Le contrôle coercitif, rouage clef des violences conjugales : « Je l’ai retrouvé dans 9 dossiers de féminicides sur 10 »

Isabelle Lonvis-Rome, la ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, était invitée ce vendredi 5 mai de Public Sénat. Elle souhaite que la notion de contrôle coercitif, qui recoupe les comportements de prédation déployés par un homme pour assujettir sa conjointe, soit mieux prise en compte par la justice.
Rédaction Public Sénat

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La notion de « contrôle coercitif » bientôt dans la loi française ? L’exécutif y réfléchit dans le cadre d’un éventuel renforcement de l’arsenal législatif contre les violences faites aux femmes. Derrière ce terme, déjà constitutif d’un délit dans certains pays, comme la Grande-Bretagne et le Canada, se cache l’idée de contraintes imposées de manière répétée par un conjoint, et destinés à renforcer son emprise psychologique sur sa partenaire pour mieux l’enfermer dans la relation en la privant progressivement de sa liberté d’action.

« J’ai souhaité que nous travaillions particulièrement sur ce sujet avec des associations, des chercheurs et des représentants des autres ministères, de la Justice, de l’Intérieur. Nous devons avancer là-dessus », a indiqué Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, ce vendredi au micro de l’émission « Extra local » sur Public Sénat. Cette ancienne présidente de cours d’assises souhaite notamment que cette notion soit mieux appréhendée lors de la formation des magistrats, dans la mesure où le « contrôle coercitif » peut être considéré comme le signe précurseur d’un passage à l’acte.

« Dans les féminicides que j’ai jugés, dans 9 dossiers sur 10, je retrouvais systématiquement ce mécanisme. Il est important de bien l’identifier », explique-t-elle.

« Réduire l’autre quasiment à néant »

« C’est un terme un peu compliqué », reconnaît Isabelle Lonvis-Rome. « Il s’agit d’un contrôle exercé en verticalité sur l’autre, pour l’écraser. Ce sont des comportements répétitifs, cumulatifs qui visent toujours à réduire l’autre quasiment à néant », détaille la ministre.

« J’ai présidé des cours d’assises pendant des années et j’ai vu ce scénario répétitif : isoler l’autre de sa famille et de ses amis, l’humilier en permanence, le harceler, c’est une jalousie excessive, des violences psychologiques. Cela peut même être une violence d’ordre économique, comme retirer la carte bleue, etc. », illustre-t-elle. « Cette notion de contrôle coercitif permet d’identifier les comportements de violences conjugales », assure Isabelle Lonvis-Rome.

La première ministre Élisabeth Borne a présenté le 8 mars dernier le plan quinquennal pour l’égalité entre les femmes et les hommes, qui prévoit notamment de mieux armer la justice face à la difficulté d’appréhension des violences conjugales, un phénomène qui relie souvent de nombreux engrenages, parfois complexes à cerner. Sur la base des recommandations formulées par la sénatrice Dominique Vérien et la députée Emilie Chandler, chargée par l’exécutif de plancher sur ce dossier, des pôles spécialisés sur ces questions devraient voir le jour dans chaque juridiction.

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