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Nantes' French head coach Raymond Domenech is seen before the French L1 football match between FC Nantes and Lille LOSC at the La Beaujoire stadium in Nantes, western France on February 7, 2021. (Photo by Sebastien SALOM-GOMIS / AFP)

“J’avais l’image du méchant et je devais conserver mon personnage”, confie Raymond Domenech

Sélectionneur de l’équipe de France de football pendant six ans, il a géré la pression des journalistes, de l’opinion et des politiques avec un style bien à lui. Certains diront avec froideur ou mépris, d’autres répondront avec humour et provocation. Il n’empêche qu’il a occupé l’un des postes les plus exposés de France. Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Raymond Domenech dans l’émission d’entretien, Un monde, un regard.
Stella Naville

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Pour Raymond Domenech, tout a commencé dans une cité de HLM à Lyon, sa ville natale. Fils d’une ouvrière pied-noir et d’un père homme d’entretien catalan, rien ne semblait prédestiner le futur sélectionneur de l’équipe de France à endosser une telle responsabilité. Et pourtant…

La passion du football

Pour tomber amoureux du foot, Raymond Domenech n’a pas eu besoin d’aller bien loin. Le coup de foudre a eu lieu en bas de son immeuble. Et pour lui, taper dans un ballon c’était aussi et surtout une manière de ne pas se laisser influencer par de mauvaises fréquentations ou ne pas tomber dans l’oisiveté. “Quand on habite dans une cité, la seule manière de se sauver c’est les études ou le sport. Il ne faut pas se laisser influencer par la meute. Il faut exister par soi-même”.

 

Rapidement, Raymond Domenech devient un joueur professionnel et abandonne ses études. Une décision qu’il regrette. “Ne pas m’être présenté à mon épreuve de philosophie au baccalauréat, c’est de la faiblesse et de la lâcheté. J’ai choisi la facilité. En tant que joueur professionnel, je gagnais déjà plus d’argent que mes parents sans avoir le baccalauréat. Sur le moment, je n’ai pas compris l’intérêt que j’avais de le passer”. Aujourd’hui, les jeunes professionnels du football sont mieux conseillés et encadrés. “Les centres de formation poussent les jeunes athlètes à aller au maximum de leurs capacités, aussi bien physiques qu’intellectuelles. Maintenant, un joueur professionnel qui a les capacités d’avoir le bac, il l’aura. Nous, on était livrés à nous-mêmes”.

Le rôle du méchant

Faire ses armes seul. Voilà qui n’est pas toujours évident mais qui a bien servi à Raymond Domenech par la suite. Tout d’abord en tant que joueur puis sélectionneur de l’équipe de France, il a dû faire face aux critiques et à de nombreuses polémiques.

 

En 1970, lors du match Lyon/Nice, le joueur est qualifié de “boucher” par les journalistes à cause d’une faute qu’il n’a pas commise. Pourtant, Raymond Domenech n’a jamais cherché à rectifier l’erreur. “Pendant des années, j’ai endossé le rôle du méchant et ce n’est pas grave. Guy Roux m’avait conseillé de ne pas chercher à être gentil mais à avoir un personnage. Lui, il était le « grippe-sou », moi, le méchant. Ça plaît aux gens de coller des étiquettes aux autres”.

Quelques années plus tard, en tant que sélectionneur, Raymond Domenech est en première ligne de l’incident de Knysna lors de la Coupe du Monde en Afrique du Sud, en 2010. D’après Raymond Domenech, cette histoire est allée beaucoup trop loin. “Les politiques n’auraient jamais dû s’en mêler, ils se sont ridiculisés. C’est la preuve que le sport est devenu un objet politique. Les politiciens s’en servent pour jouer les redresseurs de torts”. Raymond Domenech dénonce notamment l’attitude de Roselyne Bachelot à l’époque. “Elle était venue faire un discours aux joueurs sur la solidarité mais elle a refusé que le staff entende ses paroles. C’est paradoxal. Son intervention n’était que de l’opportunisme politique”.

Futur entraîneur des féminines ?

Et si finalement Raymond Domenech avait préféré entraîner les footballeuses ? Il avoue lui-même que cela lui aurait plu, même s’il estime ne plus avoir l’âge pour ça désormais. “Je pense que j’aurais été très bien pour ça mais maintenant je suis dépassé. Et puis c’est un tout autre métier. Il faut être beaucoup plus fin. Les femmes ont plus d’exigences”. Les formations d’entraîneurs pour femmes sont effectivement différentes de celles destinées aux hommes : “Il y a des problématiques liées à la féminité, à la musculation. Il faut les prendre en compte pendant l’entraînement. Par exemple, les footballeuses ont beaucoup plus de blessures aux genoux que les hommes”. 

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