabinet du ministère de l’Intérieur a reçu les sénateurs Les Républicains auteurs de la proposition de loi sur la prévention routière avant les annonces, il a laissé entendre qu’un projet de loi sur le sujet verrait le jour « fin 2023, début 2024 » d’après Alexandra Borchio Fontimp. Mais les parlementaires LR ne souhaitent pas attendre le gouvernement. « Notre objectif, c’est de mettre notre texte à l’ordre du jour du Sénat, qu’il soit amendé et enrichi pour arriver à une loi aboutie et ensuite qu’elle soit votée à l’Assemblée nationale », projette la sénatrice des Alpes-Maritimes, sans attendre le feu vert gouvernemental.



Dans la même thématique

Photo IVG
3min

Société

Accès à l’IVG en France, la course d’obstacles

Le 4 mars 2024, le Parlement adopte définitivement l'IVG dans la Constitution. Après les députés, les sénateurs ont voté en faveur de l’inscription de « la liberté des femmes de recourir à une interruption volontaire de grossesse » dans la loi fondamentale. Un « jour historique », selon le gouvernement, mais qu'en est-il concrètement de l'accès à l'IVG sur le territoire ? Derrière les célébrations, sous les ors du Congrès à Versailles, se cache une réalité plus sombre. Public Sénat est allé enquêter sur le terrain à la rencontre de ces femmes en quête d’une IVG.

Le

Majorité numérique à 15 ans : « La problématique, c’est le système pour vérifier l’âge »
5min

Société

Majorité numérique à 15 ans : « La problématique, c’est le système pour vérifier l’âge »

Dans son discours sur l’Europe à la Sorbonne, Emmanuel Macron a appelé à reprendre le contrôle sur les contenus en ligne et à protéger la jeunesse des contenus dangereux. Pour Olivia Tambou, maître de conférences, la clé d’une telle réglementation au niveau européen réside dans la vérification de l’âge. La sénatrice Catherine Morin-Desailly appelle à une réflexion plus globale sur les usages et la formation.

Le

Police operation de lutte contre les depots sauvages a Nice
5min

Société

Couvre-feu pour les mineurs : quel pouvoir pour les maires ?

La décision de Gérald Darmanin d’instaurer un couvre-feu pour les mineurs en Guadeloupe inspire les maires de métropole. À Béziers, la mesure est en vigueur depuis lundi. À Nice, Christian Estrosi songe aussi à la mettre en place. Dans quelle mesure les maires peuvent-ils restreindre la liberté de circuler ?

Le