Le Sénat adopte une proposition de loi pour redonner un « second souffle » au service civique

Les sénateurs ont adopté la proposition de loi de Patrick Kanner (PS) pour mieux valoriser l’engagement de la jeunesse au sein des services civiques. Voté par une très large majorité, le texte a cependant été amoindri par rapport à sa version initiale. Le principe d’une revalorisation de l’indemnité a été rejeté en séance.
Guillaume Jacquot

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Il est né d’une initiative parlementaire au Sénat en 2009. Si un nouveau chapitre s’ouvre pour le service civique, c’est entre les mêmes murs que l’impulsion a été donnée. Le Sénat a adopté ce 10 avril, dans la soirée, une proposition de loi déposée par le sénateur Patrick Kanner, le président du groupe socialiste, afin de « renforcer le service civique », en le rendant plus large et plus attractif.

« Dans un contexte de tensions exacerbées par une jeunesse désorientée, parfois à l’extrême » comme l’a souligné l’ancien ministre des Sports et de la Jeunesse, une très large majorité du Sénat (307 voix contre 16) a choisi de « revitaliser » un dispositif dans lequel se sont investis 780 000 jeunes depuis sa création. Ces missions d’intérêt général volontaires concernent les jeunes de 16 à 25 ans (limite portée à 30 ans pour les personnes en situation de handicap), et se déroulent dans des milieux associatifs ou des structures publiques, dans des domaines aussi variés que les solidarités, la culture, la santé, ou encore l’humanitaire.

Fortes réticences à étendre l’âge limite au-delà de 25 ans

Le large soutien accordé au texte est le fruit d’une série de compromis qui l’ont toutefois éloigné des intentions initiales. La proposition de départ visait à étendre l’âge maximal à 30 ans, avant d’être réduit à 27 ans en commission la semaine dernière. L’extension aux 25-27 ans fera finalement l’objet d’une expérimentation suivie d’une évaluation, concession proposée par Patrick Kanner lui-même en séance, face aux doutes de la majorité sénatoriale, mais également parmi ses alliés. « Elargir un tel dispositif sans l’encadrer, c’est prendre le risque de le dénaturer et précariser les premiers concernés », a fait valoir la sénatrice écologiste Mathilde Ollivier. Son groupe a finalement voté contre la proposition. Les communistes, également réservés, se sont abstenus. « Nous craignons que cette proposition de loi aille à rebours des préoccupations de la jeunesse aujourd’hui, dont le taux de chômage est de 17,4 % », a argumenté Gérard Lahellec.

L’élargissement au-delà du seuil des 25 ans était d’ailleurs aussi l’une des « réserves » du gouvernement, qui n’a pas vu que des « impacts positifs » dans la copie du Sénat. « Aller jusque 25 ans pose un certain nombre de questions, car c’est trop proche de l’insertion professionnelle », a averti Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles.

Statu quo sur l’indemnisation

Déjà atténué lors des débats de commission, le principe d’une revalorisation de l’indemnité mensuelle des volontaires, de 620 à 760 euros, a finalement été abandonnée en séance, sur l’impulsion de la droite. Selon le sénateur Cédric Vial (apparenté LR), cette revalorisation représentait 20 % des crédits alloués au service civique. « Sans un engagement du gouvernement d’augmenter dans les mêmes proportions cette ligne budgétaire, cela se traduirait par une diminution de 17 000 à 20 000 contrats par an », a averti le sénateur de la Savoie.

Plusieurs sénateurs se sont d’ailleurs émus en séance des menaces qui pèsent depuis plusieurs semaines sur le budget du service civique. Le programme qui le porte est concerné par l’annulation de 129 millions d’euros d’engagement budgétaire dans le décret pris en février par le gouvernement. La ministre de l’Education nationale, Nicole Belloubet, avait d’ailleurs récemment admis lors d’une audition au Sénat que le service civique pourrait pâtir de ce mouvement budgétaire. Sarah El Haïry a précisé que la réduction de 100 millions d’euros ne toucherait que la trésorerie de l’Agence du service civique. « Cela ne touchera ni le nombre de jeunes, ni le nombre de missions, ni la durée des missions », a-t-elle insisté.

De nouvelles avancées pour les volontaires en service civique

Malgré ces deux principales inflexions en séance, la proposition de loi sortie du Sénat comporte toujours une série d’amélioration. Elle donne par exemple la possibilité à un étudiant d’effectuer une année de césure au milieu de son parcours universitaire, avec l’assurance de pouvoir reprendre la formation interrompue à l’issue de ses mois d’engagement.

La formation civique et citoyenne, disposée dans le cadre du service civique, a été renforcée dans sa durée en étant portée à trois jours, et dans son contrôle.

La proposition de loi va également permettre à certaines institutions, comme les assemblées parlementaires ou les juridictions administratives ou financières, d’accueillir des jeunes en service civique. Le volontaire, sur son accord, pourra aussi être mis à disposition temporaire dans le cadre d’une mission de crise ou d’urgence. Ce point doit néanmoins évoluer « dans son écriture » au cours de la navette parlementaire, a appelé la ministre.

Le compte d’engagement citoyen pour les volontaires du service civique pourra être également mobilisé pour le paiement des frais d’inscription pour les études supérieures. Enfin, la durée du service civique pourra être prise en compte dans le calcul de l’expérience professionnelle pour le recrutement dans la fonction publique, dans le cadre des troisième concours (ouverts aux candidats ayant déjà une expérience professionnelle). Dans sa version initiale, la proposition prévoyait la prise en compte des services civiques dans les candidatures aux filières sélectives du supérieur, mais la commission de la culture et de l’éducation a repoussé cette idée par crainte d’une rupture d’égalité.

Malgré la « réduction de la portée » du texte, Patrick Kanner salue néanmoins l’adoption du texte par le Sénat. « On progresse, on chemine. Il y aura peut-être une ouverture à l’Assemblée nationale », a également conclu la rapporteure socialiste Sylvie Robert.

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