Jeux olympiques d’hiver : terrain de paix ou terrain d’affrontement ?

Jeux olympiques d’hiver : terrain de paix ou terrain d’affrontement ?

Pour la première fois, aux Jeux olympiques de Pyeongchang, les deux Corée ont accepté de concourir ensemble. Comment expliquer un tel rapprochement ? Affichage, propagande, ou entente durale ? Quel rôle jouent les Jeux olympiques dans les relations internationales ?  Du premier défilé des pays de l’ex-bloc soviétique à Albertville en 1992, au match de hockey sur glace violent entre l'URSS et les USA en 1980 à Lake Placid. Retour sur ces moments de diplomatie lors des Jeux olympiques d’hiver, pas toujours un symbole de paix entre les pays.
Public Sénat

Par Priscillia Abereko

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Les Jeux olympiques peuvent être tantôt les témoins de l’ouverture de certains pays tantôt le reflet des tensions du monde.

Si les Jeux olympiques de Pyeongchang se sont ouverts le 9 février dernier sous le signe de la paix, avec les deux Corée qui ont accepté de concourir ensemble dans trois disciplines olympiques, Jean-François Lamour, invité de l'Info dans le Rétro émet toutefois des réserves sur ce rapprochement entre les deux pays. Pour l'ancien ministre des Sports et double champion olympique d'escrime, « c'est la trêve olympique, c'est une des forces d'ailleurs de ce monde olympique d'arriver à exprimer un moment donné ou un autre un rapprochement. Sera-t-il éphémère ? Sera-t-il durable ? Sincèrement aujourd'hui, personne n'est capable réellement de le dire [...] Cela cache une habilité du Nord à clouer le bec en particulier aux Américains pendant cette période. Il est évident que tout cela ne suffira pas à rapprocher ces deux pays [...] Il ne faut pas demander au sport ce qu'il n'est pas capable de faire, on le verra très très vite je pense dans le dossier coréen ».

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Cette année, les Jeux olympiques d'hiver permettent d'apaiser certaines relations entre États, pourtant d'autres Jeux d’hiver ont quant à eux été les témoins d’affrontements et de rivalités entre différentes nations.

Les jeux olympiques de Lake Placid : un terrain d’affrontement

« Dans d’autres pays, évidemment que la pression est beaucoup plus importante. On retrouve à nouveau, le poids du politique sur la préparation et l’organisation des jeux ».

Nous sommes en 1980, lors des Jeux olympiques d’hiver à Lake Placid, la tension est à son comble lors du match de hockey sur glace opposant les Américains aux Russes. On assiste alors à un véritable affrontement sportif mais également à un affrontement idéologique entre les deux pays. Contre toute attente, l’équipe américaine remporte la victoire face à la légendaire équipe russe, victorieuse aux jeux de 1968. Pour Arnaud Waquet, historien spécialiste du sport, cette victoire américaine « est un miracle sur glace. C’était une équipe non professionnelle, une équipe de jeunes universitaires contre finalement des athlètes d’État russes […] L’équipe russe gagnait tout depuis 20 ans, c’est véritablement cette petite touche sportive qui montre bien que rien n’est jamais décidé avant le match ».

Mais derrière cette soif de victoire de l’équipe américaine, n’existait-il pas une pression exercée sur les athlètes pour gagner des médailles ? Pour l’ancien ministre des Sports et double champion olympique d’escrime, Jean-François Lamour, si en France il n’y a pas de notion de résultats à tout prix, « dans d’autres pays, évidemment que la pression est beaucoup plus importante. On retrouve à nouveau, le poids du politique sur la préparation et l’organisation des Jeux ».

Jean-François Lamour prend pour exemple cette équipe russe dans les années 80, « la seule à pouvoir sortir de l’URSS et donc à pouvoir « entretenir une forme de trafic » en rapportant un certain nombre de produits qui n’étaient pas distribués à Moscou […] Avec ce statut social reconnu, membre d’une équipe reconnue et puis également cette possibilité de sortir de Russie, qui était quasiment impossible à l’époque, voilà les éléments qui mettaient une grosse pression sur les membres de l’équipe de Russie ».

« Il ne faut pas demander au sport ce qu'il n'est pas capable de faire, on le verra très vite je pense dans le dossier coréen »

Lieu d’affrontements, source de pression... les Jeux olympiques d'hiver ont également été un moyen d'expression de la suprématie d'un pays sur un autre.

Au début du printemps de Prague, les JO constituent un lieu d’exécutoire aux tensions dans le bloc soviétique. À travers les compétitions officielles, chaque équipe tente d’exprimer sa supériorité sur les autres. Les Jeux olympiques de Grenoble en 1968 en sont le parfait exemple : alors que l’équipe tchèque de hockey sur glace est la seule équipe à gagner face à l’équipe soviétique dans la poule finale, ce sont finalement les Soviétiques qui sont déclarés vainqueurs. Comment expliquer un tel dénouement ? Ces rivalités et cette absence d’entraide au sein même du bloc soviétique ne sont pourtant pas anodines pour Arnaud Waquet : « Le terrain de sport a permis à un moment donné d’affirmer certaines nations, c’était l’occasion aussi pour les Tchèques de montrer qu’ils n’appartenaient pas forcément au bloc soviétique et qu’ils pouvaient avoir leur propre identité à travers une compétition sportive ».

Si le sport a et est toujours considéré comme une activité fédératrice, Jean-François Lamour lorsqu'il concourrait en tant qu'escrimeur a ressenti une certaine tension entre ces pays de l'Est : « Il y avait à la fois la fraternité du sport, c’est-à-dire qu’au-dessus de l’imposition d’une ligne politique par les dirigeants d’une fédération, il y avait la fraternité entre nous et peu importe quelle était notre origine. Mais évidemment, à un certain moment on voyait bien que le grand frère russe, soviétique à l’époque, imposait aux pays satellites un certain nombre de règles de bonne conduites on va dire, y compris sur la thématique du dopage ».

 

Retrouvez l'intégralité de l'émission présentée par Fabrice D'Almeida, vendredi 16 février à 23h, samedi 17 février à 8h30 et 15h30 et dimanche 18 février à 12h.

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