« J’ai toujours été frappé par le degré de bienveillance dont je bénéficie », François Molins

Entre 2012 et 2018, une série d’attentats touche la France. Dans la tourmente, une voix rassurante émerge, celle de François Molins, procureur de la République. Pédagogie et sang-froid ont toujours été de mise dans ses prises de parole. Tant et si bien qu’un lien fort s’est construit entre les Français et lui. Comment a-t-il traversé ces moments de terreur ? Comment explique-t-il la sympathie des Français à son égard ? Cette semaine, François Molins est l’invité de Rebecca Fitoussi dans « Un Monde un Regard ».
Lauralie Margalejo

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

La tuerie dans l’école juive Ozar Hatorah à Toulouse en 2012, l’assaut lancé dans la rédaction de Charlie Hebdo en janvier 2015, le massacre du Bataclan en novembre la même année… Les drames n’ont pas épargné la carrière du procureur de la République. Et pourtant, il n’a jamais cédé à la haine et ne s’est jamais laissé envahir par l’émotion : « quoi que j’aie pu ressentir ou éprouver » affirme-t-il, « ça n’avait rien de commun avec ce qu’avaient pu ressentir les gens qui avaient souffert dans leur chair, et ceux qui avaient perdu des êtres proches ». Quand on l’interroge sur son lien avec les Français, celui qui a grandi dans un petit village de 700 habitants dans les Pyrénées-Orientales déclare avec cet accent du midi qui le caractérise : « j’ai toujours été frappé par le degré de bienveillance dont je bénéficie de la part des gens qui viennent me voir. »

Employer le bon ton au cœur de la terreur

Au regard de tous les événements tragiques auxquels il a dû faire face en 46 ans de carrière, Il l’avoue lui-même : « des fois je me dis que je dois être un peu chat noir, j’ai eu des affaires très lourdes quasiment dans tous les postes que j’ai occupés ». Ce sont justement ces « dossiers emblématiques » qui l’ont mis « sous la lumière des projecteurs ». Cela fait selon lui, partie de ses « responsabilités » et affirme qu’« il faut les assumer ». Si sa formation en communication n’a pas duré plus d’une demi-journée, il a rapidement trouvé les mots justes et adopté le bon ton pour rassurer les Français. Malgré son sang-froid, a-t-il été touché par ces drames successifs ? Bien sûr qu’il l’a été. Il est d’ailleurs à l’origine de l’ouverture d’une cellule psychologique après les attentats de Charlie Hebdo, conscient que « trois ou quatre » de ses collègues « n’allaient vraiment pas bien ». Afin de montrer l’exemple il a été le premier à se saisir de cette cellule psychologique et à consulter lui-même.

Vers un engagement en politique ?

Dans l’esprit de beaucoup de Français, il restera à jamais cette voix rassurante en temps de crise. Sa proximité avec les citoyens a par ailleurs éveillé quelques espoirs d’un engagement en politique. François Molins révèle à ce sujet avoir « eu des propositions » d’entrée en politique mais les a refusées. En effet, il souhaite « se rendre utile autrement », la politique étant selon lui bien trop souvent « l’art des compromis ». Or, attaché à son « indépendance » et à sa « liberté », il explique :  « je n’ai pas envie de me trouver dans des situations où je serais tenu de porter ou de défendre des choses auxquelles je n’adhérerais pas totalement ». Grâce à ses mémoires, Au nom du peuple français, il entend justement retrouver par un autre chemin les citoyens. Son « fil rouge » ? « Mieux expliquer la réalité et le contenu du métier de procureur ». Fort de la confiance que les Français lui accordent, il explique que son livre est « une façon de rappeler que dans la crise de légitimité qu’elle traverse, la justice est rendue au nom du peuple français, et c’est, parce qu’elle est rendue en son nom, que j’ai pensé qu’il était légitime de rendre compte à un moment donné de ce que j’avais fait. »

L’intégralité de l’émission est disponible en replay.

Dans la même thématique

Weekly cabinet meeting at Elysee Palace, Paris, France – 12 Jan 2024
5min

Société

Prostitution : un nouveau plan de lutte présenté ce jeudi, huit ans après la loi pénalisant les clients

Alors que la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, peine encore à produire ses effets, le gouvernement a annoncé la présentation d’un nouveau plan pour lutter contre la prostitution, à l’aube d’une augmentation inquiétante des chiffres chez les mineurs. Selon les associations, ils seraient entre 7 000 et 10 000 à être aujourd’hui prostitués, un chiffre qui a doublé ces dernières années.

Le

Enfants et ecrans
4min

Société

Rapport sur l’usage des écrans chez les enfants : « Nous avons perdu six ans », déplore la sénatrice Catherine Morin-Desailly

Commandé par l’exécutif, le rapport d’experts sur l’usage des écrans chez les enfants a été remis au président de la République ce 30 avril. En 2018, le sujet avait déjà fait l’objet d’une proposition de loi largement votée au Sénat, mais jamais discutée à l’Assemblée. Auteure du texte, la sénatrice centriste Catherine Morin-Desailly dénonce aujourd’hui « une perte de temps ».

Le

A national gendarmerie van entering the Paris courthouse
7min

Société

Meurtre de Matisse à Châteauroux : qu’est-ce que l’excuse de minorité, que le gouvernement souhaite réformer ?

Alors que de multiples faits divers concernant des mineurs font l’actualité ces dernières semaines, le dernier en date, le meurtre de Matisse, 15 ans, poignardé à mort, samedi dernier à Châteauroux, par un mineur afghan âgé lui aussi de 15 ans et placé sous contrôle judiciaire, cinq jours avant le meurtre, Gabriel Attal a annoncé, le 18 avril dernier, souhaiter « ouvrir le débat » sur l’excuse de minorité. Mais au fait, à quoi fait référence cette qualification pénale, qui revient régulièrement dans les discussions ?

Le