Ce matin, la proposition de loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a été adoptée par la commission des affaires économiques du Sénat. Elle prévoit des assouplissements sur les pesticides et le stockage de l’eau, et entend calmer les tensions entre les agriculteurs et l’Office français de la biodiversité.
Lancement de la convention citoyenne sur le climat, un exercice inédit
Par Héléna Berkaoui
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« Ça va être la découverte totale », confie Marie-Josée Victor, une des 150 personnes tirées au sort pour composer la Convention citoyenne pour le climat, avant de rentrer dans le palais d’Iéna (siège du Conseil économique, social et environnemental). Comme les autres citoyens présents ce vendredi, Marie-Josée Victor, une retraitée résidant dans une petite commune du Pas-de-Calais, a été choisie pour participer à cet exercice inédit de démocratie participative.
Encadrés par des professionnels, ces 150 citoyens devront, à l’issue de ces six week-end de travail, proposer des solutions concrètes pour réduire les émissions de gaz à effets de serre de moins 40 %, par rapport à 1990, d’ici 2030. Un défi qui interroge Marie-Josée Victor : « C’est quelque chose de très difficile à mettre en place, on peut tous faire quelque chose à notre niveau mais pas uniquement au niveau du citoyen, je pense surtout à l’industrie, c’est très polluant mais est-ce que financièrement l’industrie peut se permettre de changer radicalement ? Je suis sceptique. »
Cette convention citoyenne pour le climat (CCC), annoncée par Emmanuel Macron le 25 avril dernier à l’issue du grand débat, est une réponse au mouvement des gilets jaunes. Un mouvement dont l’étincelle avait été l’annonce de l’augmentation de la taxe carbone. Une mesure jugée injuste et déconnectée du quotidien des Français. « Notre objectif est de corriger la méthode et d’essayer de faire en sorte que des changements, y compris parfois des transformations profondes, puissent non plus être imposés par loi ou par l’impôt mais relever de propositions qui associent l’ensemble de nos concitoyens », a détaillé le Premier ministre venu introduire la première session de la Convention collective pour le climat.
Un exercice de démocratie participative qui réunit deux problématiques majeures : la crise de la démocratie et les défis climatiques. « La démocratie et le climat survivront ensemble ou ils périront ensemble », a résumé le coprésident du comité de gouvernance du CCC lors du discours de présentation, Thierry Pech. Un défi de taille qui a nécessité une importante organisation en amont. Pour réunir les profils les plus représentatifs au sein de cette convention, les organisateurs ont procédé à un tri des profils pour créer « une France en miniature ». Sur 150 personnes tirées au sort, on compte ainsi 51 % de femmes et 49 % d’hommes venus des quatre coins de la France et exerçant des professions, elles aussi, représentatives (voir le détail des profils sélectionnés). Les 150 personnes tirées au sort seront rémunérées à hauteur de 86,24 euros par jour, comme il est d’usage pour les jurés d’assises, et leurs frais leur seront remboursés.
Une sélection qui pourra permettre à ces citoyens de faire remonter des problématiques locales. Alexia Fundere, étudiante de 22 ans originaire de Guadeloupe, a notamment à cœur de partager ses préoccupations en matière de traitement des déchets. Ces citoyens seront amenés à travailler en petit groupe sur cinq thèmes : produire, consommer, se loger, se déplacer et travailler. Des thèmes qu’ils pourront reformuler ou changer d’après la coprésidente du comité de surveillance, Laurence Tubiana, architecte de l’accord de Paris sur le climat. Pour garantir l’indépendance du CCC, des personnes de la société civile ont été désignées pour encadrer la convention. Laurence Tubiana et Thierry Pech, directeur général de la fondation Terra Nova, pour la direction du comité de surveillance.
Des experts du climat et des acteurs de la démocratie participative, comme le professeur de science politique Loïc Blondiaux, seront aussi présents afin d’informer et de mettre à disposition leurs compétences. L’objectif étant bien sûr d’accompagner les 150 personnes tirées au sort et de mettre en forme leurs propositions. Un collège de garants a également été nommé pour s'assurer de la transparence de cette convention. « Si vous avez le sentiment d’avoir été manipulé, n’hésitez pas à leur en parler », invite ainsi un des animateurs de la CCC. La transparence et l’indépendance du processus sont des thèmes qui sont revenus de façon récurrente au cours de cette journée de présentation. « Il vous appartient d’être indépendants du gouvernement, des lobbies et ça c’est une responsabilité qui vous incombe », a également déclaré le Premier ministre.
À l’issue de ces six week-end de travail, les solutions pour réduire les émissions de gaz à effets de serre devront être transmises « sans filtre », selon les mots d’Emmanuel Macron, au Parlement. Une promesse nuancée par le Premier ministre : « Si vous trouvez des solutions, si vous avancez sur ces solutions, comme le président de la République s’y est engagé, nous traduirons, vous traduirez, ces propositions en projet de loi, en mesures réglementaires voire pour les plus puissantes et si c’est nécessaire nous les soumettrons à référendum. » Aucune certitude donc sur la manière dont ces recommandations seront retranscrites au niveau législatif. Les conclusions des travaux de ces 150 tirés au sort devraient être rendues au mois de janvier. Édouard Philippe a par ailleurs déclaré que cette convention, inédite dans la vie politique française, avait vocation à devenir « une des modalités permanentes de la vie démocratique ».
Une démarche qui ne convaincra toutefois pas les ONG qui accusent le gouvernement d’utiliser cette convention pour se défausser de ses responsabilités. « Le lancement de cette convention ne doit pas faire oublier l’inaction continuelle du gouvernement. Après le vote définitif d’une loi énergie climat sans ambition, le projet de loi de finances 2020, présenté la semaine dernière, reconduit presque entièrement les 11 milliards de niches fiscales bénéficiant aux énergies fossiles, telles que l’absence de taxe sur le kérosène des avions », dénonce Greenpeace.